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Conflit armé Israël/Hamas : ces possibles répercussions à craindre… 

Le Fonds monétaire international tire la sonnette d’alarme : la guerre entre Israël et le Hamas aura des conséquences économiques. À Maurice, les observateurs ne cachent pas leurs appréhensions car ce conflit risque d’affecter le pays à divers niveaux.

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… pour l’économie mondiale

« Un nouveau nuage dans un horizon déjà peu ensoleillé pour l’économie mondiale ». C’est en ces termes que la directrice générale du Fonds monétaire internationale (FMI), Kristalina Georgieva, a qualifié cette semaine la guerre qui oppose Israël et le Hamas. Selon elle, ce conflit armé pourrait bien impacter le monde entier et menacer l’économie mondiale. À Maurice, Sunil Boodhoo, directeur de l’International Trade Division au ministère des Affaires étrangères, fait partie de ceux qui suivent la situation de près. « Il faut attendre pour voir ce qui va se passer. Le monde a dû faire face à la pandémie, aux conséquences de la guerre russo-ukrainienne, à la montée de l’inflation et des taux d’intérêts. Cette nouvelle guerre va créer une situation plus morose sur le plan économique. Il faudra s’attendre aussi à une hausse de l’inflation », appréhende Sunil Boodhoo. Et il est bien connu que quand ça va mal dans une partie du monde, c’est tout l’écosystème mondial qui est impacté y compris Maurice.

nuage

À retenir 

Une hausse de 10 dollars des prix du pétrole, si elle est persistante, peut entraîner une perte de 0,15 point de pourcentage de PIB au niveau mondial, a prévenu cette semaine Pierre-Olivier Gourinchas, le chef-économiste du FMI.

…pour le pétrole 

petrole

prix du petrolLes cours du Brent et son équivalent américain - le West Texas Intermediate - ont augmenté de 4 %, moins de 48 heures après l’offensive surprise du Hamas contre Israël. Pour Sunil Boodhoo, il est clair que cette crise aura un impact sur les produits pétroliers. L’ancien diplomate Assad Bhuglah abonde dans le même sens. « Cette guerre se passe au Proche-Orient, une partie du monde où l’approvisionnement et la production du gaz et du pétrole se font. Si cette guerre s’intensifie et s’étend en dehors de la Palestine, il y a le risque que le marché du gaz et du pétrole soit perturbé », fait-il ressortir. 

Selon l’économiste Eric Ng, il n’y a pas de quoi s’inquiéter pour le moment. « Certes, le prix du baril et du gaz a augmenté, mais le pétrole n’a pas connu une hausse fulgurante. Tant que le conflit se limite à Gaza, il n’y aura pas de grandes répercussions. Par contre, si le conflit déborde entre Israël et l’Iran, il faudra s’attendre à une forte hausse du prix du pétrole », souligne-t-il. 

Megh Pillay, ancien directeur de la State Trading Corporation (STC), fait, pour sa part, ressortir que ce n’est pas la première fois que le Proche-Orient est en crise. « On a connu des crises semblables quoi que chacune était différente, mais sur le coup, tout aussi dramatique. Après l’attaque surprise par le Hamas, le marché du pétrole a connu une réaction instinctive (« knee jerk reaction »). Tout le monde a couru pour acheter du pétrole. Du coup, il y a eu une hausse de 4 dollars sur le baril. Cependant, pendant les jours qui ont suivi, le prix s’est détendu. À chaque crise, c’est la même chose qui se produit », explique Megh Pillay. 

Comment évoluera la situation dans les jours et semaines à venir ? Megh Pillay ne s’attend pas à de grand changement et encore moins à une hausse dramatique et exagérée. « D’une part, ni Israël, ni la Palestine ne sont de gros producteurs de pétrole. Du coup, les fondamentaux de production ne seront pas impactés. De l’autre, l’Arabie saoudite, un de gros producteur, avait réduit sa production pour stabiliser les prix. Le pays ne fera rien pour neutraliser ses actions et déstabiliser les prix. Ce qui fait croire qu’il n’y aura pas de changement dramatique. Il n’y a donc aucune raison d’être plus effrayé aujourd’hui qu’il y a une semaine », avance l’intervenant. D’autant plus, souligne-t-il, que le marché avait prévu une tendance haussière du prix du pétrole soit jusqu’à 100 dollars le baril avant le déclenchement des hostilités entre ces deux pays. « Il n’y a rien d’effrayant car on a connu pire pendant les années 2010 où le prix moyen était de 112 dollars. Ces années-ci, la moyenne ne dépasse pas les 80 dollars. On dramatise beaucoup cette situation alors que cela n’aurait pas dû être le cas. Comme pour toutes les crises précédentes dans cette zone, je ne suis pas pessimiste. Il faut patienter, attendre pour voir une normalisation des cours du pétrole. N’oublions pas qu’il y a d’autres producteurs et d’autres routes pétrolières. De même, les acheteurs et les vendeurs sont toujours sur le marché », conclut Megh Pillay.

…pour le gaz 

Economie

Comme pour le pétrole, le cours du gaz s’est emballé en début de semaine dans le sillage des hostilités entre Israël et le Hamas. Doit-on craindre pour le prix du gaz ménager ? Megh Pillay (photo) se montre rassurant. « Le gaz ménager que nous utilisons est surtout à base de propane et du butène. Or, ces deux gaz sont produits par l’Arabie saoudite qui est un de plus gros producteurs de gaz dans le monde », explique-t-il. Il faut aussi ressortir que le prix mondial du LPG (gaz ménager), qui est déterminé par le Saudi Aramco CP, est volatil. « Il était de 960 dollars la tonne en juillet 2022 avant de descendre à 420 dollars la tonne en juillet 2023. Depuis, le prix a grimpé à 560 dollars la tonne et cela avant même le déclenchement des hostilités. En dépit de cette hausse, on reste loin des niveaux de 2022 », explique-t-il.

…pour le tourisme 

Cette guerre peut avoir un impact sur le tourisme, appréhende Assad Bhuglah, surtout que Maurice accueille de plus en plus de touristes du Moyen-Orient. Sydney Pierre, Chief Sales & Marketing Officer du Groupe Marriott, craint que le marché israélien ne soit affecté. « De plus en plus d’Israéliens viennent à Maurice. Cette clientèle sera affectée. Il faudra s’attendre à des grosses annulations. D’ailleurs, nous avons déjà commencé à recevoir quelques annulations », indique-t-il. Pour ce qui est du marché du Moyen-Orient, Sydney Pierre ne prévoit pas d’impact. « Cependant, il faudra suivre de près l’impact de ce conflit sur le tourisme en général. Nous espérons que cette crise soit isolée et pas trop longue », conclut l’intervenant.

touristes

Bon à savoir

Le coût du fret varie de 1 000 dollars à 1 300 dollars au départ de l’Asie pour un conteneur de 20 pieds et de 40 pieds.

…pour le transport maritime 

port

« Si jamais il y a un blocage au niveau du Canal de Suez, le transport maritime sera pénalisé et le commerce risque d’être bloqué. De même, si les bateaux doivent faire un détour, il y aura un coût », avance Assad Bhuglah. Une appréhension que partage Yousouf Delbar, porte-parole de l’Association Professionnelle des Transitaires. « Si le conflit s’aggrave et qu’il y a une obstruction du Canal de Suez, il faudra s’attendre à un impact négatif sur le coût du fret au niveau mondial que ce soit au départ de l’Asie, de l’Europe ou des États-Unis. Le temps de transit va augmenter de 20 à 30 jours. Ce qui affectera le fret », explique Yousouf Delbar. Le fret, qui s’est stabilisé, adopte une tendance à la hausse ces derniers temps avec la reprise de l’économie mondiale. « Si le conflit s’envenime, la situation sera compliquée », souligne-t-il. 

Et si le pétrole augmente parallèlement, poursuit Yousouf Delbar, il faudra craindre des pressions inflationnistes avec des produits qui deviendront plus chers. « Nous espérons que nous n’arriverons pas à ce stade et qu’une solution sera trouvée au conflit au plus vite. Cela dit, il nous faudra nous préparer pour le pire », ajoute-t-il.

Trois questions à…  Amit Bakhirta, fondateur et CEO d’Anneau : « Le plus grand risque est une plus grande volatilité sur les marchés des matières premières » 

Avec ce conflit armé, peut-on s’attendre à ce que le baril de pétrole atteigne rapidement la barre des 100 dollars ?  
Chez Anneau, et à ce stade du conflit, nous ne nous attendons pas à cela, malgré la reprise de la demande globale mondiale de pétrole et de gaz. Nous considérons cela comme un non-événement à ce stade. Et cela est pris en compte dans les prix mondiaux du pétrole et du gaz, qui n’ont pas été de plus en plus mis sous pression uniquement à cause de cet événement, mais plutôt à cause des réductions d’approvisionnement de l’OPEP+ (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole). Même si nous devons surveiller de très près l’évolution du conflit, toute escalade impliquant d’autres pays, notamment les États-Unis, l’Iran et l’Arabie saoudite, alimenterait, toutefois, davantage de complications dans ce conflit délicat.

Quel est le volume de marchandises acheminées de et vers Maurice par le Canal de Suez et quelles pourraient être les conséquences d’un éventuel blocage de cette route maritime ? 
Nous estimons que plus de la moitié des exportations maritimes de notre pays vers l’Union européenne passent généralement par ce canal. À ce stade, nous ne nous attendons pas à un bis repetita de la crise de Suez de 1956.

Quelles sont les autres possibles répercussions de cette guerre sur l’économie mondiale et, par ricochet, Maurice ?
Nous pensons que le plus grand risque est une plus grande volatilité sur les marchés mondiaux des matières premières et son effet multiplicateur implicite et favorable sur les pressions inflationnistes. Nonobstant le fait qu’un environnement macro politico-économique mondial plus volatil, conflictuel et incertain est susceptible de renforcer les attributs de « valeur refuge » du dollar américain, conduisant ainsi plausiblement à une appréciation marquée du dollar par rapport à notre roupie. Ainsi, le risque macroéconomique le plus préoccupant concerne l’inflation importée dans un environnement déjà tenace.

 

 

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