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Conduite en état d’ivresse - La cellule de dégrisement : une mesure salvatrice

Plus d’une centaine de conducteurs contrôlés positifs à l’alcootest ont été placés en cellule de dégrisement dans des postes de police. Les autorités assurent que cette nouvelle mesure porte ses fruits et décourage l’alcool au volant. D’autres dispositions sont envisagées pour de meilleurs résultats.

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La cellule de dégrisement, c’est l’endroit où vont tous ceux qui conduisent sous l’emprise de l’alcool. Cette nouvelle mesure concerne les automobilistes, les motocyclistes et les cyclistes. 51 usagers de la route ont été détenus pour conduite en état d’ivresse entre le 31 décembre 2016 et le lundi 9 janvier 2017.

Les automobilistes, motocyclistes et cyclistes sont verbalisés s’ils conduisent avec un taux d’alcool dépassant 23 microgrammes dans le sang.  Plus d’une centaine d’entre eux ont passé la nuit en détention, le temps de se dégriser, depuis l’entrée en vigueur des amendements au Traffic Road Act en décembre 2016.

Charles, la soixantaine, a toujours aimé picoler. Qui plus est, cet habitant de Beau-Bassin est chauffeur de son état.

En chiffres

Du 31 décembre 2016 au 9 janvier:

  • 43 476 contrôles routiers
  • 4 132 contraventions
  • 51 personnes placées en cellule de dégrisement
  • 713 procès-verbaux pour excès de vitesse

« Maintenant, je suis à la retraite, mais il m’est arrivé assez souvent de conduire en état d’ébriété. Heureusement, je n’ai jamais tué personne.

L’Inspecteur Ashok Matar montre un pamphlet publié à l’occasion de la campagne de sensibilisation de la police.

Toutefois, depuis l’annonce de la nouvelle loi, je ne bois plus quand je dois prendre le volant. Cela m’irrite un peu car je ne peux plus m’amuser comme auparavant. Pour rien au monde, je ne veux être placé dans une cellule de dégrisement dans un poste de police la nuit. Je n’aime pas que ma famille s’inquiète pour moi. »

Pour l’inspecteur Shiva Coothen, responsable du Police Press Office aux Casernes centrales, la campagne « Ou bwar ou kondir ou desouler dan stasyon », qui s’est intensifiée en décembre à cause des fêtes, a été un réel succès. « Le durcissement de la loi et la campagne de sensibilisation ont encouragé les automobilistes à être plus responsables. »

« Cette campagne vise à sensibiliser les automobilistes et autres usagers de la route sur leurs responsabilités quand ils prennent la route à n’importe quelle heure de la journée. Avec le nombre de morts sur les routes, en moyenne 130 à 135 par an ces cinq dernières années, l’heure est grave », souligne le responsable du Police Press Office.

Périmètre de contrôle

Barlen Munusami est l’homme de terrain qui, avec son équipe de la Traffic Branch, mène des opérations crackdown régulièrement la nuit, afin de traquer ceux qui ne respectent pas la loi. La Traffic Branch est le rempart contre l’insécurité routière. « Au cours de l’opération appelée Vehicle Point Checking, nous ciblons principalement les chauffeurs qui conduisent sous l’influence de l’alcool. Lors de cette opération, nous veillons au grain. Dès que des conducteurs pénètrent dans notre périmètre de contrôle, nous pouvons savoir s’ils sont sous l’emprise de l’alcool ou non. » Ces opérations, selon Barlen Munusami, sont très fructueuses.

Malgré le durcissement des lois et les nombreuses campagnes, les automobilistes ont toujours fait fi des règlements. Toutefois, avec la nouvelle loi, l’inspecteur Shiva Coothen espère que leur attitude changera. « Certains conducteurs ont toujours cherché des prétextes pour blâmer les autorités. Avec le durcissement des lois, le message que nous avons essayé de faire passer ne tombera plus dans l’oreille d’un sourd. » Pour cela, il fait un appel à tous les automobilistes pour plus de collaboration. « Les automobilistes ont du mal à changer leurs habitudes et l’éducation aux bons réflexes commence à la maison. »

Alain Jeannot, président de l’association Prévention routière avant tout.

Placer ceux qui sont sous l’emprise de l’alcool en cellule de dégrisement dans un poste de police est une mesure dissuasive contre l’alcool au volant, explique Alain Jeannot, président de Prévention routière avant tout (Prat). Il confie toutefois qu’il n’y a pas de solution miracle, sauf changer les mentalités.

« C’est une mesure qui va certainement marcher. Maintenant, il faut que les gens fassent un effort pour en saisir et retenir le sens. Quand une personne est verbalisée avec un taux d’alcool dépassant le seuil autorisé, elle va en cellule de dégrisement et aura à payer une lourde amende. C’est sûr que c’est une mesure de police dissuasive. Toutefois, ce n’est que dans trois ou quatre mois que l’on saura si elle marche réellement », constate le président de Prat.

Alain Jeannot considère l’alcool à Maurice comme un « complice social ». « Les Mauriciens pensent que s’il n’y a pas de boissons alcoolisées, il est difficile de s’amuser. Je connais moi-même des gens qui ne peuvent sortir lorsqu’il n’y a personne pour conduire quand ils seront enivrés. La nouvelle mesure va dans la bonne direction, surtout quand on voit le nombre de procès-verbaux dressés contre l’alcool au volant. Les gens maintenant ne sortent plus quand ils ont bu, selon mes observations. »

Pas en période de fête uniquement

La campagne semble porter ses fruits, indique le président de Prat. Toutefois, Alain Jeannot estime que c’est une opération qui ne doit pas se faire en période de fête uniquement. « Les boissons alcoolisées font partie de la culture mauricienne. Les gens boivent tout au long de l’année et pas seulement pendant les périodes festives. Il faut maintenant que cette loi, c’est-à-dire, ne pas boire au volant, s’inscrive dans notre culture. Ce changement doit s’opérer et doit être soutenu toute l’année. »

Pour notre interlocuteur, il ne suffit pas de durcir les lois, les autorités doivent proposer des alternatives. Alain Jeannot pense qu’il serait intéressant de mettre en place des systèmes de transport en commun, comme la création de compagnies proposant le service de chauffeurs. « Les autorités peuvent aider ces compagnies à prendre leur envol. » Alain Jeannot invite la police à multiplier les alcootests, et pas uniquement en fin d’année. « La police fait déjà un travail formidable pour lutter contre l’alcool au volant. Toutefois, la vigilance doit s’opérer tout au long de l’année, sinon la loi ne sera pas prise au sérieux. »


L’alcootest : les procédures

Si un conducteur est contrôlé positif à l’éthylotest, il doit ensuite souffler dans un ‘Evidential Breath Analyser’.

Un conducteur ne doit pas conduire avec un taux de 23 microgrammes d’alcool par 100 millilitres d’air expiré. Au cours de contrôles routiers, l’alcooltest est effectué en bordure de route. En cas d’alcoolémie positive, les policiers font passer le conducteur à l’éthylomètre. Ce dispositif mesure la concentration d’alcool dans les voies respiratoires.

L’éthylomètre est le seul instrument autorisé par la loi en vue d’une procédure judiciaire, explique l’inspecteur Shiva Coothen. «  L’éthylotest, que nous appelons aussi alcootest préliminaire, nous indique si le chauffeur est réellement sous l’influence de l’alcool. Si c’est le cas, nous l’emmenons dans la caravane pour le soumettre à un Evidential Breath Analyser (éthylomètre). Il va souffler deux fois de suite et le spécimen reçu sera utilisé devant la cour. Si les résultats du test sont supérieurs à 23 microgrammes d’alcool par 100 millilitres d’air expiré, c’est que le test est positif », ajoute notre interlocuteur.

Et que se passe-t-il si le test est positif ? « Si le test est positif, nous allons lire ses droits à la personne concernée. Elle sera ensuite conduite au poste de police où elle passera quelques heures, voire 24 heures, le temps qu’elle ne soit plus sous l’influence de l’alcool. Pour en avoir le cœur net, nous faisons un autre test d’alcoolémie 12 ou 24 heures après. »


Les principaux amendements au Road Trafic Act

  1. Causing death by dangerous driving : l’amende passe de Rs 75 000 à Rs 100 000; peine d’emprisonnement variant de trois à cinq ans.
  2. Causing death by careless driving under the influence of intoxicating drink or drugs : la peine d’emprisonnement, pour une première condamnation, passe de trois à cinq ans. En cas de récidive, l’amende sera fixée entre Rs 75 000 et Rs 100 000; peine d’emprisonnement variant de 12 mois à huit ans.
  3. Les officiers de police en uniforme pourront effectuer des Random Breath Tests sur n’importe quel usager de la route. Tous les véhicules de police seront équipés d’un éthylomètre.
  4. Un automobiliste sous l’influence de l’alcool sera immédiatement placé en cellule de dégrisement.
  5. Le permis de conduire d’un conducteur sera suspendu pendant une période ne dépassant pas deux mois s’il est trouvé coupable de :
    • causing death by careless driving ;
    • driving or being in charge of motor vehicle under influence of drink or drugs under 123 E ;
    • driving or being in charge of a motor vehicle with alcohol concentration above the prescribed limit. Un contrevenant qui n’est pas titulaire d’un permis ne pourra pas, quant à lui, prétendre à obtenir un permis pendant une période n’excédant pas six mois.
  6. Un automobiliste impliqué dans un accident disposera d’une heure seulement pour se rendre au poste de police le plus proche pour rapporter le cas, contre quatre heures auparavant. Tout contrevenant devra s’acquitter d’une amende de Rs 5 000. Quant à la peine d’emprisonnement, elle passe de six mois à trois ans.

Service de taxis en ligne : une alternative au Bob

Un service de taxis en ligne, c’est le concept lancé par la société Logidis. Il se prénomme Alalila. Son manager Naden Padayachi soutient que depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, les réservations n’ont cessé de grimper. « Beaucoup de personnes ont fait des réservations, surtout durant la période des fêtes. On a trouvé qu’il y avait un intérêt pour ce genre de service. Les gens commencent à comprendre que leur sécurité et celle d’autrui priment. »

Naden Padayachi salut l’initiative du gouvernement de durcir les lois. « Il y a les lois et nous proposons des alternatives. Nous enregistrons les réservations en ligne via notre site Internet, notre application et notre hotline. Nous envoyons ensuite un taxi au client à l’heure qui lui convient. »

 

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