
Le début de l’année 2025 suscite des inquiétudes pour Maurice. Contrairement à des destinations voisines telles que les Maldives et le Sri Lanka, qui ont enregistré une croissance solide des arrivées touristiques, Maurice accuse un retard significatif. Par exemple, de janvier jusqu’au début d’avril, les Maldives ont accueilli 667 730 touristes, soit une augmentation de 5,8 % par rapport à l’année précédente. Le Sri Lanka, lui, a connu une croissance de 14 % sur la même période avec 722 276 arrivées. Maurice, en revanche, peine à suivre cette tendance, avec des chiffres en déclin entraînant un manque à gagner important.
Publicité
Cette situation n’est pas une surprise. Il s’agit d’une tendance que je signale depuis l’année dernière. Il n’est plus utile d’en attribuer la responsabilité uniquement aux anciennes administrations ou aux arrivées en provenance d’un pays spécifique, surtout en l’absence de stratégies clairement communiquées, tant attendues depuis des mois et meme des annees. Gouverner, c’est prévoir. Ce manque d’anticipation et de stratégie a amplifié les effets du ralentissement et affaibli notre capacité à réagir efficacement.
Le problème réside dans l’absence d’une vision claire, d’une stratégie cohérente, et d’actions concrètes depuis des années, pour répondre aux défis auxquels font face les secteurs du tourisme et de l’aviation. Il manque également, à la tête de ces institutions, des dirigeants dotés d’une expérience internationale et d’une expertise approfondie dans les domaines de l’hôtellerie, de la gestion de destinations, et de l’aviation mondiale. Cette carence ralentit considérablement la réactivité du pays face à une concurrence régionale féroce.
Par ailleurs, un manque de synergie et une gouvernance fragmentée entre différents organismes (ministères, MTPA, Airport Holdings, compagnies aériennes, etc.) nuit à la mise en œuvre d’un plan d’action cohérent. Il devient urgent de créer une task force multisectorielle pilotée par des experts indépendants, afin de centraliser les efforts et d’établir un cap clair vers la relance.
Des mesures immédiates et radicales s’imposent. Parmi celles-ci, l’introduction d’une politique Open Sky apparaît comme une réponse stratégique à court et moyen terme. Elle permettrait de redynamiser la connectivité aérienne, d’ouvrir notre marché à de nouvelles compagnies, et de stimuler la concurrence bénéfique pour les consommateurs comme pour l’économie. Cette politique doit cependant s’accompagner d’une série de mesures complémentaires : amélioration de la capacité et des infrastructures aéroportuaires, augmentation de la capacité hôtelière, modernisation des infrastructures touristiques, renforcement de la sécurité et création d’un environnement propice aux activités nocturnes.
L’Open Sky, s’il est bien implémenté, peut positionner Maurice comme un hub stratégique entre l’Afrique, l’Asie et l’Australie, grâce notamment à l’exploitation de l’espace aerien. Cela attirerait plus de compagnies internationales et offrirait aux passagers plus de choix et de flexibilité.
Néanmoins, cette ouverture n’est pas sans risques, notamment pour Air Mauritius. Une libéralisation brutale pourrait fragiliser davantage la compagnie nationale. Une transition progressive s’impose, avec des mesures ciblées pour renforcer Air Mauritius, voire envisager serieusement sa privatisation, tout en veillant à la transparence et à la compétence dans sa gouvernance. Il est aussi essentiel d’éradiquer les nominations politiques inappropriées qui freinent son progrès.
Il convient toutefois de souligner que certains groupes hôteliers continuent de bien performer, malgré le contexte difficile. Grâce à leur expérience, leur vision stratégique et leur capacité à anticiper les évolutions du marché, ils parviennent à maintenir une dynamique positive, et ont un impact réel sur la résilience du secteur touristique mauricien. Leur succès prouve qu’avec une gestion professionnelle, des actions ciblées et une stratégie bien définie, il est encore possible de faire rayonner Maurice à l’international.
Outre la politique aérienne, la relance du tourisme passe aussi par :
- Une stratégie digitale et IA de promotion internationale ciblée, notamment sur les marchés émergents à fort potentiel ;
- Le développement de segments comme le MICE, le tourisme de santé, l’écotourisme et le tourisme culturel ;
- La facilitation des démarches administratives pour les voyageurs (e-visas, douanes rapides, etc.) ;
- Une meilleure coordination public-privé pour aligner les objectifs et mutualiser les ressources.
Les bénéfices de cette transformation sont immenses : augmentation du trafic aérien, baisse des prix des billets, et du fret aerien, stimulation du tourisme, développement des PME locales, et création d’emplois qualifiés. Mais pour y parvenir, Maurice doit faire preuve d’audace, de vision et de cohérence.
En conclusion, Maurice ne peut plus se permettre l’inaction. Le pays a toutes les cartes en main pour devenir un acteur majeur du tourisme régional, mais cela passe par une réforme profonde, planifiée, et libérée des considérations politiques et partisanes. Il est temps d’agir avec ambition et responsabilité.
Bio-Data
Inayat Ramjean est un consultant en hôtellerie qui a occupé des postes de direction dans l’hôtellerie et dans le domaine de l’aviation. Sa carrière est marquée par des réalisations, notamment en tant que responsable des opérations commerciales de deux groupes hôteliers internationaux, Accor et Hilton, en Arabie Saoudite.
L’expertise d’Inayat s’est manifestée lorsqu’il a contribué à la croissance et au succès de ces hôteliers. Son sens commercial et son leadership ont été essentiels dans la définition de l’orientation des deux marques dans un marché concurrentiel.
Au-delà de l’hôtellerie, Ramjean a réalisé des avancées dans l’industrie aérienne. Il a travaillé avec Philippine Airlines, Air India et United Airlines, la plus grande compagnie aérienne du monde.
Inayat Ramjean

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !