Interview

Arnaud Lagesse, Group CEO d’IBL Limited : «Notre pays doit conserver ses avantages fiscaux»

Arnaud Lagesse, Group Chief Executive Officer d’IBL Ltd – partenaire-clé de l’économie et premier conglomérat du pays en termes de revenus et de capitalisation boursière – expose ses attentes en marge du Budget 2017-18 présenté ce jeudi 8 juin.

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Quelles mesures phares attendez-vous dans le Budget 2017-18 ?
Le Budget national est un exercice important. C’est l’aboutissement du processus politique et économique ainsi que de la vision de nos dirigeants. Il contient la plupart des décisions majeures de l’organisation de notre pays. Il détermine quels secteurs d’activités sont soutenus et évalués. La force de loi appuie les budgets gouvernementaux. Elle est utilisée pour guider la supervision des répartitions. Il est normal que la population dont je fais partie veuille s’assurer du bien-fondé des dépenses et des mesures prévues. D’ailleurs, je tiens à saluer l’effort mis en place par le gouvernement cette année pour expliquer ce budget et rendre sa lecture accessible à tous.

Mes attentes, cette année, portent en premier lieu sur certains aspects économiques et sociaux. Ces préoccupations découlent de ma position de Group Chief Executive Officer (CEO) d’IBL Ltd. Il est souhaitable que notre pays conserve et augmente ses avantages en termes de fiscalité. Il est vrai que notre système est déjà bien positionné en ce sens, mais il y a, ces dernières années, un réel effort de certains pays, comme Dubayy ou Malte, pour adopter de telles stratégies dans ce domaine. Cela pourrait nous faire perdre quelques places sur l’échelle de l’attractivité et déstabiliser notre économie.

Ensuite, nous ne nous tournons pas suffisamment vers les talents hors frontières, nos compatriotes expatriés ou étrangers. Cette ouverture nous permettrait d’acquérir des compétences spécifiques pour certains chantiers que nous pourrions mieux maîtriser. Cela augmenterait le nombre de Mauriciens ayant un fort pouvoir d’achat.

Le développement durable, environnemental et énergétique fait partie de ces chantiers sur lesquels nous ne sommes pas assez avancés. J’y ajouterais une approche réfléchie de l’urbanisme. Nous pourrions nous appuyer sur l’expérience des villes qui ont su effectuer des transformations positives comme Le Havre ou Singapour.

Une réflexion stratégique sur la numérisation au niveau national représenterait un changement de paradigme pour Maurice. Une telle démarche transformerait et améliorerait les performances des secteurs public et privé de même que le quotidien de la population.

Le combat contre la pauvreté devrait-il être abordé dans le Budget ?
Sur un plan plus personnel, je souhaiterais que le Budget 2017-18 rétablisse l’équilibre dans la lutte pour l’éradication de toutes les formes de pauvreté dans le pays. La société civile et les secteurs privé et public doivent être des partenaires de cette lutte – des partenaires qui n’exerceraient pas un pouvoir contre-productif les uns sur les autres.

Qu’en est-il du système éducatif ?
Un sujet me tient à cœur, en tant que père de trois adolescents. C’est la stabilisation des fondamentaux de notre système éducatif. La mise en place d’un cursus pérenne qui réponde aux besoins de notre pays et de nos enfants est cruciale. Ce cursus doit être adapté aux méthodes et aux approches développées à travers le monde. Il doit aussi tenir compte des nouveaux métiers émergents. Chez IBL, nous avons besoin de spécialistes, de chercheurs et d’innovateurs. Nous aimerions pouvoir les trouver dans notre pays.

Quelles sont les principales difficultés qui se dressent sur le chemin d’une croissance supérieure à 4 % ?
La croissance économique rapide est une anomalie historique. Par conséquent, toute approche globale du développement doit tenir compte de la réalité, à savoir les divers obstacles à la croissance.

Quels sont les éléments essentiels pour y parvenir ?
Certains facteurs sont déterminants. Dans une perspective plus large, une productivité accrue augmenterait notre pouvoir économique en stimulant la croissance et en satisfaisant les besoins de nouveaux marchés importants. L’efficacité de notre système administratif doit jouer un rôle de taille pour arriver à ces 4 %. Ce système est une vitrine pour les investisseurs potentiels. Il a parfois un pouvoir de vie ou de mort sur les projets.

J’ajoute un aspect devenu le fer de lance de IBL Together : l’innovation. Elle stimule la croissance économique. C’est l’un des arguments les plus cohérents et consistants en macro-économie. La véracité de cet argument est prouvée depuis des siècles. Comment générer l’innovation ? L’innovation peut être façonnée et encouragée par les politiques publiques et traitée comme un contributeur essentiel à la croissance.

On évoque un regain de confiance au sein des entreprises. Quelle est votre analyse de la situation ?
Je ne peux parler que pour IBL Ltd. Nous notons une réelle solidité au sein des secteurs dans lesquels nous évoluons. Cette stabilité, sur laquelle nous nous appuyons, nous permet d’être ambitieux. Notre groupe est en phase d’expansion, tourné vers l’international tout en restant focalisé sur son assise locale.

Le secteur de la consommation confirme-t-il cette confiance ?
Certainement. LUX*, Winner’s, UBP ou BrandActiv, pour ne citer que ceux-là, font des progrès intéressants d’une année à l’autre dans un environnement où le taux d’inflation reste bas. Il est important de prendre régulièrement le pouls du consommateur. Nos entreprises ont développé une faculté d’adaptation indispensable pour exister dans ce secteur. Elles innovent et se réinventent quotidiennement pour répondre aux besoins de marchés en constante évolution.

Êtes-vous d’avis que l’investissement privé reprendra son envol en 2017-18 et recrutera davantage ?
Le secteur privé mauricien n’a jamais cessé d’investir. Il faut cependant souligner que l’investissement privé dépend des lois, de l’obtention de permis et des lignes directrices du gouvernement. Dans ce cadre, en marge de certains chantiers de l’État, le secteur privé pourra accompagner le secteur public : les villes intelligentes, la transformation de notre secteur énergétique ou le métro léger.

Notre groupe devrait, par exemple, participer à la refonte de la gare Victoria. Chez IBL, nous avons aussi de beaux projets, tous secteurs confondus, dans le pipeline. Nous nous attachons à apporter de la valeur ajoutée à Maurice dans nos réalisations.

Au-delà de la création d’emplois, nous valorisons la formation de nos équipes et le transfert de connaissances. Le capital humain est un pilier de notre organisation. Nous sommes prêts à travailler avec le secteur public pour créer des expertises locales fortes et permettre à notre pays de se développer, humainement, socialement et économiquement.

 

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