Arnaques et fraudes en ligne : attention aux faux gains, colis suspects et offres alléchantes 

Depuis quelques mois, les autorités constatent une recrudescence des cas d'escroquerie en ligne, notamment via les réseaux sociaux. Les escrocs profitent de l'intérêt des internautes pour les gains faciles et les offres alléchantes pour les piéger.

« You have been listed as a beneficiary of one million USD through an ATM card payment. Please respond to this email as soon as possible. » Ou encore : « Your parcel has arrived at our warehouse but cannot be delivered due to incomplete address information. Please update your address details within 24 hours; otherwise, your parcel will be returned. Please update your address using the following link: https://mauritiuspost-xe.com/mu. » Ce sont des messages que de nombreuses personnes ont reçus ces derniers jours. Si certaines font preuve de prudence en recevant ce genre de messages, d'autres, moins averties, finissent par tomber dans le piège des arnaqueurs.

Face à ces cas d’arnaque en ligne, les autorités ne cessent de tirer la sonnette d’alarme en raison du nombre grandissant de victimes. Depuis le début de l’année, 590 personnes ont été victimes de « scams » et de fraudes en ligne, tandis que 29 d’entre elles sont tombées dans le piège du phishing.

Menace mondiale 

Comment éviter ces pièges sur la Toile et comment adopter de bonnes pratiques pour ne pas se faire arnaquer ? Nous avons posé ces questions au consultant en cybersécurité et réseau, Didier Sam-Fat. Il explique que le phishing, ou hameçonnage, est une menace qui touche de nombreuses régions du monde, notamment l'Amérique, l'Europe et l'Asie. « Bien que l'Afrique soit moins touchée, Maurice commence à voir une augmentation significative de ces activités frauduleuses. Les arnaques par phishing se multiplient et prennent des formes variées, rendant la vigilance essentielle », plaide notre interlocuteur. 

Il et en garde que les arnaqueurs utilisent plusieurs méthodes pour piéger leurs victimes. « Parmi les plus courantes, on trouve des messages prétendant provenir d'institutions légitimes, avertissant que « votre compte sera bloqué » ou proposant des offres alléchantes. Ces messages, souvent truffés de fautes d'orthographe, visent à créer un sentiment d'urgence et de peur chez les destinataires », poursuit Didier Sam-Fat. 

Le voice phishing gagne du terrain

L’expert en cybersécurité et réseau ajoute que le voice phishing, ou vishing, est une autre technique en plein essor. « Les arnaqueurs utilisent des appels téléphoniques ou des messages instantanés, notamment via WhatsApp, pour tromper leurs victimes. Ils se présentent souvent comme des représentants d'institutions financières ou d'autorités, incitant les gens à fournir des informations sensibles », dit-il, en mettant l’accent sur l’importance de se protéger pour éviter de tomber dans le piège. 

Didier Sam-Fat indique qu’il y a des précautions à prendre. Par exemple, il faut vérifier l'adresse email. « Avant de répondre à un message, vérifiez le nom de domaine de l'expéditeur. Un domaine suspect ou une adresse Gmail pour une institution officielle doit éveiller vos soupçons », avertit-il. 

Il souligne de plus que la vigilance est de mise même pour les messages. « Si vous recevez un message d'un inconnu, ne cliquez pas sur les liens et ne fournissez aucune information personnelle », explique-t-il. 

Didier Sam-Fat demande aussi aux personnes de se méfier des appels suspects. « Si un numéro inconnu vous appelle, surtout s'il provient d'une région éloignée, bloquez-le et signalez-le sur WhatsApp », conseille l’expert. 

Il avance de plus qu’il faut également faire attention sur les plateformes sociales. Didier Sam-Fat constate que les arnaques sont fréquentes sur Facebook et, dans une moindre mesure, sur Instagram et TikTok. Il recommande de ne jamais faire confiance aux messages d’inconnus. 

Le consultant en cybersécurité et réseau met de plus en exergue que les personnes âgées restent des proies faciles. « Les personnes âgées sont particulièrement vulnérables face à ces arnaques, car elles sont souvent moins à l'aise avec les nouvelles technologies que les jeunes. Il est impératif de les sensibiliser et de leur rappeler de ne jamais faire confiance à des messages provenant d'inconnus », estime notre interlocuteur. Ce dernier demande aux personnes qui sont confrontées à un message suspect, de demander l'avis de leurs proches ou amis avant de prendre des mesures.

Méfiance 

Loganaden Velvindron, membre du groupe Cyberstorm.mu, est aussi d’avis qu’à Maurice, les arnaques se multiplient, que ce soit en ligne ou dans la vie réelle. « Face à ces tentatives d'escroquerie, la prudence est de mise. Même si l'appât du gain peut être tentant, il faut toujours se demander d'où provient cet argent. ‘Tou dimounn ki rod donn ou kass, ou bizin bien mefian’ », prévient-il. 

Il souligne que si une personne fait des transactions en ligne et que l'on vous propose un transfert d'argent, il faut s’assurer de la fiabilité de l'entreprise. Cela s’applique également pour les achats en ligne. « Vérifiez si elle est enregistrée et active à Maurice. Comme pour l'achat de meubles, il est préférable de se rendre dans des endroits connus et de confiance plutôt que de faire affaire avec des inconnus. C’est pareil pour les achats en ligne, il faut voir les commentaires si le vendeur est ‘genuine’ ou pas », rappelle notre interlocuteur. 

Loganaden Velvindron précise qu’il faut être vigilant même si on reçoit un message de sa banque. « Même lorsque vous traitez avec une banque, soyez vigilant. Si un employé de banque vous contacte pour une raison quelconque, appelez directement votre banque pour confirmer son identité et ses intentions. Cette pratique devrait être systématique pour éviter de tomber dans le panneau », lance le membre de Cyberstorm.mu. 

Il conseille par ailleurs de ne jamais cliquer sur les liens suspects. « Si vous recevez un message vous informant que votre compte est compromis, ne cliquez pas sur le lien. Écrivez plutôt un e-mail à Google ou à WhatsApp pour vérifier la véracité du message. Il ne vous en coûtera rien de prendre quelques minutes pour vous assurer de la fiabilité de l'information », avance-t-il. 

Il explique que c’est en cliquant sur les liens suspects que ce soit sur votre laptop ou votre téléphone portable que l’arnaqueur peut accéder à vos données. « Les arnaques techniques, comme le fait de laisser un code sur votre ordinateur pour avoir accès à vos informations personnelles, sont de plus en plus répandues. Une fois que les escrocs ont accès à vos détails, ils peuvent s'introduire partout », conclut Loganaden Velvindron. 

Me Manindra Utchanah : « Les crimes en ligne sont parfois difficiles à prouver »

Pour l’avocat Manindra Utchanah, les arnaques en ligne sont très variées, allant des courriels de phishing aux escroqueries sur les réseaux sociaux, par téléphone, entre autres. 

Dans certains cas, il est possible de se tourner vers le Mauritian Cybercrime Online Reporting System (MAUCORS). Selon l’avocat, ce département de la police est spécialisé dans les délits de cybercriminalité comme le bullying, le stalking et le scam, entre autres. « MAUCORS offre une plateforme sur laquelle il est désormais plus facile de signaler ces délits directement en ligne, plutôt que de se rendre à un poste de police ou au Central CID aux Casernes centrales à Port-Louis. Vous pouvez y inclure les preuves dont vous disposez. Et des poursuites pénales peuvent être engagées si l’identité de l’arnaqueur est connue », explique-t-il.

D’où l’importance, selon l’avocat, de conserver toutes les preuves de l’arnaque — courriels, relevés bancaires, captures d’écran, etc. Ces éléments peuvent s’avérer cruciaux dans le cadre d’une action en justice. « Les déclarants doivent également agir rapidement, car il peut y avoir des délais pour certaines actions légales », ajoute-t-il.

L’avocat précise aussi qu’il est important d’informer les organismes gouvernementaux et les régulateurs financiers concernés. « Par exemple, si une société de gestion est impliquée, il convient de se tourner vers la Financial Services Commission (FSC). Il y a aussi la nouvelle Financial Crimes Commission (FCC) qui regroupe plusieurs organismes », indique-t-il. Les personnes lésées peuvent de plus envisager des poursuites civiles pour récupérer les pertes financières.

Assurances Cyberrisques

Si l’arnaque implique des transactions bancaires ou des cartes de crédit, Me Manindra Utchanah précise que les banques peuvent aider à récupérer les fonds ou à annuler les transactions frauduleuses. « Si l’arnaque a eu lieu via une plateforme en ligne, il est utile de signaler le faux site à la plateforme qui l’héberge », recommande-t-il.

Toutefois, l’avocat reconnaît que « les crimes en ligne sont parfois difficiles à prouver ». « Cependant, ce qui est intéressant, c’est que si vous êtes assuré, une fois l’affaire signalée à la police, vous pouvez faire une réclamation auprès de votre assurance », dit-il.  Me Manindra Utchanah met également en avant les difficultés lorsque les délits sont commis depuis l’étranger. « Il est souvent nécessaire de faire des demandes à Interpol. Ces pays sont des fois débordés par ce type de crime où les services de police sont saturés. Il est rare que ces affaires aboutissent. D’où l’importance pour les entreprises de souscrire une assurance contre les cyberrisques pour se protéger contre ce type de délit. »