Législatives 2019

Argent et politique - Élections générales : combien les candidats dépensent-ils? 

D’après la loi, le candidat d’un parti ne doit pas dépenser plus de Rs 250 000 pour les élections générales.

D’un point de vue légal, les candidats participant aux élections générales ne doivent pas dépasser un certain seuil au niveau de leurs dépenses sous peine d’être en infraction avec la loi. Or, dans la pratique, avancent les observateurs politiques, ils dépensent bien au-delà de la somme recommandée d’autant plus qu’aujourd’hui, tout se monnaye. 

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Le plafond autorisé 

  • D’après l’article 51 de la Representation of People Act 1958, un candidat issu d’un parti a une limite de dépenses de Rs 250 000 pour les élections générales. Le seuil de dépenses pour un candidat indépendant est de l’ordre de Rs 150 000. 
  • C’est le candidat, son agent ou une personne autorisée en écrit par l’agent qui sont les seuls habilités à effectuer des dépenses pour les élections. 
  • Si les candidats ne respectent pas ces provisions, ils seront coupables de pratiques illégales. 

Les principaux postes de dépenses 

Affiches, banderoles, oriflammes, sonorisation, location de chaises et de tentes … ce sont les principales dépenses que doivent encourir les candidats. Ils doivent aussi prévoir des frais pour l’essence pour leur déplacement lors des réunions, des congrès et autres porte-à-porte. « Il faut aussi un budget essence pour véhiculer les électeurs le jour des élections », indique un habitué des élections, sans compter, ajoute-t-il, la nourriture et le financement des bases. Les dépenses varient selon plusieurs facteurs : la superficie de la circonscription, la force du parti dans ladite circonscription et le type de l’électorat. 

L’évolution des dépenses 

Les années 70 : « Quand j’étais candidat du MMM en 1970, j’avais dépensé que quelques centaines de roupies pour les élections, notamment pour payer la caution, les frais de transport et quelques dépenses lors des meetings surtout pour la sonorisation. À l’époque, nous obtenions beaucoup d’aides. Nous ne distribuions pas de briyani et nous n’avions même pas des ‘baz’ », avance l’observateur politique Dev Virahsawmy. En 1976, quand il a créé son propre parti, il a dépensé que Rs 3 000 à Rs 4 000 par circonscription.

Les années 80 : En 1983, il fallait des centaines de milliers de roupies pour participer à des élections, indique l’observateur politique. 

Actuellement . Les candidats dépensent largement bien plus que le montant recommandé. 

« Au bas mot, un candidat a besoin de Rs 1 million pour ses propres dépenses lors des élections. Les partis doivent aussi dédier un budget à chaque circonscription. Celui-ci tourne autour de Rs 10 millions par circonscription », selon les renseignements de Dev Virahsawmy. À titre d’exemple, ajoute-t-il, certaines personnes monnaient leur maison pour la tenue des réunions politiques. « Un candidat doit, par ailleurs, avoir plusieurs « baz », avec une permanence et les dépenses que cela impliquent », explique notre interlocuteur.  Du coté de plusieurs candidats et éventuels candidats que nous avons interrogé, tous affirment qu’ils « respecteront scrupuleusement le seuil de dépenses imposé ». « Qui osera dire le contraire au risque de se disqualifier ? » ajoute un député sortant qui briguera une nouvelle fois les suffrages. « C’est là toute l’hypocrisie et la malhonnêteté du système », déplore, pour sa part, Dev Virahsawmy


Questions à…. Jocelyn Chan Low (observateur politique) : «Une campagne électorale est un Million Dollar Business»

Est-ce que les candidats respectent la limite de dépenses imposée ? 
Tout le monde sait que les candidats dépensent bien plus que la limite imposée par la loi. Une campagne électorale est un Million Dollar Business. D’autant plus qu’aujourd’hui, les politiciens emploient des gens pour soigner leur image à travers les réseaux sociaux. 

On dit qu’un candidat doit « payer » pour obtenir un ticket. Est-ce une simple spéculation ou y a-t-il du vrai dans ces bruits de campagne ? 
Cela dépend ! Il y en a qui achète des tickets. Nous ne pouvons le prouver, mais cela existe. Tout comme il y a des gens qui financent les journaux en faveur d’un parti ou d’un autre comme c’est le cas actuellement.  

Vous êtes en faveur d’une loi sur le financement des partis politiques…. 
En effet ! Le grand souci à Maurice, c’est ce que le parti politique n’est pas une entité légale. Il n’y a donc pas de contrôle. Il faut une législation sur les partis politiques. Cette absence de loi fait que nous avons des travers de ‘money politics’ où c’est l’argent qui décide. Or, il y a plusieurs formules de contrôle du financement des partis. En Europe, c’est l’État qui finance les partis politiques. Il y a donc une institution qui veille au grain. Tout partisan qui donne de l’argent doit le déclarer. Par ailleurs, il y a une limite aux dons. C’est la seule manière de combattre la corruption. 


Le coût des élections

Entre Rs 300 millions et Rs 500 millions. C’est le coût que dépense un grand parti ou une alliance politique pour les élections, selon les estimations de Dev Virahsawmy.  « Les élections générales coûtent au total des milliards de roupies. N’oublions pas que certains partis ont beaucoup de moyens financiers », renchérit l’historien Jocelyn Chan Low. 

Quand le Nomination Day sonnera l’heure des dépenses 

« Actuellement, nous dépensons de l’argent que pour les frais d’essence. C’est après le Nomination Day (Ndlr : c’est prévu le 22 octobre) que les vraies dépenses vont commencer : affiches, banderoles, etc. », soutient Bobby Hurreeram du MSM. Du côté du PTr, c’est le même son de cloche. « Parler des dépenses à ce stade où la liste des candidats n’est pas encore finalisée est prématuré. C’est après le Nomination Day que les choses sérieuses vont débuter », avance Patrick Assirvaden, le président du parti.


Bon à savoir

  • Pour financer leurs dépenses, certains candidats puissent dans leurs propres économies. Il y a aussi ceux pour qui l’argent n’est pas un problème. « Certains candidats sont très aisés financièrement ou ont des familles fortunées », indique Dev Virahsawmy. Il n’est également pas un secret, ajoute-t-il, que certains candidats bénéficient du soutien financier des entreprises. Qu’en est-il des candidats indépendants ? Ces derniers obtiennent de l’argent grâce à la circulation des tickets de don, les versements des citoyens sur un compte bancaire ou encore grâce au soutien financier des mouvements associatifs.
  • « Faire la coupe ». C’est une expression politique qui veut dire que quand les législatives approchent, le leader du parti recevra de l’argent des uns et des autres en prévision de la campagne électorale. « En d’autres mots, c’est l’heure de la moisson », explique l’observateur politique, Dev Virahsawmy. Les « grands financiers », ajoute-t-il dans la même foulée, donnent de l’argent qu’aux leaders des partis et des alliances. « Tous les leaders y ont droit. C’est pourquoi ils tiennent autant à leur position », avance notre interlocuteur. 
  • Auparavant, ceux qui briguaient les suffrages devaient démissionner de leurs emplois. Ce qui n’est pas le cas pour les candidats de nos jours.
 

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