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Air Mauritius : réintégrés, les pilotes retrouvent leurs ailes

Ils étaient résignés à troquer la vie dans un cockpit contre un autre métier. C’est la décision qui s’imposait aux 18 pilotes d’Air Mauritius lorsqu’ils ont reçu leur lettre de mise à pied en août. Ensuite, les choses ont évolué et ils ont été mis en congé sans solde pour une période de cinq ans.

Retournement de situation, aujourd’hui, ils sont réintégrés. Deux d’entre eux, Umayr Beeharry, lauréat en 2009, et Punardeep Bungshy, ont accepté de se confier. 

Parcours parfait avant la chute 

Umayr Beharry, 31 ans, vient d’une famille traditionnelle et modeste de Port-Louis. Lauréat en 2009, il intègre Air Mauritius comme pilote en 2016 après avoir été sélectionné comme Cadet pilote en 2015. Il a commencé par piloter l’ATR 72 et en 2019, il devient First Officer à bord de l’Airbus A340. Pendant cinq ans, il a transporté des milliers de passagers de et vers Maurice. 

Umayr Beeharry et le commandant Tegally étaient parmi les 18 pilotes mis en congé sans solde.
Umayr Beeharry et le commandant Tegally étaient parmi les 18 pilotes mis en congé sans solde. 

Toutefois, en août, alors qu’Air Mauritius est sous administration volontaire, il apprend qu’il est licencié. Le pilote se retrouve devant le Redundancy Board, car les avions qu’il pilotait ont été vendus. Après négociations, ses 17 collègues et lui sont mis en congé sans solde à partir du mois de septembre. 

Le lauréat se retrouve, alors, au chômage technique avec des engagements financiers et une famille à soutenir. Umayr Beeharry a, quand même, pris la nouvelle avec philosophie. « Tout d’abord, ce fut un soulagement que nous ayons réussi à éviter le licenciement et à trouver un accord avec les administrateurs. Mais en même temps, c’était très dur pour tout le monde, y compris ma famille, de savoir que nous pourrions ne pas avoir un revenu stable durant les cinq prochaines années », explique Umayr Beeharry. 

Conversion en planteur de légumes 

Ce fut le début de l’angoisse, mais il fallait se réinventer. Umayr Beeharry avait prévu de se lancer dans l’agriculture depuis un certain temps, mais comme passe-temps. « Ce congé forcé m’a fait comprendre qu’il était grand temps de m’y mettre pour nourrir ma famille », confie le trentenaire. Il a commencé à cultiver une parcelle de terrain avec l’aide de sa mère et d’autres membres de sa famille. Après quelques recherches, il a découvert qu’il existe plusieurs programmes offerts par le gouvernement pour les petits planteurs. « J’ai alors décidé de faire une demande d’enregistrement en tant que petit planteur. Maintenant que notre situation s’est améliorée grâce au gouvernement, je vais encore investir mon temps libre dans l’agriculture de manière bénévole pour subvenir aux besoins des nécessiteux », affirme le pilote. Il avait également une formation en ingénierie et s’est lancé dans ce domaine depuis un certain temps en faisant plusieurs travaux pro-bono pour acquérir de l’expérience. 

Beaucoup de gens, même ceux qui ne le connaissent pas, ont tendu la main pour aider sa famille. Pour le jeune pilote, ce qu’on récolte quand on est « humble » et avenant envers tous ceux qu’on rencontre. Umayr Beeharry affirme qu’il a été agréablement surpris quand il a été contacté pour discuter des solutions possibles pour résoudre son problème. 

Entre doute, incertitude et regret 

Umayr Beeharry confie qu’il a eu des doutes, mais qu’en même temps il était redevable envers la compagnie et le gouvernement de lui avoir donné sa chance. Le gouvernement mauricien lui a permis, grâce à sa bourse de lauréat, d’étudier dans une université de classe mondiale. Chose qu’il n’oubliera jamais. « Je sais que je dois servir le pays et pas seulement payer une caution et partir. Je veux contribuer à l’avènement d’une meilleure île Maurice », affirme le pilote.

Cependant, les épreuves qu’il a traversées étaient très difficiles à accepter, mais en tant que pilotes, il dit avoir appris à devenir résilient. Quelles que soient les difficultés que la vie apporte, il faut se battre, estime-t-il. Aujourd’hui, Umayr Beeharry se dit soulagé que le Premier ministre ait pris la décision qui s’imposait. « Ils savent que nous sommes des actifs pour l’entreprise et non des passifs. Je serai toujours reconnaissant pour cela ».

Le soulagement 

Le plus important est que ses collègues et lui sont de retour et très heureux. « Personnellement, je suis plus dévoué que jamais, non seulement pour faire le travail de mes rêves, mais aussi pour aider à nouveau à l’expansion de l’entreprise », confie Umayr Beeharry. Et d’ajouter qu’Air Mauritius a toujours été une grande famille et en tant que membres d’équipage, ses collègues et lui sont fiers de porter l’uniforme. 
« Le PDG du groupe a partagé certains aspects de sa vision avec nous et je pense personnellement que s’ils sont exécutés, notre entreprise s’améliorera considérablement. Nous résisterons même aux turbulences futures », lance le pilote. Il demande à toutes les parties prenantes, y compris ses collègues, de travailler dur.

De plus, il demande aux Mauriciens de se comporter de manière responsable concernant les protocoles sanitaires. Car il est vital pour l’île que les frontières restent ouvertes afin que les milliers de Mauriciens qui dépendent du tourisme recommencent à travailler. 

39 pilotes en moins 

Depuis juin 2020, Air Mauritius a résilié le contrat de 39 pilotes expatriés. Cette année, 18 pilotes allaient rejoindre cette liste, car les avions qu’ils opéraient ont été retirés de la flotte. Cependant, suite à l’intervention du Chief Executive Officer d’Airport Holdings Ltd, Ken Arian, qui a été sollicité par Abdallah Goolamallee, le Premier ministre a rencontré trois pilotes jeudi pour ensuite prendre la décision de réintégrer les 18 pilotes en congé sans solde. 

Punardeep Bungshy retrouve le sourire et le cockpit.
Punardeep Bungshy retrouve le sourire et le cockpit.

Punardeep Bungshy : « Mes craintes se sont envolées »

« Le 2 août, j’ai reçu une lettre m’annonçant que je suis redondante… Ce fut le choc ». Punardeep Bungshy pilotait les Airbus A319 et ces avions ont été retirés de la flotte. Elle s’attendait à un remaniement et non à un licenciement. 

Ensuite, la nouvelle du congé sans solde est tombée. « J’ai été soulagée. Nous étions au bord du gouffre, mais pas au fond », confie Punardeep Bungshy. 

Pendant la période de congé sans solde, Punardeep Bungshy s’est retrouvé dos au mur. Elle aidait financièrement sa famille et elle avait des emprunts à rembourser. C’était le moment pour Punardeep Bungshy de se tourner vers d’autres secteurs, car elle ne remplissait pas les critères des compagnies d’aviation qui recrutaient. Elle affirme qu’elle s’est tournée vers l’entreprise de son père pour l’aider en tant que consultante. « J’étais prête à faire n’importe quel travail pour gagner ma vie », affirme Punardeep Bungshy. 

Aujourd’hui, elle est certaine que la compagnie d’aviation nationale se relèvera.  Punardeep Bungshy reste positive et affirme qu’elle travaillera dur aux côtés de ses collèges pour qu’Air Mauritius reprenne son envol. « Je n’ai aucune crainte, car nous sommes entre de bonnes mains », conclut la jeune femme. 

Punardeep Bungshy retrouve le sourire et le cockpit.

 

 

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