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2020 : une grande révolution au niveau des relations industrielles

Reeaz Chuttoo, Désiré Guildharry et Clency Bibi. Reeaz Chuttoo, Désiré Guildharry et Clency Bibi.

Trois gros sujets domineront le monde du travail en 2020. Ils sont le Portable Retirement Gratuity Fund, le nouveau barème du salaire minimum et les autres changements dans le monde du travail suite à la promulgation du Workers Right Act en octobre dernier. 

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Le salaire minimum

Introduit en janvier 2018, le salaire minimum a été une révolution dans l’histoire salariale à Maurice. Pour la première fois, des travailleurs ont vu leurs salaires passer de Rs 1 500 à Rs 9 000 par mois. Au début, dans certains quartiers, on craignait un impact négatif sur les emplois, mais tel n’a pas été le cas. Une année après son introduction, soit le 31 janvier 2019, le National Wage Consultative Council (NWCC), dans son rapport sur l’impact de l’introduction du salaire minimum national, note que le nombre d’emplois a augmenté en 2018 par rapport à 2017. De plus, il y a eu une migration des travailleurs du secteur informel au secteur formel et une baisse constante du nombre d’employés dans le secteur primaire passant de 21 300 à 20 900 en 2017 et 15 400 en 2018.

Fort de ce premier succès, le NWCC a revu à la hausse le barème du salaire minimal qui passera à Rs 10 200 par mois (soit le salaire de base de Rs 9 700 couplées des Rs 500 de l’allocation gouvernementale). Cependant, pour les syndicats, le combat ne s’arrête pas là. Ils parlent maintenant de l’introduction d’un salaire national décent qui répondra parfaitement aux aspirations du gouvernement pour un pays à haut revenus. 

...le barème du salaire minimal qui passera à Rs 10 200 par mois...»

Si Reeaz Chuttoo, secrétaire de la Confédération des Travailleurs du Secteur Privé et Public (CTSP), reconnaît que le salaire minimum a amélioré la vie des plus démunis de la société, il n’en demeure pas moins, dit-il, qu’il existe toujours un grand écart entre les riches et les pauvres (Gini coefficient). Pour étayer ses dires, il cite le dernier rapport de la Banque Mondiale. « Il y a toujours une mauvaise distribution de la richesse et si le salaire minimum représente une garantie de sécurité alimentaire, il faut maintenant lutter pour un salaire décent afin que les travailleurs puissent mener une vie décente. Tout travailleur doit avoir les moyens d’assurer non seulement la nourriture pour sa famille, mais aussi les loisirs tout en pouvant faire des économies. »

Du côté du patronat et surtout des entreprises, c’est l’inquiétude. « Sans un soutien du gouvernement, ce sera difficile pour nous de tenir longtemps et notamment dans un contexte économique difficile. Certes, nos employés bénéficieront d’une vie meilleure, mais qui va nous aider, nous, les petits entrepreneurs ? » demande Patrick Fleury qui gère un magasin d’artisanat au Caudan Waterfront.

Salaire minimum universel

La CTSP s’est jointe à une plateforme d’activistes au niveau international pour militer en faveur de l’introduction d’un salaire minimum universel pour empêcher que des entreprises se délocalisent dans des pays à bas niveau salarial. Cette plateforme mène campagne auprès du Bureau international du Travail (BIT) et autres organisations internationales en faveur d’un salaire minimum universel représentant 65 % du salaire médian de chaque pays concerné. 

Portable Retirement Gratuity Fund

L’année 2020 sera aussi marquée par l’introduction du Portable Retirement Gratuity Fund. Pour Reeaz Chuttoo, c’est une date qui sera gravée d’une pierre blanche dans les annales des relations industrielles à Maurice. « Désormais, les travailleurs du secteur privé n’auront plus peur de la mobilité. Ils pourront changer d’employeurs autant qu’ils pourront sans perdre leurs années de service. » Toutefois, il regrette qu’à ce jour l’on n’est pas encore arrivé à un compromis sur le pourcentage de contribution patronale à ce fonds qui devrait entrer en vigueur en janvier prochain. 

« Selon toutes les indications, la contribution pourrait tourner autour de 4,5 %. Au niveau du patronat, on reconnaît la justesse d’un fonds pour sécuriser les années de service des salariés, mais on souhaite aussi que la contribution ne pèse pas lourd sur les entreprises. » Le dirigeant de la CTSP lance aussi un appel au gouvernement pour la mise en place d’une structure afin de s’assurer que les entreprises contribuent à ce fonds.

Une relance de la zone franche

Pour Désiré Guildharry, président de la Free Democratic Unions Federation (FDUF), avec le salaire minimum de Rs 10 200 par mois et le Portable Retirement Gratuity Fund, toutes les conditions sont réunies pour une relance de la zone franche.  Toutefois, il souhaite que l’on revoie en profondeur les conditions de service dans ce secteur pour les rendre plus attrayantes.

Clency Bibi, président de la General Workers Federation (GWF), estime que le fait que le temps de service est assuré dans le secteur privé, encouragera davantage les employés à hausser leurs compétences et trouver des meilleures conditions de service dans d’autres compagnies tout en préservant leurs années de service. « Au début, nous étions contre certaines clauses, mais après des discussions au niveau du ministère du Travail, des amendements ont été apportés et nous sommes amplement satisfaits de la nouvelle formule du Portable Retirement Gratuity Fund. »

D’autres changements à venir dans le monde du travail

1. La mise sur pied d’un National Tripartite Council. C’est une plateforme pour des discussions permanentes entre les représentants du gouvernement, du patronat et des syndicats. Contrairement au Labour Advisory Board, où l’on discute des législations du travail, ce sera un conseil élargi où tous les sujets touchant les relations industrielles pourront être abordés, explique le syndicaliste Reeaz Chuttoo. Il y aura des minutes of proceedings et des suivis sur des dossiers. 

2. Sous le Workers Rights Act, une fédération syndicale ne pourra s’affilier qu’avec une seule confédération syndicale et un syndicat qu’avec une seule fédération. Reeaz Chuttoo accueille favorablement cette décision, car cela mettra fin au double and triple memberships dans le monde syndicat.

3. Les employeurs ne pourront plus licencier sans aucune justification avec la mise sur pied d’un Redundancy Board. Une décision que salue Clency Bibi, président de la GWF.

4. Tout employé, qui doit se rendre en cour, doit obligatoirement bénéficier d’une permission de son employeur, se réjouit Reeaz Chuttoo.

5. Un syndicat ne doit plus désormais attendre un ordre de la cour pour pouvoir entrer dans une entreprise. Reeaz Chuttoo explique qu’il suffit que des employés se joignent à un syndicat pour que ce dernier bénéficie d’un Representational Status.

 

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