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2019 vue par les professionnels

Que doit-on s'attendre 2019 ? Des professionnels en parlent.

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Nilen Vencadasmy : «Les yeux seront braqués sur le verdict des Law Lords»

L’avocat et politicien Nilen Vencadasmy estime que l’année 2019 sera marquée, sur le plan politique, par le procès de Pravind Jugnauth devant le Privy Council. « L’issue de cette affaire va déterminer beaucoup de choses en ce qu’il s’agit du calendrier politique », explique-t-il, « les yeux seront braqués sur le verdict des Law Lords, probablement rendu en mars ou avril 2019. Si Pravind Jugnauth perd, ce sera un séisme politique. »
Si le Premier ministre l’emporte, Nilen Vencadasmy estime que cela pourrait accélérer l’échéance électorale. « Il voudra surfer sur sa victoire et il est fort probable que Paul Bérenger attende ce résultat pour finaliser un accord avec le MSM », explique-t-il. 

Toutefois, l’avocat estime qu’il ne faut pas prévoir d’élections générales avant décembre 2019. « Dès que le cas devant le Privy Council sera du passé, nous serons en campagne. Ce sera intéressant à plus d’un titre, car les partis traditionnels ne vont pas y aller seuls », assure l’avocat, malgré les affirmations des uns et des autres. Avec un système électoral comme le nôtre, cela relève de l’impossible, selon lui. Ce sera forcément une joute entre Pravind Jugnauth et Navin Ramgoolam et, bien qu’il semble que le MMM soit plus à même de s’allier au MSM et le PMSD au Parti Travailliste, rien n’est définitif en la matière. 

En 2014, grâce aux jeux des alliances, de nouveaux mouvements et des partis ont émergé. « Ce sera encore le cas cette fois », assure Nilen Vencadasmy. « Il y a des camarades qui travaillent dans l’ombre pour l’émergence d’un front commun de ces partis. Ce sera intéressant de voir si la mayonnaise va prendre. » Plusieurs ont échoué à la tâche dans le passé, notamment à cause des égos et de l’impossibilité d’atteindre un compromis. 

Reste à savoir si les gens feront confiance aux nouveaux partis. « C’est là où le bât blesse », explique l’avocat. « Les gens ne sont pas prêts à faire confiance à des nouveaux venus et c’est normal. » Il estime qu’il faudra une mouvance sociale, qui fera naître une mouvance politique, pour donner enfin un parti politique. Il n’y a pas de mouvance sociale de ce type dans le contexte actuel. C’est toute la difficulté pour ces forces émergentes. « Dans le passé, on a fait l’erreur de croire qu’on crée un parti politique en réunissant 60 personnes », fait-il remarquer. 

Et la réforme électorale dans tout cela ? « Le gouvernement devra venir dire ce qu’il va faire », explique Nilen Vencadasmy. « Présentera-t-il un mini-amendement, comme la dernière fois ? Si Pravind Jugnauth a un peu de bon sens, il apportera des amendements dans le sens proposé par le MMM et le projet de loi passera. Sinon, il n’y a que le mini-amendement comme option. »

L’ex-inspecteur de police Ranjit Jokhoo : «Moins de policiers impliqués dans des délits»

L’inspecteur de police à la retraite Ranjit Jokhoo s’attend à ce qu’il y ait moins de policiers impliqués dans des délits, que le gouvernement éclaircisse les zones d’ombre entourant le projet Safe City et que des sanctions soient prises contre les pyromanes qui veulent créer des problèmes parmi les différentes composantes de la société.

« Les autorités réceptionnent trop de plaintes contre les policiers ces dernières années. C’est un mal qui doit être traité à la racine. Auparavant, les policiers étaient mis à la porte en cas d’indiscipline. Dans le fond, un officier de police doit inspirer confiance et susciter le respect à travers son uniforme et non être impliqué dans des infractions comme la consommation de drogue synthétique. La tournure des choses est chagrinante. Tout se dégrade et rien n’est fait pour corriger ces maux », se désole l’ex-inspecteur Jokhoo.

Notre interlocuteur s’interroge également sur le rôle de Mauritius Telecom dans le monitoring du projet Safe City. « La police, le commissaire de police et le ministère de l’Intérieur sont les seuls garants du Law and Order dans le pays. Pourquoi Mauritius Telecom doit-il être chargé du projet Safe City et non la force policière ? Des études ont-elles été faites lors de l’installation de ces équipements ? Le pays, pourtant, compte des policiers en uniforme et en civil qui peuvent faire régner l’ordre et la paix sociale », dit-il.

« Les pyromanes n’ont pas de place dans notre pays. Ils veulent créer de l’instabilité parmi les différentes composantes de la société. Nous sommes unis et solidaires. Je lance un appel au bon sens des Mauriciens. Nous avons plus de points en commun que de différences, qui sont, elles, superficielles. Maurice est un pays où il fait bon vivre. D’où le fait qu’on doit se focaliser sur nos similitudes », a conclu l’ex-haut gradé.

Rajen Bablee, Executive Director Transparency Mauritius : «Des propositions sur le financement des partis politiques»

Selon Rajen Bablee, l’année 2019 sera une année charnière à plusieurs points de vue : sur le plan politique, social, économique et aussi sur le plan international. 

D’abord, la politique. En janvier, la population sera en attente de la décision du comité judiciaire du Conseil privé concernant l’appel interjeté par le Directeur des poursuites publiques dans l’affaire MedPoint. En fait, le judiciaire et l’Independent Commission against Corruption seront aussi suspendus à cette décision qui donnera, soit une nouvelle interprétation sur le conflit d’intérêt, soit confirmera le jugement de la Cour suprême. Le paysage politique et le timing des élections se préciseront aussi par rapport à la décision des Law Lords. 

Qui dit élection, dit démocratie et sur ce plan, il ne fait aucun doute que l’île Maurice est un modèle dynamique de démocratie, souligne Rajen Bablee. Pour lui, il nous reste encore du chemin à faire pour atteindre la perfection sur ce plan, mais si le gouvernement, pour respecter son programme, propose des législations cadres sur le Freedom of Information, sur le financement des partis politiques et des politiciens, et s’attaque au népotisme souvent lié aux pouvoirs discrétionnaires des ministres, il ne fait aucun doute que la bonne gouvernance trouvera son sens profond et réel. « Le gouvernement a été maladroit en ce qu’il s’agit de l’amendement à l’Information and Communication Technologies Act »,  regrette Rajen Bablee. Il estime qu’il est sans doute vrai que certains internautes pensent qu’ils ont un blanc-seing total pour dire ce qu’ils veulent et ceci, sans se soucier du droit des autres. Selon lui, le gouvernement aurait pu insister pour faire respecter les lois existantes, plutôt que de trouver refuge dans le mot annoyance.

Transparency Mauritius compte faire ses propositions au gouvernement, en début d’année, sur le financement des partis politiques. Un des aspects sera d’aller vers la transparence en ce qu’il s’agit des donateurs et que les comptes soient rendus publics. En cette fin d’année, le gouvernement vient d’implémenter une nouvelle loi sur la déclaration du patrimoine pour les parlementaires et hauts fonctionnaires. Ce sera un pas en avant que les membres de l’exécutif des partis politiques soient aussi tenus de déclarer leur patrimoine, affirme Rajen Bablee. 

« Pour combattre la corruption et l’enrichissement illicite, il s’agit aussi d’avoir des institutions compétentes et indépendantes. Il faudra revoir le mode de nomination à la tête des institutions et des organismes parapublics. Le modèle que le gouvernement avait proposé en ce qui concerne le combat contre ces deux fléaux était intéressant et pourrait amener une synergie et une démarche holistique à travers la Financial Crime Commission », dit-il.

Toutefois, il souligne qu’il est dommage que le gouvernement ait attendu aussi longtemps pour présenter ces nouvelles lois et projets de loi. 

Alain Jeannot, de l’association Prat : «Moins de morts sur nos routes en 2019»

Alain Jeannot

Le président de l’association Prévention routière avant tout (Prat), Alain Jeannot, s’attend à ce que les automobilistes soient plus courtois, vigilants et patients. Il souhaite que ceux-ci adoptent une attitude plus respectueuse envers les autres utilisateurs de la route en 2019. Alain Jeannot espère également que les gens comprendront que l’excès de vitesse est un gros danger.

« Je m’attends à ce que la tendance à la baisse, en ce qui concerne les accidents de la route, s’accentue pour l’année prochaine. Je serai aussi ravi s’il arrive que les gens coopèrent en matière de covoiturage », avance Alain Jeannot. Il lance ensuite aux motocyclistes un appel à la prudence, « étant donné qu’ils sont les plus vulnérables sur la route ».

« L’année change et chacun doit prendre ses résolutions. Les six premiers mois de 2018 ont fait 88 victimes, dont 40 jeunes. Ceux-ci sont à la fois en danger et vulnérables. Par ailleurs, il faut que leurs parents puissent les sensibiliser à l’importance de la sécurité routière et de la conduite défensive. Je trouve qu’il y a un manque de mise en garde et d’avertissements en ce sens », précise notre interlocuteur.

Alain Jeannot demande ensuite aux usagers de la route et aux piétons de porter des vêtements en fonction de la visibilité, afin d’éviter des accidents. « Si ces consignes sont respectées, on doit pouvoir traverser l’année prochaine dans de meilleures conditions », ajoute Alain Jeannot. 

Dr Vasant Jogoo, expert en environnement et urbaniste : «Toujours des développements sans planification»

2019 sera une année décisive pour le pays, tant sur le plan politique qu’infrastructurel. Le Dr Vasant Jogoo, spécialiste en environnement et urbaniste, estime que les développements dans le pays changeront notre paysage et bouleverseront nos habitudes. Cependant, il s’inquiète surtout du manque de planification autour des projets.

« Maurice connaîtra un développement sans précédent, avec la venue du métro léger. Ce qui sera certainement un avancement », souligne l’expert, qui déplore toutefois les mauvaises décisions prises, comme la surpression de l’Environment Impact Assessment (EIA) pour certains projets, dont le métro. 

Le Dr Jogoo affirme que la prochaine année sera toujours marquée par l’absence de planification autour de l’exécution des projets. Il ne fait aucun doute, selon lui, que de tels manquements causeront davantage de « cacophonies », comme celles qu’on a connues depuis le début des travaux du métro léger. 

« Le gouvernement ne planifie pas et l’harmonisation des projets en pâtit. On procède de manière décousue, pour ensuite faire du raccommodage. Ce n’est pas digne... », dit-il.

Concernant les résultats attendus avec le métro léger, il souligne que le vrai test sera de voir si le nombre de véhicules sur nos routes aura diminué et si les rames de métro circuleront de façon harmonieuse avec les autres véhicules. Il se pose des questions également sur l’impact des morcellements sur l’urbanisation, sur l’environnement et sur la circulation dans certaines régions, dont les villages côtiers. Concernant la congestion routière, il estime que, même avec la construction de nouvelles routes et d’autres infrastructures, on ne doit pas s’attendre à des résultats probants. « On aura tout simplement déplacé le problème d’un endroit à un autre », estime-t-il.

 

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