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Thierry Merven : «Nos eucalyptus peuvent alimenter Maurice en énergie»

Le groupe Beau Vallon mise sur la biomasse pour contribuer à la transition énergétique à Maurice. Avec 180 hectares d’eucalyptus, le groupe prévoit de produire des copeaux de bois pour les centrales thermiques, dès que le cadre législatif et les conditions tarifaires le permettront. 

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Vous évoluez au sein du groupe Beau Vallon depuis 20 ans. Comment décririez-vous l’évolution du groupe ?
Cela fait effectivement une vingtaine d’années que je suis dans le groupe. La canne était l’activité historique et fondatrice du groupe, mais nous avons progressivement développé quatre piliers : l’agriculture, l’hôtellerie et l’immobilier, ainsi que les loisirs. Aujourd’hui, la part du sucre dans nos revenus est passée de plus de 95 % à seulement 25 %. Cela montre à quel point la diversification était cruciale pour le développement du groupe.

Quels sont les nouveaux projets agricoles du groupe ?
Nous avons un programme de reconquête de terres à canne, plus de 150 hectares, dont la moitié a déjà été réalisée l’année dernière. Cette reconquête s’inscrit dans un contexte de remontée des prix du sucre et contribue à l’effort national. Pour cette année, nous prévoyons de récolter environ 125 000 tonnes de canne et, à terme, nous espérons atteindre 140 000 tonnes envoyées à l’usine Omnicane.

Vous parlez d’agriculture diversifiée. Pouvez-vous détailler cette diversification ?
En dehors de la canne, nous avons développé les fruits et légumes, ainsi que l’élevage de cerfs. Nous sommes actuellement les plus gros producteurs de pommes de terre de l’île et nous produisons également de l’oignon. Nous avons remis en état plusieurs vergers et créé de nouveaux vergers (mangue, papaye, grenadine, letchis, pitaya, macadamia, banane, entre autres). Nous gérons également deux réserves de chasse, avec 250 à 300 têtes mises sur le marché chaque année.

Le groupe a adopté un système intégré entre l’agriculture et l’hôtellerie. Pouvez-vous expliquer ce principe ?
Effectivement, nous essayons de créer une synergie. La production agricole de nos champs est utilisée dans nos hôtels pour appliquer le concept du « champ à l’assiette ». Nous avons trois hôtels : le Preskil, le Solana Beach à Belle-Mare et le petit boutique-hôtel Astroea Beach. Cela nous permet de proposer des produits frais, locaux et issus de l’agriculture raisonnée, limitant pesticides et produits chimiques, pour une expérience plus saine à nos clients et touristes. 

Nous valorisons les produits locaux issus de nos propres cultures. Nos hôtels proposent des plats mauriciens préparés à partir de produits de nos champs, offrant une expérience gustative authentique et durable. Nous avons travaillé sur l’ensemble de la carte culinaire, en intégrant la saisonnalité et la fraîcheur des produits, pour faire de la gastronomie un véritable point fort de nos hôtels.

Le secteur hôtelier est un axe stratégique du groupe. Quels sont vos principaux projets dans ce domaine ?
Notre projet phare est la rénovation du Solana Beach, qui compte 117 chambres. La rénovation va moderniser la décoration, repenser l’identité de l’hôtel, et améliorer l’expérience culinaire. Nous appliquons également cette réflexion à nos autres hôtels, comme le Preskil et l’Astroea Beach, pour offrir une identité forte et cohérente à notre groupe hôtelier.

Nous sommes actuellement les plus gros producteurs de pommes de terre de l’île et nous produisons également de l’oignon.»

Quels changements avez-vous observés dans le secteur hôtelier durant ces dernières années ?
Depuis la COVID, la période creuse a presque disparu grâce au « revenge travel », les voyageurs cherchant à profiter pleinement de leurs vacances. Les réservations se font désormais plus souvent directement ou via des OTA (agences de voyages en ligne) comme Booking.com ou Agoda. Les clients réservent de plus en plus à la dernière minute, ce qui réduit notre visibilité sur l’occupation à long terme et oblige les équipes à être très réactives. 

Notre stratégie est toujours orientée client. Nous observons les nouvelles tendances, comme la réservation directe ou l’importance de l’expérience locale et durable. Nous ajustons nos offres pour répondre aux attentes, mais aussi pour anticiper les changements de comportement et les fluctuations saisonnières, et garder notre identité forte et cohérente à travers tous nos hôtels.

Quelles sont les principales difficultés pour maintenir l’attractivité de Maurice comme destination touristique ?
Il faut être attentif à plusieurs facteurs : l’évolution de l’origine de nos clients, notamment Français et Britanniques, l’érosion des plages, le blanchiment des coraux, la concurrence avec d’autres destinations moins chères, et les coûts aériens qui ont beaucoup augmenté. Nous devons constamment nous réinventer pour rester attractifs, en adaptant nos offres, nos infrastructures et nos services.

Comment le groupe prend-il en compte l’environnement dans ses projets ?
L’environnement est un axe majeur pour nous. Nous intégrons des paramètres environnementaux dans la gestion de nos hôtels et de nos propriétés, que ce soit dans la consommation d’énergie, l’aménagement du littoral ou les interactions avec les communautés locales. Nous travaillons également sur des solutions pour limiter l’érosion des plages, préserver les coraux et maintenir l’attractivité de nos lagons, qui sont des atouts naturels essentiels pour nos hôtels.

Comment le projet de biomasse à base d’eucalyptus s’intègre-t-il dans votre stratégie énergétique ?
Avec 180 hectares plantés, nous possédons aujourd’hui la plus grande exploitation d’eucalyptus de l’île. Ces forêts, véritables puits de carbone, sont destinées à la production de biomasse, source d’énergie renouvelable pour la production d’électricité dans les centrales thermiques et les chaudières de l’île. 

Dès que le cadre législatif sera révisé, ce que nous espérons dans un avenir proche et que le prix sera suffisamment attractif pour rendre le projet viable, nous pourrons transformer nos eucalyptus en copeaux de bois (woodchips) destinés aux centrales thermiques. Ce projet constitue une alternative importante à la production électrique actuelle, assurée par les centrales gouvernementales du Central Electricity Board et les IPP, qui pourraient eux aussi utiliser ces woodchips si les conditions légales et tarifaires évoluent favorablement. 

C’est une alternative importante à la production énergétique classique et un moyen de valoriser nos terres agricoles, contribuant ainsi à la transition énergétique du pays.

Quels sont vos projets futurs pour le groupe pour continuer la dynamique de croissance ? 
Notre philosophie repose sur la diversification et la durabilité. Nous avons conservé nos racines dans l’agriculture, tout en développant l’hôtellerie, l’immobilier et les loisirs. Nous cherchons à intégrer nos activités pour créer une synergie, valoriser nos produits locaux, respecter l’environnement, et offrir une expérience unique à nos clients. 

La vision du groupe est de rester innovant, responsable et adaptable face aux défis économiques, climatiques et touristiques. Nous continuerons à reconquérir des terres agricoles, à développer la production de fruits et légumes, à moderniser nos hôtels, et à renforcer nos initiatives durables. 

Nous sommes également attentifs à la législation énergétique et à l’évolution des prix pour exploiter au mieux nos plantations d’eucalyptus. L’objectif est de maintenir un équilibre entre tradition et innovation, tout en contribuant au développement économique et environnemental de Maurice.

 

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