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Sur le plan socio-économique : ces dangers qui nous guettent en 2023

L’économie mondiale est proche d’une récession.
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2023 s’annonce plus difficile que 2022, à en croire bon nombre d’observateurs. Entre la menace d’une récession mondiale, une inflation qui ne montre pas de signes de repli, la situation au niveau de l’endettement ou encore les aléas du changement climatique, Maurice est dans une situation de vulnérabilité. 

Une éventuelle récession mondiale redoutée

Le risque de récession est bien réel cette année, alerte la Banque mondiale dans son rapport annuel sur les perspectives économiques mondiales. « L’économie mondiale est dangereusement proche de la récession », prévient, en effet, l’institution financière internationale. Elle a, d’ailleurs, réduit de près de moitié ses prévisions de croissance mondiale pour 2023 qui passe ainsi de 3 % à 1,7 %. Raison évoquée : les taux d’inflation ont « accéléré la prise de décisions politiques », ce qui aurait entraîné une détérioration des conditions financières alors que parallèlement, les « ondes de choc économiques » et la crise énergétique se poursuivent avec la guerre qui perdure en Ukraine. 

À Maurice, les observateurs économiques suivent de près la situation. « S’il y a une récession, il faudra s’attendre à ce que le pays soit impacté », avance Tahir Wahab, expert-comptable et observateur économique. 

Quant à l’économiste Georges Chung, il avance que la récession, si elle a lieu, sera très légère. « S’il y a une petite récession dans les pays développés, l’impact sera très minime pour le reste du monde. D’autant plus que la croissance de la Chine, qui a rouvert ses frontières, devrait s’accélérer. Ce qui aura un impact positif sur l’économie mondiale. Maurice ne sera pas grandement affecté, compte tenu du fait que la reprise est assez diversifiée », soutient l’économiste.

L’inflation devrait persister 

La dernière fois que le pays a connu une inflation à double chiffre, cela remonte à 1993. L’inflation était alors de 10,5 %. Vingt-neuf ans plus tard, Maurice enregistre une forte poussée inflationniste avec un taux de 10,8 %. En effet, 2022 a été marquée par une cascade d’augmentations de prix. La tendance semble se poursuivre en ce début d’année avec les prix du riz et d’autres denrées alimentaires qui vont augmenter prochainement sans compter la hausse des tarifs d’électricité en février. « Le pouvoir d’achat du Mauricien restera sous pression. Les prix ont tendance à augmenter, mais quand il s’agit de baisser les prix, d’autres facteurs ont tendance à être évoqués.  L’inflation va durer. Elle baissera par la suite, mais cela prendra du temps », avance Tahir Wahab. 

Le Dr Avinaash Munohur, observateur et directeur associé d’Arthésias Ltée, est du même avis. « L’inflation restera un défi cette année encore. D’autant plus qu’elle a un impact direct sur la valeur de la roupie. Ce qui rend le coût de la vie plus cher à Maurice. Le plus grand défi du gouvernement et de la Banque de Maurice sera de pouvoir stabiliser la roupie. Nous sommes tellement dépendants des importations qu’avec une roupie faible, tout devient encore plus cher », soutient-il. Sans la stabilisation de la roupie, poursuit-il, le pouvoir d’achat sera toujours en berne. « Dans une situation inflationniste que l’on ne contrôle pas, plus on augmentera les salaires, plus l’inflation grimpera. C’est un cercle vicieux ! », ajoute le Dr Avinaash Munohur.

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L’inflation se chiffrait à 10,8 % en 2022.

 

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Les ménages, endettés à hauteur de Rs 144,36 milliards, auront des difficultés à rembourser  leurs dettes.

Service de la dette : à surveiller ! 

Rs 378,66 milliards.* 

C’est le montant total que les opérateurs économiques et les particuliers doivent aux banques. Rien pour les ménages, le niveau d’endettement est de l’ordre de Rs 144,36 milliards. Avec cinq hausses consécutives du taux Repo en 2022 – celui-ci est passé de 2 % à 4,5 % –, le service de la dette pèse plus lourd sur le budget des ménages et des entreprises. « La capacité de remboursement des ménages devient plus difficile avec la baisse du pouvoir d’achat. Quant à la compensation, elle n’est pas suffisante », souligne Tahir Wahab. 
Pour ce qui est des entreprises, l’observateur économique souligne que les affaires reprennent. « Les entreprises ont besoin de financement pour redémarrer leurs activités et réorienter leurs affaires. Mais, elles devront faire face à une pression de la part des employés pour augmenter les salaires. Ce sera un double défi pour les compagnies », soutient Tahir Wahab. 
*Si l’on ajoute l’endettement des compagnies évoluant dans le global business, nous arrivons à un montant totalisant Rs 443,52 milliards.

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Maurice devra s’adapter à la sécheresse, mais aussi à des inondations. 

Savoir jongler avec les aléas du changement climatique 

La situation d’eau due à une sécheresse prolongée est source d’inquiétude ces jours-ci. « Il ne faut pas se leurrer, la sécheresse est une des conséquences directes du changement climatique. L’eau potable se raréfie. Ajouté à cela, il y a le problème interne de la gestion de la CWA et du captage d’eau. J’espère que le problème d’eau auquel nous faisons face actuellement permettra aux autorités d’ouvrir les yeux sur le recul de la pluviométrie, mais aussi sur le phénomène de flash flood », avance Avinaash Munohur.  

Pour Tahir Wahab, le changement climatique reste toujours un défi. « Il faudra s’adapter et se préparer à affronter les conséquences du changement climatique qui implique la sècheresse et les inondations. Il faut également améliorer nos infrastructures en vue de mieux capter de l’eau », recommande-t-il. 

Quant à Avinaash Munohur, il est d’avis qu’il faut agir à trois niveaux : le captage, la gestion et la distribution d’eau. De son côté, Georges Chung estime qu’il faudra attendre les prochaines semaines pour voir s’il va pleuvoir. « S’il y a un retour de la pluie, les conditions seront favorables à l’agriculture », soutient-il.

Des tensions sociales pas à écarter 

Kristalina
La cheffe du FMI, Kristalina Georgieva, met en garde contre des tensions sociales à travers le monde.

La patronne du Fonds monétaire international redoute que 2023 pourrait être une année marquée par des tensions sociales au niveau mondial. « Nous ne sommes que le 12 janvier et avons déjà « des illustrations » au Brésil, au Pérou, en Bolivie, en Colombie, au Royaume-Uni, toutes pour des raisons différentes mais avec des tensions sociales très nettes », s’est inquiétée Kristalina Georgieva. 

Doit-on redouter un tel scénario à Maurice ? « Les tensions sociales découlent d’une situation économique compliquée. Quand une économie ne va pas bien, la société aussi est malade. Les prévisions mondiales ne sont pas forcément optimistes même s’il y a une reprise cette année. Maurice dépendra de l’économie mondiale. Si le tourisme, l’immobilier et le secteur financier font bien, il n’y a pas de ‘ripple effect’ notamment pour la classe ouvrière. La situation reste compliquée avec le problème d’eau, la prochaine hausse des tarifs d’électricité, qui sont des fondamentaux pour le bien-être d’une société. Le gouvernement doit aborder cette question le plus rapidement possible, car on peut se retrouver dans une situation de débordement social », explique Avinaash Munohur. 

Pour Tahir Wahab, les tensions sociales restent d’actualité. Les ménages, poursuit-il, souffrent avec la baisse du pouvoir d’achat et la situation risque de s’aggraver s’il y a une récession. « De même, le taux de chômage est un facteur qui peut aussi mener à des tensions sociales. Il faudra encourager les entreprises en termes de facilitation des affaires, afin qu’elles puissent grandir et créer des emplois. Parallèlement, il faudra encourager les gens à travailler », recommande l’observateur économique. 

De son côté, Georges Chung indique que les tensions sociales ont existé et continueront d’exister tant que la condition humaine reste comme elle est actuellement. « Avec l’amélioration des conditions sur le plan économique, les tensions actuelles sont, cependant, moins graves que celles du siècle dernier. Avec l’amélioration économique, le social s’est aussi amélioré », conclut-il.

À suivre !

Le maintien des prix de l’essence et du diesel a suscité l’indignation. Au sein de la société civile, on prévoit des actions de contestation. À titre d’exemple, Nishal Joyram, qui avait fait une grève de la faim de 22 jours pour que les prix des carburants baissent, a lancé un appel pour une désobéissance civile.

Finances publiques : entre pression et marge de manœuvre

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Les finances publiques restent un défi pour cette année.

Pour soulager les ménages et les entreprises en période de pandémie, le gouvernement s’est lourdement endetté. Aujourd’hui, la dette publique se chiffre à Rs 460,5 milliards, soit à hauteur de 85,2 % du produit intérieur brut. « C’est une des conséquences de la pandémie. Cela dit, l’endettement n’est pas un problème en soi. C’est le service de la dette qui est fondamental », avance le Dr Avinaash Munohur. 

Du coup, les finances publiques restent donc un défi pour cette année. « Ce sera le cas tant que la production de biens et services et la création de richesse ne sont pas assez rapides par rapport aux exigences de la population », avance Georges Chung. Or, ajoute le Dr Avinaash Munohur, la productivité est en baisse depuis plusieurs décennies. « Il faudra relancer la productivité. Ce qui implique la mise en place de mesures économiques. Ce ne sont pas des décisions qui donneront des fruits du jour au lendemain, mais il faut bien commencer quelque part », recommande-t-il. 

De son côté, Tahir Wahab est d’avis que le gouvernement a toujours une marge de manœuvre pour soutenir la population face aux augmentations de prix. « Le gouvernement amasse pas mal de sous sur les produits pétroliers y compris à travers la TVA, d’autant plus que les prix ont sensiblement augmenté depuis la pandémie », ajoute-t-il.

Bon à savoir

  • Environ 90 % des ménages à Maurice sont conscients du changement climatique, et une grande majorité le perçoit comme une menace, notamment pour la sécurité alimentaire et la sécurité hydrique, selon une étude du Fonds monétaire international (FMI). 
  • Maurice aura besoin de 6,5 milliards de dollars pour atteindre les objectifs climatiques fixés jusqu’à 2030. Il s’agit notamment d’adopter des mesures d’atténuation et d’adaptation.
  • Le pays fait face en moyenne à quatre événements indésirables - principalement des cyclones tropicaux - tous les 10 ans.=
  • Sur la période 1960-2022, Maurice a connu 22 événements météorologiques extrêmes, chacun causant des dommages socio-économiques d’un coût moyen de 160 millions-245 millions de dollars (soit 1,5 % - 2,3 % du produit intérieur brut – PIB - du pays en 2021/22). « S’ils ne sont pas pris en compte, les chocs climatiques risquent de perturber la quête de résilience sociale et économique de Maurice », prévient le Fonds monétaire international.
 

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