
Prolonger la pension, élargir les critères, changer les méthodes : la réforme annoncée interpelle ONG et experts qui rappellent qu’au-delà du montant, l’inclusion, l’accompagnement et la reconnaissance des handicaps invisibles restent des défis essentiels à relever.
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La réforme du système de la pension d’invalidité, présentée par le ministre de la Sécurité sociale Ashok Subron, le mardi 8 juillet, à l’Assemblée nationale, a suscité des réactions contrastées au sein des organisations œuvrant pour les droits des personnes en situation de handicap. Si les grandes lignes sont accueillies positivement, les ONG appellent à plus de rigueur, de concertation et d’inclusion.
Pour la Sunflower Charitable Foundation, qui milite notamment pour la reconnaissance des handicaps non visibles, la réforme doit s’accompagner d’un changement de méthode dans l’évaluation du handicap. Une responsable souligne : « Il est important que le ministère consulte avec toutes les disciplines concernées par la personne en situation de handicap. Il faut définir des critères plus concrets, 60 % de handicap n’est pas un critère approprié. Il faut aussi mettre l’accent sur les handicaps qui ne sont pas visibles comme les conditions neurodéveloppementales. » L’ONG met en garde contre une approche trop rigide qui risquerait de continuer à exclure certaines personnes dont les difficultés ne sont pas immédiatement perceptibles.
Jean-Marie Malépa, de la Foundation Georges Charles, voit dans cette réforme une avancée sociale importante. « Les jeunes adultes vivant avec une déficience intellectuelle rencontrent souvent d'importantes difficultés d’accès au monde du travail. Prolonger la pension jusqu’à 65 ans leur garantit une forme de stabilité financière et de dignité à long terme. » Il salue également l’intention du gouvernement d’adopter une approche fonctionnelle pour évaluer le handicap, mais attire l’attention sur la nécessité d’inclure des critères adaptés aux réalités des déficiences intellectuelles.
Selon lui, ces situations « ne peuvent être évaluées uniquement à travers un prisme médical ; il faut une approche holistique, humaine et contextualisée. » Il recommande par ailleurs l’instauration d’un dialogue régulier avec les ONG, ainsi qu’un investissement accru dans l’accompagnement à la vie autonome et les programmes d’insertion protégée.
Nécessaire et attendue
Jean François Favory, responsable du programme handicap chez DIS-MOI (Droits Humains Océan Indien), souligne que cette réforme était « nécessaire et attendue de longue date ». Toutefois, il insiste sur le fait que sa réussite dépendra de sa mise en œuvre effective et inclusive. DIS-MOI appelle à supprimer le terme « invalide » du langage administratif, le qualifiant de « dérogatoire, stigmatisant et incompatible avec une approche fondée sur les droits humains ».
L’organisation rappelle également que « les besoins liés au handicap persistent au-delà de l’âge de 65 ans », et que les politiques publiques doivent garantir une continuité des droits et du soutien apporté, indépendamment de l’âge. Enfin, DIS-MOI tient à rappeler que le handicap n’est pas une simple condition médicale, mais doit être considéré dans son cadre social, environnemental et juridique.
En réponse, Ashok Subron a soutenu que « les grandes lignes de la réforme ont été exposées hier au Parlement. Nous sommes en discussions et travaillons d’arrache-pied. Les modalités seront rendues publiques en temps voulu. » Il a expliqué que cette réforme s’inscrit dans une volonté de rendre le système plus juste et plus adapté aux réalités actuelles.
Actuellement, la pension d’invalidité de base est réservée aux personnes de moins de 60 ans, présentant un handicap certifié d’au moins 60 %. Avec la réforme, cette limite d’âge passera à 65 ans, en cohérence avec le report progressif de l’âge de la pension de vieillesse. Environ 1 500 personnes supplémentaires pourront bénéficier de cette pension chaque année entre 60 et 65 ans.
Soutien financier gradué
Le gouvernement entend également transformer le système d’évaluation du handicap. Jusqu’ici, celui-ci reposait sur une seule condition médicale. Une nouvelle approche hybride sera introduite, tenant compte des capacités fonctionnelles de la personne : sa mobilité, son autonomie au quotidien, sa capacité à interagir et à résoudre des problèmes. Plusieurs conditions médicales pourront désormais être prises en compte, au lieu d’un seul diagnostic.
Autre changement important : l’abandon du modèle de soutien « tout ou rien ». Actuellement, seuls les bénéficiaires dont le handicap atteint ou dépasse 60 % reçoivent la pension complète de Rs 15 000. Ceux en dessous de ce seuil obtiennent une aide limitée à Rs 2 500. Le nouveau système introduira un soutien financier gradué, adapté au degré réel de difficulté.
Le ministère prévoit aussi de mettre en place une méthode d’évaluation spécifique pour les enfants en situation de handicap, ainsi qu’une reconnaissance des maladies rares comme facteur fonctionnel dans les procédures.
Enfin, le gouvernement envisage une refonte complète des panels d’évaluation. À l’heure actuelle, l’évaluation est assurée par un Medical Board composé de deux médecins généralistes. À l’avenir, un panel pluridisciplinaire verra le jour, avec la participation de spécialistes médicaux, de psychologues, d’ergothérapeutes, de thérapeutes et de représentants du secteur associatif. Une procédure unifiée devrait permettre aux personnes concernées d’être évaluées pour plusieurs types d’aides en une seule démarche.

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