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Réforme électorale - Représentativité féminine : paroles de femmes

Le Premier ministre Pravind Jugnauth a officiellement présenté la réforme électorale. Il a émis le souhait qu’une dose de proportionnelle soit introduite et qu’il y ait une meilleure représentation féminine à l’Assemblée nationale. Que pensent les femmes de cette proposition ? 

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Le débat pour qu’il y ait davantage de femmes à l’Assemblée nationale ne date pas d’hier. Lors de la présentation des propositions sur la réforme électorale la semaine dernière, le Premier ministre a fait ressortir : « Nous avions pris l’engagement de venir avec une réforme qui introduirait une dose de proportionnelle et une meilleure représentation féminine à l’Assemblée nationale. » 

Parmi les idées avancées : la représentation des femmes. Les listes de candidats et les listes pour la représentation proportionnelle (RP) devront ainsi contenir au moins un tiers de femmes au niveau national. Sur les listes pour la RP, pas plus de deux candidats consécutifs ne peuvent être du même sexe. Selon les chiffres disponibles, 50,6 % des femmes votent, 11 % sont au Parlement et 8 % font partie du Cabinet des ministres. 

Marie Anne Lagane, une citoyenne très engagée, déclare : « La représentation des femmes au Parlement est un vieux débat. Pour les prochaines élections, il serait temps de respecter la Constitution de Maurice qui est la meilleure d’Afrique. » Elle explique qu’il ne faut pas qu’il y ait de discrimination entre les sexes. « Il y a un autre problème chez nous. Malheureusement dans certains endroits, la population n’est pas prête à accepter cette réalité. Vu que 52 % de la population sont des femmes, nous avons besoin davantage de représentantes de la gent féminine au Parlement pour le bien du pays. Toutefois, une balance de 50 % d’hommes et 50 % de femmes serait idéale et juste… », ajoute Marie Anne Lagane. 

Loga Virahsawmy, board member de Gender Links, estime que nous sommes en 2018 et que Maurice est loin derrière les autres pays d’Afrique. « Nous ne pouvons pas nous contenter d’un tiers alors que 52 % de la population sont des femmes. Si c’est le cas, nous allons à l’encontre de notre Constitution et des engagements que nous avons signés concernant la discrimination à l’égard des femmes. Une telle proposition ne permettra pas aux femmes de faire entendre leur voix. Il est donc important d’avoir la parité absolue entre hommes et femmes à l’Assemblée pour faire la différence. Les partis politiques et les députés doivent faire un bilan après leur passage au pouvoir pour constater ce qu’ils ont accompli afin de changer la vie de la population à tous les niveaux, tant social qu’économique. » 

Quant à l’éducatrice Paula Atchia, elle est d’avis que la réforme politique proposée est probablement une perte de temps. « Vu nos structures politiques, nous risquons de revenir au point de départ et la situation n’évoluera pas. Pour moi, la seule force sociale suffisamment grande pour modifier le paysage politique, c’est la force des femmes. Mais pour cela, ces dernières doivent essayer d’agir et s’organiser pour les prochaines élections. Sans cela, l’avenir s’annonce incertain pour la démocratie du pays. »


ce qu’elles en pensent

Christina Chan Meetoo

Christina Chan Meetoo : « Attention à une divergence d’interprétation sur cette nouvelle formule »

La Senior Lecturer de l’Université de Maurice, Christina Chan Meetoo, explique que le principe est le même que celui déjà présent depuis 2011 dans la Local Government Act. Cependant, la formulation diffère. « J’espère qu’il n’y aura pas de divergence d’interprétation », dit-elle.

La  Local Government Act stipule : « Every group presenting more than 2 candidates at an election of a Municipal City Council or Municipal Town Council shall ensure that not more than two thirds of the group’s candidates for election to that Council are of the same sex. » Dans la proposition pour les élections générales, il est dit : « At least 1/3 of the total number of candidates fielded by each party or party alliance should be of the same sex ». Christina Chan Meetoo souligne que cela peut prêter à confusion pour le FPTP. Par contre, elle indique que le second paragraphe sous la PR List dans la proposition de réforme paraît plus clair : « Not more than 2 consecutive candidates on the PR List should be of the same sex ». 

La formulation du tiers permet en fait d’avoir jusqu’à 2/3 de candidates, dit-elle. « Malheureusement, je ne suis pas sûre que les partis oseront proposer au-delà du tiers de candidates. Ils s’en tiendront probablement au minimum, alors qu’ils peuvent tout à fait présenter 50 % de femmes (en miroir à la composition démographique), voire plus. »  En ce qu’il s’agit du système de quotas, il n’est théoriquement pas l’idéal. Toutefois, il est essentiel de passer par là jusqu’à ce que les mentalités changent et qu’il n’y ait plus d’obstacles pour la participation des citoyens à égalité, précise-t-elle. 

« Il était grand temps que la question de la représentation des femmes à l’Assemblée nationale soit abordée, d’autant plus que nous avons un des plus faibles taux avec seulement 11.6 % de députés femmes (contre 61.3 % au Rwanda et 46.2 % en Namibie). C’est une bonne chose que cette réforme introduise un quota minimum pour corriger cette erreur ».


Mireille Martin

Mireille Martin :« Le pouvoir aux leaders politiques mènera à une perversion de la démocratie »

Toute réforme électorale doit être prise dans son ensemble et évaluée non seulement selon le contexte dans lequel elle est présentée, mais aussi par rapport aux résultats qu’elle est censée apporter, soutient l’ancienne ministre de l’Égalité des genres, Mireille Martin. Selon elle, tout projet de loi doit être considéré dans son ensemble et pas seulement par rapport à une ou deux mesures qu’il contient. « Dans sa forme actuelle, la proposition du PM contient des mesures qui sont largement controversées et inacceptables.

Le pouvoir accru accordé aux leaders politiques peut mener à une perversion de la démocratie en diminuant le droit de l’électorat de choisir leurs représentants ainsi que les pouvoirs de nos institutions de référence comme la commission électorale en faveur des politiciens. »  Cette réforme, dit-elle, contient certes une proposition pour qu’au minimum un tiers de femmes soient listées comme candidates sur les listes des partis aux élections générales, mais encore faut-il que toutes ces candidates soient élues. Pour Mireille Martin, cette proposition n’offre aucune garantie qu’il y aura un tiers de femmes parlementaires dans l’hémicycle.

« La présence des femmes n’est pas exigée dans toutes les circonscriptions ». Mireille Martin affirme que la liste alternée de représentation à la proportionnelle peut aider à faire admettre plus de femmes dans l’hémicycle, mais il faut savoir selon quels critères elles seront choisies car c’est le leader qui choisira. « Il y a d’autres mesures qui font que cette proposition n’est pas acceptable dans sa forme actuelle ». 


Françoise Labelle

Françoise Labelle : « Aucune garantie d’une femme par circonscription » 

La femme mauricienne a tous les droits de participer dans les activités de son pays. Selon l’ancienne députée Françoise Labelle, cette nouvelle formule d’un tiers de candidats du même sexe proposée pour la réforme électorale, comporte un risque. 

« Elle ne garantit pas qu’il y aura une femme par circonscription », dit Françoise Labelle. Commentant le choix du candidat qui fera son entrée au Parlement et qui sera décidé par les leaders politiques par rapport à l’allocation de six à dix sièges pour rétablir la majorité obtenue par le parti ou l’alliance qui gagne et pour éliminer le Best Loser System, elle qualifie cela comme étant un « recul dans la démocratie ».


Marie Noelle Elissac Foy

Marie-Noëlle Elissac-Foy : « C’est un bon début. Il faudra aligner plus de candidates »

La représentation proportionnelle d’au moins un tiers de femmes est un bon début. Toutefois, pour atteindre ce nombre, il faudra aligner plus de candidates, estime la consultante en relations publiques, Marie-Noëlle Elissac-Foy. « On n’entend pas la voix des femmes sur des sujets qui les concernent et qui sont des questions d’ordre vital. Prenons l’exemple de la violence contre les femmes et les petites filles.

On a connu une barbarie dans le Gender Based Violence depuis quelques années à Maurice. C’est un fait. Or, que voit-on comme réponse : des agresseurs qui s’en sortent avec des travaux communautaires, d’autres libérés sous caution ou encore des Protection Orders qui ne sont pas respectés. S’il y avait plus de femmes dans la sphère décisionnelle, on aurait pu mettre plus de pression sur la police et les avocats, entre autres ».  


Jhinni Awotar

Jhinni Awotar : « Les femmes devraient représenter plus de 50 % de sièges au Parlement »

Titulaire d’une maîtrise en relations internationales et diplomatie de l’American School de Paris, la jeune professionnelle, Jhinni Awotar trouve que la proposition de la réforme électorale du Premier ministre Pravind Jugnauth aidera à renforcer la participation des femmes en politique à l’avenir. 

> Quel est le poids des femmes au parlement ?
Actuellement à Maurice, le taux des femmes est de 11.6 % (Rapport Mondial- développement humain de 2018). Toutefois, si l’on se fie à la dernière enquête nationale, les femmes représentent 50.5 % de la population totale à Maurice. Elles devraient donc représenter plus de 50 % de sièges au Parlement. Sans représentation à ce niveau, il est difficile pour elles d’influencer la politique. Une démocratie forte et dynamique n’est possible que lorsque le Parlement représente dans son ensemble la population. Il ne s’agit pas seulement du droit des femmes à l’égalité et de leur contribution à la conduite des affaires publiques, mais également de l’utilisation des ressources et du potentiel des femmes pour déterminer les priorités politiques et de développement qui bénéficient à la société mauricienne.

> Quel est l’impact d’une faible représentation des femmes dans la vie publique ?
Selon les études menées à l’échelle mondiale, la faible croissance économique du pays pourrait se traduire par une croissance du PIB de 1 à 3 % selon les conditions qui prévalent dans un pays spécifique. Par exemple, si le taux de croissance à Maurice est de 4.0 % et si la participation des femmes était appropriée, le PIB pourrait augmenter de 1 %. Si des indications appropriées sont fournies aux femmes et que l’égalité des sexes est assurée, cela pourrait augmenter le PIB de Maurice à 1 % à l’avenir. Il y a une faible amélioration socio-économique et une réalisation lente des objectifs nationaux. L’égalité des sexes aidera Maurice à atteindre le statut économique à revenu élevé.

> Que faut-il faire pour une meilleure représentation des femmes ?
• Chaque parti politique devrait donner au moins 33 % des tickets aux femmes.
• La participation des femmes à l’éducation devrait être améliorée.
• La violence domestique contre les femmes devrait arrêter.
• Plus de représentation des femmes dans les commissions.
• Les femmes ont encore un long chemin à parcourir pour atteindre la parité avec les hommes. Nous devons libérer leur potentiel et leur offrir les mêmes opportunités que leurs homologues masculins.


 Pamela Olivette

MICRO trottoir

Pamela Olivette, 42 ans, Mare d’Australia :
« La participation des femmes à la politique contribue à promouvoir l’égalité des sexes et les types de solutions proposées. L’engagement des femmes est crucial. Il est important de reconnaître qu’elles ne constituent pas un groupe homogène. Que les femmes soient jeunes ou plus âgées, éduquées ou non, vivent dans des zones rurales ou urbaines, elles ont des expériences de vie différentes qui conduisent à des priorités et des besoins différents. »


Jayen Mootoo

Jayen Mootoo, 60 ans, Verdun :
« Toutes les femmes élues au Parlement ou dans un autre organisme législatif ne placent pas les questions ou les droits des femmes comme leurs priorités. De toute évidence, la représentation des femmes n’est pas le seul facteur, mais c’eAst un argument critique pour le développement des démocraties inclusives, réactives et transparentes. »


Leonard Marie

Leonardo Marie, 18 ans, Goodlands : 
« Faisant partie de la gent masculine, je pense que les femmes doivent être plus nombreuses au sein de l’hémicycle. Les femmes évoluent et cela serait bénéfique à la société mauricienne. Si Maurice veut vraiment avancer, c’est une des meilleures façons d’y parvenir ».


Kesinee Panden

Kesinee Panden, 23 ans, Triolet :
« Lorsqu’on parle des femmes, on ne doit surtout pas oublier qu’elles sont présentes dans divers domaines, que ce soit au sein d’une famille ou au travail. Je suis d’avis que davantage de femmes doivent faire partie du Parlement. Ce sera une belle avancée pour le pays. »


Annick Soleil

Annick Soleil, 45 ans, Sainte-Croix :
« La présence des femmes en politique est un must, car nombreuses sont celles qui n’arrivent pas à se frayer un chemin au sein de l’hémicycle alors qu’elles ont les compétences. Il faut juste leur donner la chance et l’opportunité. » 


Sandini

Sandini Panjanadum, 22 ans,Grand- Gaube :
« La participation significative des femmes aux rôles de leadership nationaux est devenue un élément important de la politique mondiale. Beaucoup se demandent encore pourquoi les femmes doivent devenir des leaders politiques et faire partie des décideurs. En fait, leur participation politique se traduit par des gains tangibles pour la démocratie, notamment une plus grande réactivité aux besoins des citoyens, une coopération accrue entre les partis et groupes ethniques et un avenir plus durable. »


Moossa Lall

Moossa Lall, 35 ans, Port-Louis :
« C’est un aspect à considérer. Est-ce que tous les Mauriciens arriveront à suivre le rythme ? Cependant, dans l’ensemble, c’est une bonne chose. Car ce sont toujours les mêmes politiciens qui sont présents sur le devant de la scène. Il se peut qu’avec une touche féminine, chacun y trouve son compte. Ceux qui ont été élus dans le passé ont fait leur preuve. Désormais, libre aux femmes de faire entendre leur voix. »


Ally Sureram

Ally Sureram, 49 ans, Port-Louis :
« Chacun a des compétences et des aptitudes, et devrait avoir la chance de les prouver. Tant que les femmes travaillent pour le bien du pays, il n’y a pas d’objections. » 
 

 

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