Le rapport de la commission d’enquête sur l’affaire dite « Britam » a été rendu public, le 27 juillet 2021. Cela concerne la vente des actions de l’ex-British American Investment Co Ltd, au sein de Britam Holdings Ltd (Kenya). Une des recommandations du rapport est des poursuites criminelles et civiles. Quels sont les implications légales et les impacts en cas d’un délit pénal ou de poursuite au civil ? Le point….
Cette commission d’enquête a été présidée par l’ex juge Satyabhoosun Gupt Domah. Il a eu pour assesseurs Sattar Hajee Abdoula et Imrith Ramtohul. Ce rapport de 352 pages a fait une trentaine de recommandations. Parmi, une enquête policière sur certains délits, des poursuites au pénal et au civil contre certaines personnes, sociétés, entre autres.
Ainsi, le rapport recommande une enquête policière pour faux et usage de faux contre Sudarshan Bhadain, Akhileshwarnath Deerpalsing, Afsar Ebrahim, Sandeep Khapre et la BDO, entre autres. Et aussi des poursuites contre Afsar Ebrahim, Yacoob Ramtoola et la BDO pour violation des articles 109 et 215 de l’Insolvency Act. Autre recommandation dudit rapport, est des poursuites au civil pour faute, préjudices, entre autres.
D’autre part, le rapport évoque aussi fraude, corruption, « undue influence or misdeed » et faute professionnelle ministérielle (ministerial malpractice).
La fraude
La fraude, selon l’avocat Arshaad Inder, est une action intentionnellement trompeuse conçue pour fournir à l’auteur un gain illégal ou pour refuser un droit à une victime. À Maurice, il n’y a pas de délit de « corporate fraud » (fraude en entreprise).
Il existe cependant des infractions dans lesquelles il y a un élément de fraude, soutient l’avocat Arshaad Inder. « Les principales lois relatives à la fraude en entreprise se trouvent dans le Code pénal. Celui-ci contient des dispositions sur les infractions pénales liées à la fraude. Il y a aussi la Companies Act 2001 (loi sur les sociétés). Celle-ci contient des dispositions spécifiques concernant les activités frauduleuses des entreprises », évoque l’avocat Arshaad Inder.
« Il y a d’autres lois traitant d’infractions comportant un élément de fraude. Il s’agit notamment de la Prevention of Corruption Act 2002 (PoCA) et la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act 2002 (FIAMLA) », affirme l’avocat Arshaad Inder.
Par ailleurs, soutient l’homme de loi, le Code civil mauricien, contient des dispositions sur les actes et comportements liés à la fraude. « En vertu du Code civil mauricien, la conduite qui implique un élément de fraude est « Dol », c’est là qu’une personne utilise des actes frauduleux afin d’inciter une partie à faire quelque chose », souligne l’avocat Arshaad Inder.
Corruption
La principale loi relative aux pots-de-vin (bribery) et à la corruption, est la PoCA, soutient l’avocat Arshaad Inder. Ce dernier évoque que Maurice est signataire de la Convention des Nations Unies contre la corruption de 2003 (Convention sur la corruption). Les infractions spécifiques de corruption dans notre juridiction sont les suivantes : « Foreign public officials », « Domestic public officials », « Bribery by a public official », « Taking of gratification », « Bribery of or by public official to influence the decision of a public body », « Influencing a public official », « Receiving gift for a corrupt purpose », « Corruption of agent », entre autres.
« Undue influence or misdeed »
Selon l’avocat Arshaad Inder, la doctrine de l’abus d’influence offre un recours lorsque des contrats ont été conclus à la suite de pressions indues.
« Cela se produit généralement en raison d’une relation entre les parties exploitées pour obtenir un avantage », explique l’avocat Arshaad Inder.
Faute professionnelle ministérielle (ministerial malpractice)
La faute professionnelle, précise l’avocat Arshaad Inder, est un manquement ou une négligence du salarié à ses obligations contractuelles dans l’exécution de son travail. Toutefois, la faute (individuelle), dit-il, peut se décliner en faute légère, faute lourde, faute grave et faute intentionnelle. Cela inclut aussi la faute professionnelle, la négligence, l’exécution défectueuse d’un officier ministériel. C’est-à-dire, qu’une personne, qui en exécution d’une décision des autorités de l’État dispose d’un privilège pour exercer une activité qui, en général, constitue une tâche de service public ou tout manquement lié à l’exécution de son poste.
Les sanctions
Concernant la fraude, selon l’avocat Arshaad Inder, une personne encourt une amende n’excédant pas Rs 1 million et un terme d’emprisonnement de cinq ans. Cela en vertu de la Companies Act.
Dans le cas d’une procédure pénale, explique l’avocat Arshaad Inder, la personne peut être poursuivie pour escroquerie. Ainsi, elle risque une peine maximale de 20 ans et une amende n’excédant pas Rs 150 000. Pour détournement de fonds, elle encourt une amende n’excédant pas Rs 100 000. En cas de détournement par un fonctionnaire ou un officier ministériel, Clerk, entre autres, la personne peut être sanctionnée d’une peine n’excédant pas 20 ans.
Dans le cas de poursuite au civil, affirme l’avocat Arshaad Inder, la personne peut réclamer des dommages, pour motif de tort.
Pour « undue influence or misdeed », l’avocat soutient qu’en cas d’une culpabilité, la personne risque une peine de servitude pénale n’excédant pas 10 ans.
Pour corruption, soutient l’avocat Arshaad Inder, la peine maximale est de dix ans, sous la PoCA. Malheureusement, selon l’homme de loi, à Maurice, les infractions de « bribery » et de corruption, ne concernent que les agents publics. Ce qui a une interprétation limitée. Pour l’avocat Arshaad Inder, il y a une lacune dans notre loi dans le sens où les entreprises du secteur privé, ne sont pas couvertes par la PoCA, car elle prévoit des infractions impliquant des agents publics qui ont une interprétation limitée. Par conséquent, les infractions de pots-de-vin et de corruption dans le secteur privé devraient également être traitées par le législateur en apportant de nouveaux amendements à la PoCA.
Poursuites au civil
L’avocat Sanjay Bhuckory, Senior Counsel, fait ressortir que le rapport conclut, premièrement, qu’un ministre serait personnellement responsable au civil s’il n’engage pas le cabinet ministériel à prendre une décision qu’il aurait dû référer au cabinet. Et deuxièmement, souligne le Senior Counsel, une firme comptable et son personnel pourraient également être responsables civilement pour avoir violé le code d’Éthique et la loi qui les régit.
La procédure
C’est aux autorités concernées qui se sentent lésées de le faire, soutient l’avocat Sanjay Bhuckory, Senior Counsel. Et pour cela, explique le Senior Counsel, elles doivent pouvoir établir qu’il y a eu faute de la part du ministre et de la firme respectivement. Ainsi, elles doivent déposer une plainte devant une cour de justice pour réclamer réparation. Toutefois, le montant de la réclamation, dit-il, dépendra, de la juridiction de la cour.
Recours pour contester ledit rapport
Selon l’avocat Sanjay Bhuckory, Senior Counsel, les personnes qui veulent contester le rapport Britam, peuvent saisir la Cour suprême par voie de révision judiciaire, si ces dernières estiment que les conclusions dudit rapport, leur sont défavorables. Pour ce faire, ajoute le Senior Counsel, ces personnes devront établir que le processus décisionnel utilisé par la commission pour arriver à ces dites conclusions est en violation des principes de droit et de la justice naturelle.
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