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Judiciaire : confidences de deux jeunes avocats

L’avocate Sonali Doolooa | L’avocat Hiteshwar Gunesh
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Ils ont prêté serment le 22 septembre dernier en Cour suprême. Eux, ce sont les nouveaux avocats Sonali Doolooa et Hiteshwar Gunesh. L’un comme l’autre confient qu’ils ont toujours su qu’ils voulaient embrasser la profession légale. Rencontre.


Me Sonali Doolooa en compagnie de sa mère Paveetah lors de sa prestation de serment en Cour suprême, le 22 septembre dernier.
Me Sonali Doolooa en compagnie de sa mère Paveetah lors de sa prestation de serment en Cour suprême, le 22 septembre dernier.

Me Sonali Doolooa : un rêve d’enfant devenu réalité 

À 8 ans, elle a le déclic. Elle portera la robe noire des avocats plus tard. Fréquentant alors la Rajcoomar Gujadhur Government School, Sonali Doolooa est « fascinée » par les hommes de loi. « Je les voyais qui entraient et sortaient du tribunal de Flacq, qui se situe en face de l’école. » Sa voie est dès lors toute tracée. Aujourd’hui, à 33 ans, c’est avec une fierté non dissimulée qu’elle a rejoint la profession.

Le regard jovial, elle raconte qu’après ses études secondaires au collège Darwin de Flacq, elle s’envole pour l’université de Bedfordshire en Angleterre en 2012. Elle y entame son « Bachelor of Laws » (LLB). 

En 2015, l’habitante de Flacq retourne à Maurice pour s’occuper du business familial, son père, Sad Doolooa, étant souffrant. Responsable d’une école de Jiu-Jitsu, il gérait aussi un restaurant. À son décès, trois ans après, elle prend les rênes de l’école, étant enfant unique. Sa mère, professeur de yoga, s’occupe, quant à elle, du restaurant familial.

C’est en janvier 2018 qu’elle s’envole pour l’Australie pour faire son barreau à l’université de Bond. En décembre 2019, elle commence son « pupillage » chez l’avouée Anju Ghose et ensuite chez l’avocat Sanjay Bhuckory, Senior Counsel.
Les contraintes avec la pandémie

Cette période n’a pas été de tout repos pour la jeune avocate. Surtout avec l’éclatement de la pandémie et les restrictions sanitaires en vigueur. Elle explique, par exemple, que les « pupils » ne pouvaient pas assister aux audiences. 

Il fallait aussi gérer le fait que pendant le « pupillage », qui a duré deux ans, il n’y avait aucun rendement en termes financiers. Ce qui, dit-elle, est une contrainte pour ceux qui se lancent dans la profession. 

La profession est-elle saturée ?

« Non », répond Me Sonali Doolooa. « Nous faisons un travail noble. Il ne pas faut pas généraliser. Pourquoi les gens n’ont-ils pas la même réaction concernant les médecins et les ingénieurs ? » lance-t-elle.

Les difficultés 

Me Sonali Doolooa a été initiée au Jiu-Jitsu par son père, Sad Doolooa.
Me Sonali Doolooa a été initiée au Jiu-Jitsu par son père, Sad Doolooa.

Me Sonali Doolooa est catégorique. « Tout le monde a souffert de la pandémie de Covid-19, y compris les juristes. » Aujourd’hui, souligne-t-elle, il faut pouvoir prendre en considération plusieurs aspects. Parmi ceux-ci, la situation financière de la personne. 

L’avocate fait remarquer que certains évitent de retenir les services d’un homme de loi, craignant qu’il ne leur réclame des honoraires exorbitants. Or, fait-elle comprendre, « on est là pour aider les gens en difficulté en dépit de leur situation financière précaire ».

Ses autres passions

Lorsqu’elle ne porte pas la robe noire, Sonali Doolooa est à l’école familiale de Jiu-Jitsu sise à Flacq, où elle enseigne ce sport à des hommes, femmes et enfants âgés de 5 ans et plus. Passionnée de Jiu-Jitsu, dont elle est ceinture noire 4e Dan, elle représente aussi Maurice en Australie et en Angleterre. Elle confie que la pratique du Jiu-Jitsu a forgé son caractère. 

La pâtisserie est une autre de ses passions. « J’adore faire des gâteaux », lance-t-elle, des étoiles dans les yeux. 

Férue de lecture, en particulier de romans et d’histoires vécues, Sonali Doolooa confie que pour elle, le noyau familial est très important. Elle dit d’ailleurs vivre entourée des membres de sa famille, dont sa grand-mère paternelle, qui est âgée de 90 ans. Chaque dimanche, c’est autour d’un repas qu’ils se réunissent. Ce moment, l’avocate Sonali Doolooa ne le rate jamais.

Lacunes et propositions 

Il est temps d’évoluer, insiste Me Sonali Doolooa. Elle préconise, entre autres, la visioconférence, comme c’est le cas dans certains pays, dont l’Australie et l’Angleterre. Elle se réfère aux procès qui sont entendus devant le Conseil privé. « Cela marche très bien. » 
Elle milite aussi pour une meilleure utilisation de la technologie afin que les affaires en cour soient traitées plus rapidement. Citant la convocation d’un témoin ou d’une partie dans un procès au civil, par exemple dans un cas de divorce, Me Sonali Doolooa suggère que cela se fasse via WhatsApp.


Me Hiteshwar Gunesh en compagnie de ses parents lors  de sa prestation de serment en Cour suprême.
Me Hiteshwar Gunesh en compagnie de ses parents lors 
de sa prestation de serment en Cour suprême.

Me Hiteshwar Gunesh : dans les pas du père

Il a toujours voulu marcher sur les pas de son père, l’avoué Hunchun Gunesh, et embrasser la profession légale. À 27, ce grand jeune homme souriant, domicilié à Flacq, a réalisé son rêve en prêtant serment comme avocat le 22 septembre dernier. 

Après avoir fréquenté la Jawaharlal Nehru Government School à Lallmatie et la Shri Rajiv Gandhi Government School, à Flacq, il fait ses études secondaires au Mahatma Gandhi Secondary School. C’est à l’université de Maurice qu’il entame son LLB en 2013. En 2017, il participe aux examens d’avoué à Maurice et réussit à sa première tentative. 

En janvier 2018, il s’envole pour Angleterre pour faire une « conversion course » et son barreau. En décembre 2019, il est « called to the bar » à l’Inner Temple en Angleterre. Au cours du même mois, Hiteshwar Gunesh retourne à Maurice pour son « pupillage » chez son père, puis au bureau du Directeur des poursuites publiques, à celui de l’Attorney General et finalement chez le Senior Counsel, Me Antoine Domingue. 

Les contraintes avec la pandémie

Me Hiteshwar Gunesh fait valoir que ce n’est pas pratique de faire le « pupillage » en travaillant à la maison (« work from home »). C’est quelque chose d’« impossible », martèle-t-il. Il affirme qu’il est impératif de se rendre en cour et de suivre les audiences, une étape incontournable lors du « pupillage ». 

La profession est-elle saturée ?

Au vu du développement de plusieurs secteurs, argue Me Hiteshwar Gunesh, il y a toujours du travail pour un avocat. Pour lui, l’éthique est primordiale. À ce propos, il confie ne pas apprécier la façon dont opèrent certains de ses confrères. Cela, déplore-t-il, donne une mauvaise image à la profession.

Les difficultés

L’avocat Hiteshwar Gunesh revient sur les deux confinements auxquels a été confronté le pays. « Au début, les juristes étaient dans le flou. On ne savait pas quoi faire et comment les tribunaux allaient fonctionner. » 

Il salue la prompte réaction du chef juge d’alors, Eddy Balancy. « Il y a eu des communications via courriel pour guider les hommes de loi. Les tribunaux écoutaient uniquement des cas urgents. » Me Hiteshwar Gunesh évoque aussi les procès qui se sont tenus via visioconférence. Ce qu’il qualifie de « première et un grand pas pour le judiciaire, à l’ère de la technologie ». 

Me Hiteshwar Gunesh et son père, l’avoué Hunchun Gunesh.
Me Hiteshwar Gunesh et son père, l’avoué Hunchun Gunesh.

N’empêche, concède-t-il, la pandémie a eu un impact sur la profession, notamment financièrement. « J’ai constaté cela à travers mon père. Il avait le loyer à payer pour le bureau qu’il occupe ainsi que les salaires de ses employés. »

Lacunes et propositions 

Me Hiteshwar Gunesh observe que le « case management » est toujours un problème dans le judiciaire. Il préconise, de fait, l’entrée en opération de l’e-Judiciary dans les autres cours de justice. Ce système, fait-il remarquer, marche très bien en cour commerciale. 

« Si ce système est aussi appliqué dans d’autres instances, cela aidera à gérer le nombre de procès qui est en hausse et ceux qui traînent depuis plusieurs années », souligne Me Hiteshwar Gunesh. Aussi, ajoute-t-il, cela évitera que les hommes de loi poireautent en cour pendant des heures avant que le cas ne soit appelé. 

À l’instar de sa consoeur, Me Sonali Doolooa, l’avocat Hiteshwar Gunesh préconise l’utilisation de la visioconférence pour certains procès. La nouvelle Cour suprême est dotée de cette technologie. Ainsi, le « work from home » serait possible pour des avocats et avoués, souligne-t-il.

Ancien candidat aux villageoises 

L’avocat Hiteshwar Gunesh ne cache pas son intérêt pour la politique. Il a d’ailleurs été candidat aux élections villageoises en décembre 2020, à Centre-de-Flacq. Il était membre du Movement Socialiste de Flacq qui avait comme emblème un téléphone portable. Nullement découragé d’avoir été classé 12e, il avance avoir vécu une expérience exceptionnelle. 

Passionné de musique, Me Hiteshwar Gunesh joue de la guitare.
Passionné de musique, Me Hiteshwar Gunesh joue de la guitare.

« La politique à Maurice ne changera pas. C’est un système ancré dans les mœurs », constate-t-il. « Nous étions des jeunes candidats. Mais ce sont les vétérans qui ont été choisis par le village. Et cela, en dépit du fait que nous avions fait usage de la technologie pour mettre en avant notre parti politique », souligne l’homme de loi.

Ses autres passions

La musique est une autre des passions de Hiteshwar Gunesh. Il joue du tabla et de la guitare. En sus, il pratique le football.

Fils unique, Hiteshwar Gunesh est l’aîné de la fratrie. Sa sœur cadette, Chetna Devi, 25 ans, s’est lancée dans la communication. Quant à la benjamine, Urvi Devi, 17 ans, elle vient de compléter son School Certificate. 

Sa mère, Devi, est femme au foyer depuis la naissance de sa petite sœur. Auparavant, elle travaillait comme clerc d’avoué. Ses parents se sont rencontrés en 1992, alors que son père venait de faire ses premiers pas comme avoué. 

Me Hiteshwar Gunesh révèle être très lié à son père, d’autant qu’ils occupent la même profession. Ils se retrouvent souvent à ne discuter que « de sujets liés au droit ».

 

 

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