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Inde : Modi condamne les lynchages liés à la vache sacrée

Le Premier ministre indien Narendra Modi est sorti jeudi de plusieurs mois de silence pour condamner la série de lynchages de musulmans dans son pays commis au nom de la protection de la vache sacrée.

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Normalement prompt à tweeter ou à réagir à l'actualité, Narendra Modi ne s'était pas exprimé depuis août 2016 sur ces meurtres commis par des milices autoproclamées de protection des vaches, animal considéré comme sacré dans l'hindouisme.

"Tuer des gens au nom du culte de la vache n'est pas acceptable", a déclaré le dirigeant nationaliste hindou lors d'un discours à Ahmedabad, au Gujarat, État de l'ouest de l'Inde dont il est originaire et qu'il a longtemps dirigé.

Le pays de 1,25 milliard d'habitants vit depuis près de deux ans au rythme de lynchages réguliers de musulmans, et parfois de membres de la communauté dalit - autrefois appelés "intouchables". Au moins dix musulmans ont été lynchés ou tués en public depuis avril en Inde.

Les détracteurs de l'homme fort de l'Inde l'accusent, au mieux, de fermer les yeux sur ces phénomènes. Ils voient dans ces violences une manière pour la majorité hindoue d'imposer sa loi aux minorités de la mosaïque du peuple indien.

"Personne n'a le droit de prendre la loi entre ses mains dans ce pays. La violence n'a jamais été et ne sera jamais un moyen de résoudre le moindre problème", a dit M. Modi.

Cette déclaration survient quelques jours après un nouveau meurtre de musulman, poignardé à mort dans un train en partance de Delhi.

Junaid Khan, 15 ans, et ses compagnons de voyage avaient été accusés par leurs agresseurs de transporter de la viande bovine - dont la consommation est considérée comme blasphématoire par nombre d'hindous.

En avril, près de 200 personnes avaient fondu au Rajasthan sur un convoi transportant des vaches laitières et tué un fermier. Le mois suivant, dans l'est, des villageois avaient frappé à mort deux jeunes musulmans qu'ils accusaient de vol de vaches.

Viande bovine

En signe de protestation, des manifestations se sont tenues mercredi dans plusieurs grandes villes d'Inde autour du slogan "Not in my name" (Pas en mon nom) pour mobiliser contre ces lynchages.

Les groupes de défense des droits de l'homme ont dénoncé une culture d'"impunité" envers les responsables de ces crimes et appelé le gouvernement nationaliste hindou à sévir.

"Le schéma des crimes de haine commis contre les musulmans avec une apparente impunité (...) est profondément inquiétant", a déclaré Aakar Patel, directeur exécutif d'Amnesty International en Inde, dans un communiqué cette semaine.

Ces lynchages interviennent sur fond de crispations politico-religieuses en Inde, où les nationaliste hindous sont au pouvoir depuis trois ans. Une simple rumeur autour de la vache et sa viande peut déclencher des violences meurtrières.

L'abattage de vaches est interdit dans de nombreux États d'Inde, où il est parfois passible de prison à vie. Dans le même temps, la législation se fait de plus en plus contraignante pour les industries de la viande et du cuir, traditionnellement tenues par les musulmans.

New Delhi a décrété le mois dernier une interdiction fédérale de vendre du bétail (vaches, buffles, bœufs, chameaux...) pour l'abattage. Ce texte, que ses opposants perçoivent comme une tentative d'imposer le végétarisme, fait actuellement l'objet d'une bataille judiciaire.

En mars, la victoire éclatante des nationalistes hindous aux élections régionales dans l'Uttar Pradesh s'est concrétisée par la nomination d'un religieux radical hindou à la tête de cet État de 220 millions d'habitants.

L'une de ses premières décisions a été de lancer des descentes de police dans les abattoirs de viande, soutenant que ces industries opéraient sans les permis nécessaires.

L'Inde, qui était le premier fournisseur mondial de viande bovine, a en conséquence vu ses exportations lourdement chuter.
AFP

  • LDMG

 

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