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Hausse des salaires des fonctionnaires : les implications économiques pour Maurice en 2025

Environ 90 000 fonctionnaires verront leurs salaires être revus à la hausse l’an prochain.

Quelque 90 000 fonctionnaires verront leurs salaires augmenter en 2025. Cette mesure, visant à stimuler la consommation et améliorer le niveau de vie des salariés, pourrait alourdir le budget de l’État, accroître la dette publique et entraîner des ajustements fiscaux pour compenser les coûts.

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Le Premier ministre a annoncé que le rapport du Pay Research Bureau (PRB) sera dévoilé fin 2025. Un « back pay » d’un an, en accord avec l’augmentation des salaires recommandée dans le rapport du PRB, sera versé en décembre 2025. Aussi, le calcul du bonus du 13ᵉ mois sera basé sur le nouveau rapport du PRB. Selon les observateurs économiques, honorer cet engagement pourrait mettre à rude épreuve les budgets futurs et affecter la stabilité budgétaire de l’économie mauricienne.

Augmentation des dépenses publiques

L’observateur économique et expert-comptable Tahir Wahab avance que l’augmentation des salaires entraînera d’abord une hausse des dépenses salariales courantes du gouvernement. « Le bonus du 13ᵉ mois, basé sur les nouveaux niveaux de salaire, entraînera également une augmentation des dépenses annuelles », dit-il.  Un avis partagé par l’économiste Bhavish Jugurnath. « Le paiement des salaires des fonctionnaires implique un coût énorme et a un impact sur le budget du gouvernement ainsi que sur le déficit budgétaire. Cependant, nous devons attendre la publication du rapport du PRB pour connaître l’augmentation exacte et son impact », explique-t-il. 

L’économiste Manisha Dookhony partage également cette opinion. « Nous ne savons pas encore combien les fonctionnaires toucheront en termes d’augmentation. Cependant, même une hausse de 5 % coûtera énormément à l’État », avance-t-elle. Cette dernière rappelle qu’il y a déjà eu des augmentations en termes de salaire minimum et de compensation salariale successivement, ce qui pèse déjà lourd sur les dépenses salariales du gouvernement.

Montée de la dette publique

Tahir Wahab indique que si le gouvernement ne dispose pas de fonds suffisants pour couvrir ces dépenses, il peut recourir à l’emprunt. « Par conséquent, on peut s’attendre à une augmentation de la dette publique », souligne-t-il. Manisha Dookhony n’écarte pas cette possibilité. « Le gouvernement peut se retrouver à emprunter pour honorer le paiement des salaires des fonctionnaires. » 
Bhavish Jugurnath abonde dans le même sens. Il affirme que les hausses salariales dans la Fonction publique ont un coût certain et conduiront à une augmentation de la dette publique. « Cette semaine même, le ministère des Finances a publié ses chiffres pour le mois de juin 2024, et la dette publique a augmenté de 10 %, atteignant Rs 536,25 milliards, comparativement à la même période l’année dernière, où elle était de Rs 494,39 milliards », rappelle-t-il.

Augmentation des dépenses de consommation

Selon nos intervenants, des revenus disponibles plus élevés pourraient stimuler les dépenses de consommation, ce qui pourrait dynamiser l’activité économique à court terme. Manisha Dookhony avance qu’avec le ’back pay’ prévu en décembre 2025, de nombreux fonctionnaires vont envisager des dépenses importantes telles que la rénovation, des projets d’extension et l’achat de meubles, entre autres, car ils disposeront d’une somme importante. 

De son côté, Bhavish Jugurnath explique que des salaires plus élevés pour les fonctionnaires entraîneront une augmentation du revenu disponible, ce qui pourra stimuler les dépenses des consommateurs. « Cela, à son tour, pourra favoriser la croissance économique, car les entreprises constateront une demande accrue pour leurs produits et services », dit-il. Par conséquent, le niveau de vie pourrait également s’améliorer. « À long terme, on peut s’attendre à une baisse de la pauvreté et à une amélioration du bien-être social », ajoute-t-il.

Poussée inflationniste

Tahir Wahab avance que le paiement d’un an d’arriérés de salaire peut être considéré comme un ajustement équitable si les augmentations de salaire ont été retardées ou s’il y a eu des disparités importantes dans le passé. « Cela peut être justifié comme un moyen de corriger les inégalités antérieures et de maintenir le moral dans le secteur public », soutient-il. Cependant, dans un contexte inflationniste et à l’approche des élections, cette mesure pourrait, selon lui, être considérée comme politiquement motivée plutôt qu’économiquement prudente. « Le gouvernement doit s’assurer qu’il peut se le permettre sans compromettre la santé financière du pays, car une poussée inflationniste pourrait entraîner une dépréciation supplémentaire de la roupie par rapport au dollar », prévient l’observateur économique. 
Bhavish Jugurnath partage cet avis. « Bien que l’augmentation des dépenses puisse avoir des effets positifs, elle peut également entraîner de l’inflation si la demande dépasse l’offre », souligne-t-il. 
En effet, les entreprises pourraient augmenter les prix pour faire face à la demande accrue, ce qui entraînerait une hausse générale du coût de la vie.

Introduction de nouvelles taxes

Afin de financer le paiement des salaires des fonctionnaires, Manisha Dookhony affirme que le gouvernement pourrait augmenter les taxes, voire en introduire de nouvelles. « C’est l’un des moyens directs pour remplir ses caisses et financer les dépenses », soutient-elle. Tahir Wahab abonde dans le même sens. « Pour pouvoir financer les salaires des fonctionnaires pour l’année financière de 2025, il faut s’attendre à une augmentation des taxes, ou encore à l’introduction de nouvelles taxes », dit-il. 

Par ailleurs, selon lui, il est possible que la Contribution Sociale Généralisée (CSG) soit également revue à la hausse. Cependant, Bhavish Jugurnath est d’avis qu’en période électorale, le gouvernement pourrait écarter une augmentation des taux d’imposition, en particulier pour la TVA, en comptant plutôt sur une augmentation des recettes fiscales générées par l’expansion de l’activité économique.

Réduction du gaspillage

Nos intervenants estiment que le gouvernement pourrait aussi devoir réduire les budgets alloués à d’autres domaines ou diminuer les dépenses non essentielles pour faire face à l’augmentation des coûts salariaux. « Il doit se concentrer sur l’amélioration des services et la réduction du gaspillage dans les opérations du secteur public afin de libérer des ressources pour ces paiements », disent-ils.

Une hausse de la productivité parmi les fonctionnaires est attendue

Tahir Wahab espère que l’annonce de la mise en vigueur de la réforme en janvier 2025 stimulera le moral et augmentera la productivité des fonctionnaires. « Cela peut mener à des améliorations de la performance du secteur public et de la prestation des services auprès de la population », dit-il. Pour sa part, Manisha Dookhony avance que, bien que le niveau de productivité dans la Fonction publique soit souvent critiqué, il y a toutefois des fonctionnaires qui assurent des services avec efficacité. « Si les salariés sont satisfaits de l’augmentation de leurs salaires, ils seront davantage motivés à être plus productifs », soutient-elle.

Renganaden Padayachy : « La publication du rapport permettra d’obtenir une estimation précise du coût »

 Le ministre des Finances a expliqué à la presse lundi, lors de la cérémonie de l’ouverture de l’hôpital à Flacq que, en règle générale, c’est le directeur du PRB qui est chargé de préparer le rapport et d’estimer le coût de la hausse salariale. « Ainsi, seule la publication du rapport permettra d’obtenir une estimation précise du coût », a fait comprendre Renganaden Padayachy. 

 

  • Salon

 

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