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Envolée des prix : un casse-tête quotidien pour les familles dans la précarité 

Nathalie confie que les difficultés ont commencé avec la Covid-19.
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Avec la récente flambée des prix en raison de l’inflation, les familles vivant dans la précarité peinent à faire bouillir la marmite. Nourrir les enfants et couvrir les dépenses est devenu un véritable casse-tête. Elles sont condamnées à faire des sacrifices et changer leurs habitudes. Nathalie, une mère de famille, s’est confiée au Défi Plus.

Il est 17 heures. Dans sa maison à Stanley, Nathalie* est devant les fourneaux. Faute de pouvoir acheter une boîte de tomates et d’autres ingrédients en raison de la récente flambée des prix, elle prépare un « riz roussi ».  Dans une caraille noircie par le temps, elle fait brouiller cinq œufs, ajoute du riz et du soja et mélange le tout avec une spatule. C’est le repas du soir qu’elle partagera autour d’une table avec son mari et ses trois enfants âgés de 8, 6 et 4 ans. 

C’est le seul repas que la petite famille peut se permettre dans un contexte où les prix de diverses denrées ont augmenté. « Tou kitsoz inn vinn ser. Pe gagn bocou difikilte pou aste manze. Mo mari ek mwa, nou pe bizin trase ek aste seki nou kapav », confie d’emblée Nathalie. Celle-ci, âgée de 29 ans, travaille comme bonne à tout faire depuis quatre mois. Avant, elle était femme au foyer et s’occupait de ses enfants, mais en ces temps difficiles, elle a dû trouver un travail afin de contribuer aux dépenses de la maison. 

Entre-temps, son mari, Alain, 39 ans, rentre du boulot. Maçon, il n’a pas de travail fixe et cumule ainsi les petits boulots. « Depi premie confinman, nou dan dife. Kan pena travay, mo ale balye kot ban dimoun pou gagn enn ti kas pou aste manze pou mo fami. Avek tou zafer ki pe monte en ce moman,  pe vinn pli difisil », nous confie-t-il. Dans le contexte actuel, il ne peut plus même faire de sorties avec sa famille ou acheter des vêtements pour ses enfants. « Zot linz pe sere... Nou pa pe kapav fer nanien parski nou lame anba ros. Nou pe ser sintir pou kapav debat. Mwa ek mo madam nou bizin aste zis ban zafer prioiter e kontrol nou depans », renchérit le père de famille, d’une voix triste. 

Ce que confirme Nathalie. Dans le passé, ils faisaient des sorties en famille, mais la venue de la Covid-19 a tout bouleversé. Dès lors, leur quotidien est devenu difficile, puis a empiré avec la récente inflation. Elle confie que leurs salaires et l’allocation de Rs 2 400 qu’elle perçoit, étant sur le Social Register of Mauritius, ne suffisent pas pour joindre les deux bouts. Leurs revenus mensuels s’élèvent à Rs 11 000. Après avoir réglé ses factures d’électricité et d’eau de Rs 1 000 et Rs 300 respectivement et une mensualité de Rs 1 500 à CIM Finance, plus un « cycle » de Rs 1 000, il lui reste très peu pour les autres dépenses. « Kan pou ariv nou tour sa larzan sit la pou ed nou fer enn de depans e ranz twa nou lakaz ki extra koule kan ena lapli », dit-elle. 

« Laviann la pa koze »

Cette famille bénéficie de l’Internet gratuit grâce à un plan de la National Empowerment Foundation pour les besoins éducatifs de ses enfants. Toutefois, Nathalie doit trouver Rs 500 toutes les semaines pour acheter des légumes et le pain et payer les frais de transport, dont les prix ont été revus à la hausse. 

Après avoir tout réglé, il ne reste au couple que Rs 1 500 pour les courses. « Avan nou ti pe al Dream Price pou aste komisyon. Aster nou al dan enn laboutik. Ek sa kass la, nou pa gagn gran zafer. Nou bizin aste zis lesansiel », soutient Nathalie. Auparavant, elle pouvait se permettre d’acheter du poulet en plus des denrées de base, mais tel n’est plus le cas. Comme le prix du poulet a également augmenté, elle se contente d’acheter de temps en temps des ailes pour faire un cari.  « Laviann la pa koze. Pa aster la ki pou kapav aste. La nou pe manz somon ou sardinn... Tou seki pli bomarse », poursuit-elle. Elle ne va plus au supermarché et ne fait plus la chasse aux produits en promotion pour éviter de faire des dépenses inutiles.

Sa liste de courses se rétrécit de plus en plus. Elle se compose uniquement de deux bouteilles d’huile, de deux sachets de lait, d’une boîte de beurre, de céréales pour les enfants, de boîtes de conserve, de grains secs, d’un sachet de riz et d’autres produits essentiels. « Nou fek apran ki delwil ek dile inn vinn ankor pli ser. Deza kas nou pena kas pou aste kitchoz, aster kouma pou fer pou ki nou zanfan pa al dormi san manze. Bondie kone », lâche Nathalie. Celle-ci ne cache pas que souvent, elle est en larmes face à la situation précaire de sa famille. 

Comme Nathalie et sa famille, il y en a d’autres dans la localité qui connaissent le même sort. « Ena zour gagn enn ti bred ou enn ti legim. Ek sa bizin de repa. Enn pou aswar ek enn pou kapav manze ledemin », soutient-elle. 

Nous constatons ainsi que sa famille ne peut pas se payer le luxe de faire trois repas par jour. Dans ce cas, comment leurs enfants vont-ils pouvoir grandir sainement ? Nathalie explique que grâce au soutien de Roxanne Ramsamy de l’ONG En100ble, ses enfants bénéficient au quotidien d’un petit-déjeuner composé de céréales et de lait. Pour le déjeuner à l’école, ils reçoivent un pain fourré et du jus. « Sa enn gran ed pou nou. Lerla aswar, mwa ek mo mari nou trase pou zot dine », indique-t-elle. 

Nathalie souhaite que les autorités considèrent vivement à baisser quelques prix afin de permettre aux familles qui vivent dans la précarité de se nourrir en ces temps difficiles.


Offrir un petit-déjeuner et déjeuner pour 15 enfants à Stanley 

Une quinzaine d’enfants de Stanley bénéficient de l’aide de l’ONG.
Une quinzaine d’enfants de Stanley bénéficient de l’aide de l’ONG.

Offrir un petit-déjeuner et un déjeuner à 15 enfants de Stanley tous les matins, telle est la nouvelle mission de Roxanne Ramsamy, membre de l’ONG En100ble. Elle explique que cette démarche est importante pour que les enfants issus des familles qui vivent dans la précarité puissent se rendre à l’école le ventre rempli. Selon elle, bon nombre de parents n’ont pas les moyens d’envoyer leurs enfants à l’école tous les jours. « Ena pena kas pou donn zot zanfan manze ou ena avoy enn par enn lekol. Pou ki sa ban zafan la pa penalize, noun vinn avek sa prozet la », indique-t-elle. 

Toute personne, dit-elle, qui souhaite contribuer à cette initiative, peut faire des dons de céréales, de lait, de confiture, de beurre et de boîtes de conserve à l’ONG.


Panier ménager de Nathalie : aperçu du coût de 10 produits avec l’inflation 

Comme Nathalie a expliqué, elle ne dispose que de Rs 1 500 pour faire ses courses qu’elle effectue à la boutique du coin. Avec les récentes augmentations occasionnées par la fin des subsides, le nombre de produits qu’elle peut acheter avec un tel budget se réduit comme une peau de chagrin.

En tenant compte de la hausse de prix, elle a besoin de Rs 1 041 pour acheter 10 aliments. Avec la somme de Rs 459 restante, il lui reste à peine de l’argent pour acheter du thé, des céréales, ainsi que des produits d’hygiène, entre autres.

provisions illustation tableau
Aliments  Somme à débourser (avant) Aliments Somme à débourser (désormais)
2 sachets de lait  Rs500 2 sachets de lait Rs550
1 boîte de saumon  Rs38 1 boîte de saumon Rs48
1 sachet de dholl Rs23 1 sachet de dholl Rs30
1 boîte de petit pois  Rs20 1 boîte de petit pois  Rs40
1 sachet de farine Rs26 1 sachet de farine Rs26
5 nouilles instantanées Rs35 5 nouilles instantanées Rs50
2 bouteilles d’huile  Rs112 2 bouteilles d’huile  Rs214
1 boîte de sardines  Rs 18,50 1 boîte de sardines Rs28
1 petite boîte de beurre  Rs33 1 petite boîte de beurre  Rs55
10 yaourts  Rs180 10 yaourts  Rs260
Total  Rs 805,50 Total  Rs1,041

Hausse des demandes de crédit auprès des boutiquiers 

Illustation boutiquier

Cela fait une trentaine d’années qu’Anita tient une boutique dans sa localité. Jadis, elle donnait des provisions à crédit à ses clients qui n’ont pas les moyens, mais, en ce moment, elle ne le fait plus. Toutefois, elle fait exception pour les clients réguliers qui soldent toujours leurs comptes. 

« Avec la flambée des prix, les demandes de crédit augmentent tous les jours, surtout des familles qui vivent dans la précarité. Bon nombre d’entre elles ont des enfants. Cela me déchire le cœur de refuser, mais il y a de mauvais payeurs. Certains ne me donnent que Rs 100 ou Rs 200 après des mois, tandis que d’autres disparaissent et je ne sais pas s’ils vont revenir », dit-elle. Son carnet affiche en ce moment plus d’une cinquantaine de personnes qui lui doivent de l’argent. 

* Prénoms modifiés

 

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