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Descente aux enfers : une vie brisée par la drogue, la prostitution et le VIH

Mélanie est en quête d'une nouvelle vie.

À 36 ans, Mélanie (nom fictif) a déjà connu plus de souffrances et de désespoir que la plupart des gens n'en vivront jamais au cours de leur existence. Cette femme, autrefois pleine de rêves et d’espoirs, a vu sa vie basculer dans un tourbillon de drogue, de prostitution, et de maladie, jusqu'à être diagnostiquée séropositive. Son histoire, marquée par des choix difficiles et des circonstances tragiques, est un témoignage déchirant des réalités cruelles auxquelles elle fait face chaque jour.

Née dans un quartier modeste, à Karo Kalyptis, Roche-Bois, Mélanie a grandi avec des parents dépassés par la vie. Les tensions à la maison éclataient rapidement, aggravées par des vies déjà marquées par la difficulté quotidienne. 

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Son père, un toxicomane et récidiviste notoire, faisait le va-et-vient entre le domicile familial et la prison. Depuis plus de 20 ans, il a quitté ce monde. Sa mère a refait sa vie après l’avoir abandonné ainsi que ses deux frères, encore adolescents à l’époque, chez une tante. Parmi ces derniers, l’un est décédé après une overdose et l’autre, également toxicomane, est en prison.

Une rencontre toxique

Mélanie rêvait de devenir infirmière. Elle avait un cœur grand et aimait aider les autres. Au collège, les moqueries de ses camarades à cause de sa situation financière fragilisèrent peu à peu son estime de soi. Adolescente, elle se sentait isolée, mal dans sa peau, et luttait pour se trouver une place jusqu’à la Grade 9 où elle abandonne ses études.

À 18 ans, Mélanie tombe amoureuse d’un homme de dix ans son aîné. Elle voit en lui un sauveur, quelqu’un qui pourrait l’aider à fuir la pauvreté et le chaos familial, mais cette relation se révèle rapidement toxique. 

Son compagnon, qui était déjà plongé dans la drogue, l’entraîne dans ses excès. Ce qui commence par de simples cigarettes se transforme en addiction à des substances plus dures comme l'héroïne. « Mo ti santi mwa kontan, mo ti santi ki enn dimoun finn aksepte mwa. Mo ti krwar ki ladrog ti pe fer mwa vinn pli for, mo ti pe kapav siport tou », confie-t-elle. Mais c’était une utopie, car en réalité chaque dose la plongeait un peu plus dans un enfer dont elle ne pouvait plus se sortir.

La spirale de la prostitution

L’addiction ne tarde pas à épuiser leurs maigres ressources. Son compagnon, devenu de plus en plus violent et manipulateur, pousse Mélanie à vendre son corps pour financer leur consommation. À 19 ans, elle fait ses premiers pas dans la prostitution, une activité qui l’anéantit psychologiquement, mais qu’elle voit comme une nécessité pour survivre. « Mo pa ti ena lot swa. Toulezour, mo ti dir mwa ki sa ti pou dernie fwa, me lavi ti tro dir, e anvi ladrog ti tro for. Fodre mo trouv kas vit-vit », se remémore-t-elle, avec douleur. 

Peu à peu, la jeune femme perd tout contact avec sa famille. Sa mère, dévastée en découvrant que sa fille est tombée dans la prostitution, essaie désespérément de l’aider. Cependant, malgré ses efforts, Mélanie refuse de quitter cette vie. La honte, le déni et l’addiction sont plus forts que l’amour maternel. « Mo pa finn ekout, mo mama plizier fwa finn fer tou pou tir mwa dan sa move lavi-la. Me li ti tro difisil pou mwa », avoue notre interlocutrice.

Le choc du diagnostic

Les années passent et Mélanie s’enfonce davantage dans son cauchemar. Elle explique qu’elle ne choisit pas ses clients. Auparavant, c’était des marins taïwanais et aujourd’hui, des travailleurs étrangers, notamment des Bangladais. Son corps porte les marques de l’épuisement. À 30 ans, après avoir souffert d’infections fréquentes et de douleurs persistantes, elle consulte un docteur. Après des examens médicaux, le verdict tombe : elle est séropositive. « Kan mo finn aprann ki mo ena VIH, mo santi koumadir mo pe mor andan. Li ti koumadir tou seki monn andire pann servi a nanye », se souvient-elle. 
Contre toute attente, ce diagnostic, loin de l’encourager à changer, la plonge encore plus dans la drogue, une fuite désespérée de la réalité.

La solitude et le rejet

Le VIH est un coup dur non seulement pour sa santé, mais aussi pour son travail de prostituée. Beaucoup de ses clients habituels l’abandonnent après avoir appris son état. Isolée, sans argent, et rejetée par la société, Mélanie sombre dans une profonde dépression. « Mo pa ti ena personn. Bann dimoun ki ti pe apel mwa zot kamarad, zot tou finn tourn ledo. Mem sa ki ti pe vann ladrog pa tile trouv mwa ankor », ajoute-t-elle avec amertume. La société, déjà cruelle avec les plus démunis, devient implacable avec une femme atteinte du VIH, rejetée à cause de la stigmatisation et des préjugés.

Une lueur d’espoir ?

Malgré tout, Mélanie tente de trouver une forme de rédemption. Aujourd'hui, elle suit un traitement antirétroviral pour contrôler son VIH, mais son combat contre la drogue est loin d’être terminé. Elle a tenté à plusieurs reprises de suivre des programmes de désintoxication dans des centres dirigés par des ONG, mais les rechutes sont fréquentes. Elle est actuellement sur le programme de méthadone. 

Consciente que chaque jour est un défi, elle espère encore pouvoir se libérer de ses démons. « Mo pa kapav retourn deryer, me mo anvi krwar ki kapav sanz, ki kapav trouv lape andan », dit-elle avec une résignation mêlée d'espoir. Sa santé reste fragile, et les séquelles de sa vie chaotique sont visibles, mais pour elle, l’important est de continuer à se battre, même si le chemin est semé d’embûches.

L’histoire de Mélanie est celle d'une vie brisée par des choix malheureux, mais aussi par une société qui ne laisse que peu de place à la rédemption pour ceux qui tombent. Son parcours, marqué par la drogue, la prostitution et la maladie, est un triste reflet des réalités que vivent de nombreuses Mauriciennes qui sont dans la même spirale.

 

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