Les candidats aux prochaines élections générales devront-ils déclarer leur appartenance ethnique ? Si la Constitution n’est pas amendée, c’est ce qui risque de se produire.
«Well, I say I am not willing, but this again is my opinion, Madam Speaker. We have to discuss in Government, there might be other views, but my opinion… » Cette réponse du Premier ministre et ministre des Finances, Pravind Jugnauth, le mardi 26 mars, sur la possibilité d’avoir recours à un mini-amendement afin d’autoriser les candidats à ne pas déclarer leur appartenance ethnique aux prochaines élections générales, laisse perplexe.
Observateurs et acteurs politiques s’accordent à dire que si le chef du gouvernement décide de maintenir cette position et de n’avoir recours à aucun amendement, cela constituera un important recul. Les proches collaborateurs de Pravind Jugnauth s’accordent à dire que si la question de déclaration d’appartenance ethnique préoccupe autant l’opposition, ses membres gagneraient à voter en faveur du projet de loi sur la réforme électorale qui a été mis en veilleuse l’année dernière. « Cette question de déclaration d’appartenance ethnique a été abordée dans le projet de loi qui a été présenté l’année dernière. Si ce texte est voté, il annulera à tout jamais l’obligation de déclarer son appartenance ethnique lors d’une élection générale », avance un collaborateur de Pravind Jugnauth.
L’opposition, en particulier le Mouvement militant mauricien, a eu l’occasion d’en finir avec cette question, mais elle s’est exprimée contre. Il faut cesser d’être hypocrite ou capricieux sur une question d’importance nationale », fait ressortir cette même source.
Recul pour le pays
Reza Uteem, député du MMM, soutient, pour sa part, que si le Premier ministre décide de se montrer inflexible sur cette question, « ce sera un vrai recul pour le pays », sans compter que Maurice risque, selon lui, de se voir taxer de statut de « rogue nation ». « Il ne faut pas oublier qu’en n’amendant pas la Constitution sur la déclaration d’appartenance ethnique, Maurice est en train de faire fi des observations d’une haute instance internationale comme le Comité des droits humains des Nations Unies », explique-t-il.
Le constitutionaliste, Milan Meetarbhan, qui a également pris note de la réponse de Pravind Jugnauth, avance que le chef du gouvernement ne semble pas fermer la porte à un vote du projet de loi sur la réforme électorale. « En politique, tout peut arriver. On peut toujours avoir une alliance qui décide de voter en faveur du projet de loi sur la réforme électorale », souligne-t-il. L’avocat est aussi d’avis que la réforme électorale doit être discutée dans sa globalité. Toutefois, ajoute-t-il, si le gouvernement ne parvient pas à trouver un consensus, il faudra inévitablement adopter la même mesure intérimaire que celle de 2014, c’est-à-dire un mini-amendement qui ne s’appliquerait qu’aux prochaines élections générales.
Ashok Subron, de Rezistans ek Alternativ, ne mâche pas ses mots à l’encontre de Pravind Jugnauth. « Après avoir fait de belles déclarations sur l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur les Chagos, la déclaration de Pravind Jugnauth, au Parlement, indique qu’il compte violer le ‘pronouncement’ du United Nations Human Rights Committee », a-t-il déclaré. Selon lui, l’État mauricien doit trancher sur cette question d’appartenance ethnique lors des prochaines élections générales, en raison de son adhésion à l’Optional UN Protocol. « Pourquoi le Royaume-Uni doit-il respecter Maurice, si le gouvernement mauricien décide de faire fi d’une décision d’une haute instance comme le Comité des Nations unies sur les droits humains. Pravind Jugnauth se doit de donner une explication officielle à ce sujet », dit-il.
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