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Charles Guimbeau : dans l’ombre et la lumière du père

Le nouveau CEO du Groupe Saint Aubin jongle entre traditions familiales et ambitions modernes. Entre défis financiers et responsabilités humaines, il trace sa route avec lucidité et détermination.

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À 35 ans, il incarne la nouvelle génération d’entrepreneurs mauriciens. Nouveau CEO du Groupe Saint Aubin, Charles Guimbeau tente de redonner souffle et modernité à un groupe familial bicentenaire, longtemps en difficulté. Entre la mémoire de son père Eric, la passion du terroir et une vision tournée vers l’avenir, il trace une nouvelle page de cette saga mauricienne, où courage et héritage cohabitent avec contraintes et responsabilités parfois écrasantes. 

Lorsqu’il arpente les allées du Domaine de Saint Aubin, au sud de l’île, Charles Guimbeau ressent le poids d’une longue lignée d’hommes et de femmes dévoués à la terre. Le groupe incarne une partie de l’histoire agricole et touristique du pays, avec ses domaines emblématiques – Saint Aubin, Bois Chéri et Les Aubineaux.

« C’est une immense responsabilité, mais aussi une grande fierté », confie-t-il, le regard posé sur les champs de canne baignés de lumière. « Ce lieu a plus de deux cents ans d’histoire. On ne dirige pas seulement une entreprise, on veille sur un patrimoine, sur des hommes et des femmes qui ont donné leur vie pour que tout cela continue d’exister. » 

Lorsque Charles rejoint l’entreprise familiale après avoir travaillé dans la finance en France, le groupe traverse une période délicate. Les chiffres sont dans le rouge, et l’avenir incertain. « Pendant plus de dix ans, c’était très difficile », se souvient-il. « Mon père Eric a dû se battre pour redéfinir notre stratégie, réinvestir dans nos opérations, repenser nos structures. Il fallait beaucoup de courage, de patience et de foi. » 

Je sais qu’il me regarde, qu’il m’accompagne. Mon objectif est d’être à la hauteur de ce qu’il a construit»

Charles, qui entre dans la tempête à ses côtés, n’a jamais douté, mais le chemin est semé d’obstacles avant que le Groupe Saint Aubin retrouve une stabilité relative. « Aujourd’hui, on peut dire qu’on est passé au vert. Nos opérations sont consolidées, nos marques reconnues, et surtout, notre équipe soudée. » D’ailleurs, insiste-t-il, « le succès du groupe, c’est avant tout le fruit d’une équipe. Certains employés sont ici depuis quatre ou cinq générations. C’est une immense reconnaissance pour nous ».

La figure de son père reste une référence. Homme respecté, Eric Guimbeau incarnait l’équilibre entre rigueur et humanité. « J’ai travaillé cinq ans à ses côtés. Ce furent les cinq années les plus formatrices de ma vie. J’ai appris sa façon de gérer, son attention au détail, mais surtout son sens du contact humain. Il connaissait chaque employé par son prénom, et il était toujours disponible pour écouter, comprendre, et trouver des solutions. » 

Cette pédagogie et cette approche, il tente de les perpétuer, tout en devant composer avec les exigences modernes de l’entreprise. « Il m’a appris que diriger, ce n’est pas imposer. C’est inspirer. » 

Sous sa direction, le Groupe Saint Aubin adopte de nouvelles stratégies : modernisation des infrastructures, digitalisation, expérience client renforcée. De nouveaux produits voient le jour, de nouvelles collaborations se tissent, et la marque Saint Aubin s’impose désormais comme une référence locale d’excellence artisanale. 

« Ma génération a grandi avec Internet, la rapidité, la numérisation. On doit amener cette énergie dans nos entreprises », explique-t-il. « Je crois à l’innovation, mais je crois surtout à l’innovation qui a du sens », précise-t-il. « Innover, c’est respecter l’esprit d’un lieu tout en le faisant évoluer avec son époque. »

Le Groupe a egalement renforcé ses initiatives durables : réduction des déchets, valorisation des sous-produits de la canne, circuits courts, et promotion d’un tourisme écoresponsable. « On a une responsabilité vis-à-vis des générations futures. »

Aujourd’hui, le groupe Saint Aubin est un acteur majeur de l’économie mauricienne, avec un chiffre d’affaires annuel de plus de Rs 600 millions. Ses domaines – rhum artisanal à Saint Aubin, thé à Bois-Chéri, mémoire aux Aubineaux – incarnent savoir-faire et culture. « Ces lieux racontent une histoire », dit Charles. 

« Celle d’un pays, d’un savoir-faire, d’une culture du goût et de l’hospitalité. »

Entre modernité et tradition, Charles Guimbeau trace sa route avec lucidité. « Créer de l’emploi, de la valeur, du sens : c’est ça, entreprendre. » Dans son bureau, une photo de son père veille sur lui. « Je sais qu’il me regarde, qu’il m’accompagne. Mon objectif est d’être à la hauteur de ce qu’il a construit. Et surtout, de continuer à faire vivre cette belle histoire familiale, avec le même amour, la même sincérité, et la même passion. »

Le souvenir du père

Le souvenir de son père reste très présent, jusque dans les moindres détails de son quotidien. Sa moto, encore garée dans le garage familial, est un symbole précieux. « Nous la gardons comme un souvenir de lui. C’était un homme charismatique, passionné, bon et profondément attaché à son pays. »

Des ambitions politiques

Fils d’un homme engagé dans la vie publique, Charles nourrit également l’envie d’un engagement citoyen futur. « Depuis petit, j’étais souvent à ses côtés sur le terrain. J’ai vu la politique autrement : non pas comme un pouvoir, mais comme un service. Mon père disait toujours qu’un bon politicien, c’est celui qui met un sourire sur le visage des gens. Et qu’il faut le faire par conviction, pour aider les autres. »

Aujourd’hui, absorbé par ses responsabilités, il ne s’y consacre pas encore. Mais demain, oui, il y pense. « J’aimerais un jour pouvoir contribuer, à ma manière, au développement de mon pays. Être proche des Mauriciens, écouter, agir. C’est quelque chose qui m’inspire profondément. » 

Sa famille, ses passions

Avec Maria, son épouse rencontrée en France, ils viennent d’accueillir une petite fille de six mois. « Devenir père m’a encore plus responsabilisé. On regarde le monde différemment. On veut bâtir quelque chose de durable, transmettre de bonnes valeurs. »

Malgré un emploi du temps chargé, Charles tient à préserver des instants de calme : livre, musique, balade dans la nature. 

Et s’il n’avait pas choisi la voie des affaires ? Charles aurait aimé être footballeur professionnel. Grand passionné d’Arsenal, il suit encore les matchs quand il le peut. « Le football, c’est l’école du collectif. Et finalement, une entreprise, c’est un peu comme une équipe : il faut savoir jouer ensemble, accepter la diversité des talents, et viser la même direction. »

 

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