L’émission « Au cœur de l’info » du mercredi 29 septembre 2021, animée par Jane Lutchmaya et Prem Sewpaul, était dédiée à Air Mauritius. Leur invité était l’ancien ministre des Finances et spécialiste de l’aviation, Rama Sithanen. Ce dernier voit d’un très mauvais œil la création d’une super structure pour intégrer la compagnie aérienne.
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Rama Sithanen considère que la compagnie nationale d’aviation est essentielle pour l’économie mauricienne. C’est pourquoi il est vital qu’elle soit bien gérée et surtout sans ingérence politique. « Air Mauritius représente 50 à 55 % des touristes qui viennent à Maurice, voire 100 % sur des routes telles que l’Inde, l’Australie et Hong Kong. C’est un pilier pour l’industrie du voyage et du tourisme, surtout que ce secteur compte pour 25 % du produit intérieur brut et 25 % des emplois du pays. La compagnie internationale, étant le principal transporteur, joue aussi un rôle primordial pour la zone franche et le secteur de l’exportation. Puis, Air Mauritius est aussi extrêmement importante pour les entrées des devises, car 80 à 85 % de ses recettes sont en devises qui restent à Maurice. Tel n’est pas le cas pour les autres transporteurs aériens qui desservent le pays », a-t-il déclaré.
Selon l’ancien ministre des Finances, la somme de Rs 12 milliards injectée par le gouvernement dans Air Mauritius n’est pas suffisante. « La première chose qu’il faut faire est de recapitaliser Air Mauritius », a-t-il ajouté. Rama Sithanen a également indiqué qu’il n’est pas surpris par le fait que la compagnie d’aviation se soit retrouvée embourbée dans un marasme financier. Une situation qui ne peut pas être imputée qu’à la pandémie de Covid-19. « Il faut être honnête. La direction a fait des erreurs stratégiques, sans oublier sa surpolitisation par tous les régimes. Ensuite, il y a eu le hedging qui a eu un impact financier conséquent, plus l’achat des avions à un prix trop élevé, ainsi que le corridor Afrique / Asie qui a été un désastre », a-t-il fait remarquer.
L’aspect humain mis de côté
Rama Sithanen reconnait que les administrateurs ont fait un assez bon travail en prenant les mesures nécessaires : rationaliser les dépenses, renégocier avec les créanciers pour faire baisser les dettes de façon substantielle et vendre des avions. Toutefois, il déplore leur attitude, qu’il juge brutale, envers les employés. Certains ont subi des coupures de salaires, d’autres se sont vus imposer des congés sans solde et le travail à temps partiel.
En parlant d’avions, l’ex-argentier trouve que la réduction de la flotte est une bonne idée, mais dit craindre que les six gros-porteurs restants ne soient pas nécessairement les plus adaptés par rapport aux destinations que desservira la compagnie. Pour lui, il faudrait négocier avec Airbus pour qu’il reprenne certains de ces appareils afin qu’Air Mauritius obtienne des A321 en retour qui sont mieux adaptés pour desservir la région en termes de coûts.
Sous la coupe du gouvernement ?
Rama Sithanen se montre très critique par rapport à la création d’Airport Holdings Ltd. Cette dernière regroupera Air Mauritius, AML, ATOL et Mauritius Duty Free Paradise (MDFD). « Mettre en place cette mégastructure pour intégrer Air Mauritius est une très mauvaise idée. Air Mauritius évolue dans un monde extrêmement compétitif alors que l’aéroport et MDFP sont en situation de monopole. La prise de décision pour des compagnies en monopole et une compagnie qui est en compétition sont fondamentalement différentes ». Avec ce nouveau système, le CEO de MK sera redevable envers son « board ». Celui-ci sera lié à Airport Holdings Ltd, qui, à son tour, sera redevable envers le gouvernement. « On cherche vraiment des problèmes. C’est la recette pour le désastre ».
Il est d’avis que Air Mauritius doit être le maître du jeu et disposer des sources de revenus additionnelles afin de garantir des entrées d’argent diverses. « Il ne fallait surtout pas l’intégrer dans une structure où ce sera plus difficile de prendre des décisions ».
Au sujet de la nomination de Ken Arian, en tant que CEO d’Airports Holding Ltd, Rama Sithanen doute des capacités du « senior advisor » du Premier ministre. « Il faut mettre toutes les chances de notre côté. Pour cela, il est nécessaire de faire appel à des personnes qui maîtrisent l’aviation, qui ont des compétences managériales, un parcours professionnel impeccable et qui sont des meneurs d’hommes et de femmes. Est-ce qu’il pourra faire ça. Je n’en suis pas très sûr. Est-ce que Ken Arian va tirer les ficelles ? Cette nomination est une très mauvaise décision à mon avis ».
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