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Zouberr Joomaye, porte-parole du National Committee sur la Covid-19 : «La levée de la quarantaine n’est pas d’actualité»

Auprès de quel laboratoire Maurice a-t-il passé ses commandes pour les vaccins anti-Covid-19 ? Qui sera vacciné en priorité ? Doit-on s’attendre à la réouverture prochaine des frontières ? Des questions auxquelles Dr Zouberr Joomaye, porte-parole du National Committee sur la Covid-19, a apporté des éléments de réponse lors de l’émission Au Cœur de l’Info axée sur les perspectives 2021. Une émission animée, le mercredi 6 janvier, par Eshan Dinally et Jane Lutchmaya. 

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Les détails du programme vaccinal connus en fin de semaine 

zouberrUn Working Group du ministère de la Santé travaille sur le programme vaccinal. Un plan sur les modalités du programme et les délais pour la vaccination (Ndlr : le vaccin se fait en deux doses) et qui sera vacciné est en train d’être élaboré. Le plan sera défini en fin de semaine/début de la semaine prochaine. « Nous suivons le ‘schema’ traditionnel. La priorité sera accordée aux frontliners : le personnel de la Santé, de l’aéroport et des hôtels », indique Dr Zouberr Joomaye. 

À la question si le vaccin sera gratuit, il indique que c’est le gouvernement qui prendra la décision. « Un fonds sera mis en place. Je pense que le vaccin sera gratuit », a-t-il ajouté. S’agissant du transport et de la conservation des vaccins, le Dr Joomaye précise que Maurice peut conserver le vaccin AstraZeneca. « S’agissant de Pfizer, qui exige une conservation de moins de 70 à 80 degrés, le laboratoire a fait ses recommandations pour un congélateur au moment de la commande », explique-t-il, tout en ajoutant que « le pays est prêt pour la vaccination » et que « le gouvernement met tous les moyens qu’il faut à cet effet ». 

Vaccins : des commandes passées auprès de l’OMS et de quatre laboratoires 

  • OMS : Maurice a signé, il y a quelques mois, un accord avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), pour obtenir des vaccins lui permettant de couvrir 20 % de la population en termes de doses. « Cela représente environ 250 000 doses », précise Dr Zouberr Joomaye. Quand obtiendra-t-on ces doses ? Le porte-parole du National Committee sur la Covid-19 précise que l’OMS doit avant tout accréditer le vaccin avant de fournir les pays. Chose qu’elle n’a pas encore faite. 
  • Laboratoires : Depuis environ un mois, Maurice a envoyé des Expressions of interest pour obtenir des vaccins avec quatre producteurs de vaccins : Pfizer, AstraZeneca, Moderna, le laboratoire russe. « Pour le vaccin chinois et celui que produit l’Inde, les négociations se font de pays en pays », ajoute Zouberr Joomaye. Les négociations avec les quatre laboratoires, soutient-il, sont en cours. « Nous commençons à avoir des retours d’information de ces laboratoires », indique-t-il, tout en précisant que c’est le Premier ministre qui communiquera les détails si le pays obtient des vaccins d’un de ces laboratoires. Il a aussi souligné que le Premier ministre a l’intention d’avoir des vaccins pour couvrir 60 % de la population en vue de créer une ‘herd immunity’. 

En chiffres 

  • 950 Mauriciens rapatriés depuis la fermeture des frontières jusqu’à la phase d’ouverture. 
  • 10 000 personnes sont rentrées à Maurice depuis l’autorisation des vols commerciaux sur Paris, La Réunion, l’Inde et Dubaï depuis le 3 octobre. 

Covid-19 : huit cas importés détectés en quarantaine

Huit nouveaux cas importés de la Covid-19 ont été enregistrés à Maurice, ce mercredi 6 janvier. 

Il s’agit de trois hommes, un en provenance de France et deux qui sont arrivés du Kenya, et de cinq femmes, elles aussi venant du Kenya. Les personnes contaminées au coronavirus sont âgées entre 21 et 26 ans. Selon nos informations, leur état de santé est jugé stable. Ces huit arrivants ont été admis à l’hôpital ENT à Vacoas, comme le veut le protocole. Le nombre de cas actifs passe ainsi à 15. À savoir que 1 130 personnes sont actuellement en quarantaine.

Pas de risque

Dr Zouberr Joomaye est catégorique. « La levée de la quarantaine n’est pas d’actualité. Le monde souffre. Rien qu’en Angleterre, il y a eu 60 000 cas de Covid-19 en un jour. Si nous n’avons pas connu de deuxième vague, c’est en raison de notre intransigeance sur la quarantaine malgré les pressions pour la réouverture des frontières », fait-il ressortir. Pour le porte-parole du National Committee sur la Covid-19, la sécurité sanitaire du pays passe avant tout. « Comme dit le Premier ministre, tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. On ne prendra aucun risque », martèle-t-il.

Surtout, qu’en rouvrant les frontières, ajoute-t-il, nous risquons de nous retrouver comme en mars 2020, avec le confinement et la menace d’un mort dans chaque famille et une pression énorme sur les services de santé. « Ne prenons pas le risque ! Nous sommes conscients que le tourisme souffre, mais la quarantaine a permis d’avoir 150 000 nuitées. Le secteur touristique doit se repenser et revoir son offre. Le gouvernement est en train de faire sa part, notamment en proposant le Premium Visa. Le vaccin sera un outil, s’il est efficace, pour relancer le tourisme et l’industrie des voyages », a-t-il ajouté. 

VITE DIT 

  • Le vaccin n’est pas imposé, c’est à la personne de choisir si elle veut être vaccinée ou pas, a souligné Dr Zouberr Joomaye. 
  • Zouberr Joomaye note un relâchement en termes de gestes barrières notamment dans les régions côtières. Ainsi, ajoute-t-il, la loi sera appliquée de la manière la plus rigoureuse, car le risque est toujours là. 
  • « Le virus sera présent pendant un bon bout de temps. Notre espoir en 2021 est que le vaccin protège les Mauriciens qui vont à l’étranger et ceux qui viennent à Maurice », ajoute Dr Joomaye. 

Sen Ramsamy, consultant en tourisme : «Il faut limiter la quarantaine à 10 jours pour certains pays» 

sen« Vaccin ou pas, les touristes ne vont pas se bousculer pour venir à Maurice », prévient Sen Ramsamy, consultant en tourisme. D’où son insistance pour ne pas « se croiser les bras ». « La mutation du virus prolonge l’incertitude économique. On parle aujourd’hui de troisième vague. Il faut une stratégie de relance. Or, à ce jour, nous n’avons aucune vision pour relancer le tourisme. Il n’y a pas de Tourism Recovery Plan, contrairement à nos concurrents tels que les Seychelles, le Singapour, les Maldives, Dubaï. C’est inquiétant ! », avance-t-il. 

D’où sa proposition pour venir de l’avant avec une ‘targeted restriction’. « Plusieurs pays sont en train d’alléger les restrictions afin d’accueillir des touristes. Aux Maldives, ils ont accueilli 550 000 visiteurs en 2020. Nous devons renforcer le contrôle pour certains pays et l’alléger pour d’autres, en limitant la quarantaine à dix jours seulement. C’est une question de survie économique. Nous devons cibler les visiteurs d’Afrique et d’autres pays tels que Dubaï et le Singapour et les inciter à venir à Maurice pour faire du business », recommande-t-il. 

Pour Sen Ramsamy, l’Afrique est un immense marché pour Maurice. « C’est une opportunité que nous devons saisir. C’est l’occasion de revoir notre offre touristique et notre programme de formation. Il faut que le gouvernement et le secteur privé réunissent les compétences pour trouver des solutions », fait-il ressortir.  

Pas d’innovation des opérateurs  pour être résilients

Il a aussi égratigné au passage le manque d’innovation de l’industrie touristique qui continue à vendre le soleil, la mer et la plage. « Les recettes touristiques sont passées de Rs 64 milliards en 2018 à Rs 62 milliards en 2019. Ce qui démontre que le tourisme était en déclin bien avant la Covid-19. Depuis la pandémie, les hôteliers ont pu survivre grâce à la clientèle mauricienne, mais les écoles et le travail reprennent. Il faut trouver des solutions », insiste-t-il.  Un point de vue partagé par les deux autres invités. 

Sen Ramsamy a aussi précisé que ce n’est pas le moment « d’ajouter des petites crises dans des grandes crises ». « Ces crises (Wakashio, manifestation, etc.) auraient pu être évitées », soutient-il, tout en déplorant que les visiteurs n’ont accès qu’à des hôtels 5-étoiles sur le site de la Mauritius Tourism Promotion Authority (MTPA). « Qu’en est-il des 4-étoiles, 3-étoiles ? », a-t-il conclu. 


Guillaume Hugnin, président de la MCCI : «Nous attendons toujours une décision sur la réouverture des frontières»

guillaumeGuillaume Hugnin, président de la Mauritius Chamber of Commerce and Industry (MCCI), est catégorique. « La reprise en 2021 sera très difficile et dépendra de plusieurs facteurs : l’ouverture du ciel et les arrivées touristiques. Nous sommes toujours dans l’attente de la décision qui sera prise à ce sujet », a-t-il déclaré. 

Pour le président de la MCCI, 2021 sera caractérisée par des difficultés, mais aussi par des opportunités. « Nous n’opérons pas en vase clos et sommes une économie ouverte. Nous allons devoir faire face à toutes sortes de difficultés », appréhende-t-il. Cependant, poursuit-il, la Covid-19 a aussi été une source d’opportunités pour la production locale qui se développe, même si la consommation est moindre. 

Pour Guillaume Hugnin, les maîtres-mots cette année doivent être : minimiser les dépenses, différer les projets tout en assurant les investissements essentiels. Et cela s’applique à la fois aux ménages, aux entreprises et au gouvernement. Il craint cependant que les opérateurs touristiques vont devoir s’endetter davantage cette année. 

À une question sur la « pression exercée » pour la réouverture des frontières, Guillaume Hugnin réplique : « Qui parle de pression ? Ce n’est que le point de vue des opérateurs touristiques qui ne font qu’exprimer leurs opinions. Aux Maldives, à titre d’exemple, l’ouverture a été un succès alors que ce n’est pas le cas pour les Seychelles  ». Pour le président de la MCCI, le dialogue doit primer. « Les opérateurs du privé et le gouvernement doivent penser en dehors de la boîte. Le gouvernement est le décideur et c’est lui qui décide », a-t-il ajouté. 

S’agissant de la réforme de la pension, Guillaume Hugnin avance : « nous sommes tous dans le même bateau. Le chef d’entreprise, tout comme le gouvernement, a ses propres responsabilités. Chacun exprime son point de vue. Nous sommes chanceux à Maurice que le dialogue soit très ouvert et franc. Certes, il y a des moments où les opinions diffèrent, mais chacun exprime son point de vue ». 

Il a aussi parlé de bonne gouvernance en insistant sur la neutralité, l’indépendance et la vigilance en vue d’assurer une bonne gestion ainsi que la survie des compagnies privées et étatiques. « Nous savons tous que chaque gouvernement place ses gens dans des organisations. Politiser ou pas, la crainte est là », a-t-il résumé, en arguant qu’il faut respecter le profil précis pour ces postes.


Dr Vinaye Ancharaz, économiste : «La reprise sera lente et retardée»

vinayLe Dr Vinaye Ancharaz, économiste, ne mâche pas ses mots sur la situation économique. « Il ne faudra pas s’attendre à des miracles cette année. L’incertitude, qui est amplifiée par la mutation du virus, est le plus gros risque. La reprise sera lente et retardée », prévient-il. Et d’ajouter : « on s’attend à une croissance de 9 % cette année. Mais, les derniers développements, malgré le vaccin, soulèvent des points d’interrogation. Les prévisions sont à prendre avec des pincettes ».

Comment s’en sortir ? La solution, selon le Dr Vinaye Ancharaz, est de miser sur des secteurs à fort potentiel tels que l’agriculture, l’économie bleue, la ‘digital economy’, la sécurité alimentaire, entre autres.

L’économiste a aussi fait le point sur la situation dans le tourisme. « Une des raisons derrière la dépréciation de la roupie est que le tourisme n’apporte plus de devises dans le pays. Par ailleurs, l’industrie n’a pas innové et le pays est perçu en Afrique comme étant une destination « lune de miel ». Or, c’est le moment ou jamais de miser sur le tourisme vert et durable », préconise-t-il. 

Il a aussi tapé sur les doigts du secteur privé. « Le secteur privé reste dans sa zone de confort.  Ce qui explique le manque de diversification économique. Le secteur privé privilégie les activités aux risques mesurés. Il va investir dans l’immobilier et non dans la manufacture par exemple.

La création des ‘schemes’ dans l’immobilier est venue aussi en partie créer une distorsion de l’incitation économique », déplore-t-il.  

 

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