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Un des plus gros soucis des entreprises - Manque de liquidités : comment résoudre le problème 

Les entreprises doivent absolument couper les coûts et revoir leur modèle.

Depuis la crise, la plupart des entreprises doivent composer avec une baisse drastique de la demande. Un facteur qui impacte négativement leur niveau de liquidités. Afin d’assurer la pérennité de leurs opérations, elles se voient contraintes de réduire leurs coûts, d’emprunter auprès des banques ou encore de se restructurer. Pour les analystes, il est clair que la situation risque d’empirer dans les mois à venir si leur trésorerie continue à s’assécher.

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Les raisons 

53 % des entreprises interrogées dans le cadre d’un sondage de Business Mauritius et de Statistics Mauritius disent que le manque de liquidités est l’un de leurs principaux défis depuis le début de la pandémie de Covid-19. Pour Prashant Calcutteea, Senior Partner chez RSM Mauritius, la principale raison derrière le problème de cash-flow a été l’arrêt des activités pendant la Covid-19 et la reprise graduelle par la suite. « Durant cette période, les entreprises ont dû s’acquitter de leurs coûts fixes alors qu’il n’y a pas eu, voire peu de rentrées d’argent. Du coup, leur niveau de liquidités s’est asséché. Par ailleurs, la baisse de la demande et du pouvoir d’achat est venue affecter la situation », explique notre interlocuteur. Ce n’est pas Amit Bakhirta, fondateur et CEO d’Anneau, qui dira le contraire. « La liquidité concerne celle des flux de trésorerie. L'absence relative de celui-ci serait causée par une baisse des revenus résultant d'une chute des ventes. Habituellement, cela peut également s'accompagner d'une plus faible liquidité de devises, les banques commerciales ayant à un moment donné resserré l'offre de devises dans notre économie », soutient notre interlocuteur.

Il y a, un excès de liquidités sur le marché. Donc, il y a de l’argent. Le problème, c’est que le robinet est fermé."

Paul Perrier, CEO de Fundkiss, abonde dans le même sens. « La Covid-19 a eu l’effet d’une onde de choc. La fermeture des frontières et l’arrêt des arrivées touristiques ont eu un impact majeur sur l’économie. Les grands groupes hôteliers ont ainsi enregistré des pertes significatives dans leurs recettes, tout comme les PME et les entrepreneurs de l’industrie qui ont vu leurs contrats être annulés ou diminués », souligne-t-il. Par ailleurs, la dépréciation de la roupie vis-à-vis du dollar et de l’euro a rendu les importations plus chères. « Cela a eu des répercussions sur les prix et le pouvoir d’achat. Les consommateurs se montrent aujourd’hui plus raisonnables avant de faire des dépenses. Résultat : les ventes ont diminué », souligne Paul Perrier. 

L’adaptation 

Dans ce contexte de crise, les entreprises sont dans l’obligation de s’adapter. « Il est logique que quand il y a moins ou pas de rentrée d’argent, on doit alors absolument couper les coûts et revoir le modèle d'entreprise. Ceci est essentiel pour survivre à la nouvelle normalité. Il y a toute une réflexion à faire sur cette problématique », souligne Prashant Calcutteea. Ainsi, dans cet élan, explique-t-il, certaines entreprises ont fermé des départements et d’autres ont diminué certains coûts pour s’aligner sur la baisse des revenus. « Plusieurs compagnies ont opté pour l’externalisation d’une partie de leurs fonctions pour mieux contenir leurs coûts, alors que d’autres ont revu leur méthode de financement », indique-t-il. 

Doit-on craindre une aggravation de la situation au niveau de la trésorerie des entreprises ? Et, par conséquent, une augmentation du nombre de cas d’entreprises placées en administration cette année si l’impact de la crise se fait sentir sur la durée ? « Il semble que c’est l’hôtellerie qui est le secteur le plus affecté par la Covid-19.  Il faut aussi savoir que certaines compagnies étaient déjà dans une situation difficile avant la pandémie et elles ont été davantage fragilisées par la suite. Si celles-ci continuent à voir leur cash-flow être absorbé, on risque de se trouver avec plus de demandes pour des administrations judiciaires. Ce sera en tout cas inévitable dans l’hôtellerie », fait ressortir Prashant Calcutteea.

« Indubitablement, il faudra s’attendre à une hausse des cas d’entreprises placées en administration. C'est exactement pourquoi la Banque de Maurice et les banques commerciales devraient garantir que les mécanismes de transmission monétaire sont efficaces et qu'il y ait suffisamment de liquidités dans le système. Cependant, il faut aussi différencier les entreprises qui étaient déjà faibles et mal gérées avant la crise », ajoute, pour sa part, Amit Bakhirta.

Solution vs frilosité 

Face à l’assèchement de leur niveau de liquidités, la solution qui s’impose aux compagnies est de se tourner vers les banques et autres institutions financières pour avoir du cash à un taux d’intérêt bas. Or, déplorent certaines entreprises, les institutions financières traditionnelles se montrent peu enclines à prendre des risques et de nombreux dossiers ne sont pas approuvés. « Le taux d’intérêt est bas et devrait le rester pendant encore une ou deux années. Il y a, par ailleurs, un excès de liquidités sur le marché. Donc, il y a de l’argent. Le problème, c’est que le robinet est fermé. Les institutions traditionnelles ne veulent pas prendre de risques », observe Paul Perrier. « Ce n’est pas une question que les banques veulent prendre moins de risques ou approuvent moins de dossiers. Elles sont  juste vigilantes quant à la solidité et au bilan financier des entreprises qui les approchent pour emprunter de l’argent. Ceci en raison d’un manque de visibilité dans le contexte actuel », commente, pour sa part, Prashant Calcutteea. Par ailleurs, ajoute-t-il, bien souvent, ces entreprises sont lourdement endettées et il n’y a pas plus d’espace pour leur prêter de l’argent. Quant à Amit Bakhirta, il fait ressortir que malgré les perceptions, l'extension du crédit aux ménages privés a augmenté de 3,6% de décembre 2019 à octobre 2020, tandis que la croissance totale du crédit a été de 1,7% sur la même période. « Nous ne devons donc pas surdramatiser la situation. D’ailleurs, des mesures ont été prises par la Banque de Maurice pour continuer à soutenir la croissance du crédit pour les ménages privés et les entreprises privées. En une année de crise, un montant décent de croissance du crédit va combler les trous de revenus construits par le confinement et le ralentissement de l’activité économique. Ceci dit, à partir d'août, la croissance du crédit d'un mois à l'autre avait commencé à diminuer, ce qui se traduisait en partie par le resserrement des liquidités auquel nous faisons face », explique Amit Bakhirta. 

Outre le recours aux institutions financières, d’autres options existent. Pour Prashant Calcutteea, les programmes de prise de participation au capital des entreprises à travers des mécanismes comme les fonds d’investissement ou des business angels sont un moyen de combler le manque à gagner et d’alléger le niveau des dettes, surtout pour les PME, dont la capacité d’emprunt est souvent limitée par faute de garanties. À la question de savoir si une des solutions à la frilosité des banques serait que le gouvernement prenne la décision de garantir les prêts comme cela se fait notamment au Royaume-Uni, Amit Bakhirta estime que « sélectivement, ce serait très utile ». Prashant Calcutteea évoque, quant à lui, le risque que le niveau d’endettement de l’État n’augmente avec ce type de mesure. « Dans le contexte actuel, ce n’est pas une solution à contempler, à moins que le Fonds monétaire international ne revoie les critères définissant la cote d’alerte pour le niveau de la dette publique », conclut-il.   

Financement participatif : Fundkiss reçoit plus de 1 000 demandes depuis la pandémie de Covid-19 

Depuis la pandémie de Covid-19 à ce jour, Fundkiss a reçu plus de 1 000 demandes pour des prêts. « Nous recevons pas mal de demandes, car les entrepreneurs cherchent des alternatives, avec les institutions traditionnelles qui refusent les demandes ou qui prennent trop de temps à les approuver », souligne Paul Perrier, qui s’attend à un plus grand intérêt pour le financement participatif dans ce contexte de crise. Ainsi, des investisseurs prêtent directement de l’argent aux entreprises, à travers la plateforme Fundkiss. « Ce faisant, ils aident les entreprises à avancer et font tourner l’économie. Cet argent sert à couvrir tous les besoins des entreprises, que ce soit en termes de ‘working capital’, de projet de développement, de ‘supply chain’ et d’acquisition de machines, entre autres », indique notre interlocuteur. Le montant des prêts accordés est de l’ordre de Rs 50 000 à Rs 3 millions. La période de remboursement est de 3 à 60 mois. « Il y a un retour sur investissement de 10% par an pour les investisseurs sous forme d’intérêts. Et pour les entreprises, le point majeur est qu’elles n’ont pas de garantie ni de caution personnelle à fournir. La demande se fait en ligne et ne prend que cinq minutes », ajoute le CEO de Fundkiss.

Restructuration : les diverses stratégies 

Comment les entreprises doivent-elles restructurer leurs opérations pour diminuer leurs coûts afin de combler le manque à gagner ? Pour Amit Bakhirta, il existe un certain nombre de stratégies avec des nuances en fonction de l'industrie et de la taille de l'entreprise. « Mais techniquement, une entreprise devrait être en mesure de resserrer sa structure de coûts variables ainsi que sa structure de coûts fixes et d'augmenter ou d'injecter des capitaux propres et aussi de la dette bon marché à long terme, le cas échéant », soutient-il. Dans tous les cas, poursuit notre interlocuteur, l'accent doit également être mis sur les revenus. « Dans la mesure du possible, il faut trouver d'autres sources de revenus. Dans d'autres cas, les fusions et acquisitions peuvent être une alternative plus durable à plus long terme », conclut Amit Bakhira.

 

 

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