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Smartphone, tablette, réseaux sociaux...enfants hyperconnectés, conséquences démultipliées

La génération Alpha passe en moyenne quatre heures sur les médias sociaux.
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Une nouvelle étude publiée par Morning Consult aborde l’utilisation des réseaux sociaux et du streaming vidéo dès l’âge de quatre ans. En effet, les smartphones et les tablettes sont devenus la drogue numérique des enfants, ce qui n’est pas sans conséquences. Le point. 

Cela fait des années maintenant que des études mettent en avant l’utilisation croissante de smartphones et de tablettes par des enfants de plus en plus jeunes. Alors que les adolescents plus âgés (13-17 ans) passent leur temps sur les réseaux sociaux, d’autres, plus jeunes, parfois même âgés de moins de cinq ans, se délectent de vidéos en streaming. Ce phénomène prend de l’ampleur, au grand désarroi des parents qui éprouvent des difficultés à déconnecter leurs enfants de leur monde virtuel.

Ancy R. est une mère stricte quant à l’utilisation de la tablette par son fils, Hriday, qui est âgé de cinq ans. Bien qu’elle lui ait donnée un de ces appareils, elle estime que ce n’est pas une bonne pratique. 

« Je suis convaincue que les parents qui parviennent à ne pas donner de téléphone portable ou de tablette à leurs enfants ont une chance incroyable. Les experts et les thérapeutes le conseillent également : évitez de leur donner accès à ces appareils, car ils risquent de devenir accros et de perdre le sens de la socialisation », rappelle cette maman d’une trentaine d’années. 

Dans son cas, lorsqu’elle est occupée, la tablette est parfois le seul moyen de divertir son fils. « C’est pourquoi j’essaie de limiter son utilisation en instaurant des règles claires. Par exemple, je lui propose de gagner du temps sur la tablette en accomplissant des tâches correctement. C’est une forme de récompense pour lui », souligne Ancy R. 

Elle pense que ce n’est pas réaliste d’éliminer complètement l’utilisation de la tablette. Et si elle concède que Hriday a beaucoup appris grâce à sa tablette, elle veille toutefois à restreindre son accès à des contenus inappropriés, dont YouTube. « Nous privilégions plutôt des activités éducatives comme des jeux d’association, du coloriage ou même du chant. » Elle se désole toutefois qu’il n’interagit pas autant qu’elle le voudrait avec son entourage. 

 Eugénie est, elle, une maman désemparée face aux caprices de ses enfants devenus « accros » de leur portable. Sa fille est âgée de 12 ans alors que son fils a huit ans. « Ma fille est très distraite lorsqu’elle utilise son téléphone portable. Elle ne se concentre même pas sur ses devoirs. Mon fils est très capricieux si on refuse de lui donner son portable. Ma fille a réussi à faire un sevrage du téléphone portable, mais pour mon fils, c’est plus difficile », raconte-t-elle. 

Addiction maladive

La mère de famille poursuit qu’avec son époux, ils ont établi une limite de 30 minutes par jour pour l’utilisation du téléphone portable. « Ils doivent finir leurs devoirs et faire tout ce qu’ils ont à faire. Nous ne leur permettons pas d’utiliser leur téléphone portable au lit. Au cas contraire, ils vont abuser du temps d’utilisation et cela a un impact sur le sommeil », dit Eugénie, qui affirme de plus que le portable n’est pas autorisé quand les enfants sont à l’école. 

Dans un entretien à ce propos quelques mois de cela, le sociologue Ibrahim Koodoruth expliquait que la société moderne est confrontée à une « addiction maladive » à Internet. « Internet est devenu une partie intégrante de notre vie quotidienne, et les jeunes sont constamment exposés à une multitude d’activités en ligne, telles que regarder des films, des séries et d’autres divertissements. » Selon lui, « l’engouement pour les smartphones a conduit à une dépendance croissante, parfois même maladive, chez les jeunes qui ne savent pas toujours où tracer la ligne entre une utilisation saine et excessive ». 

Et comme ils ne savent pas toujours comment gérer l’équilibre entre leur vie en ligne et leur vie hors ligne, cela les rend de plus en plus dépendants d’Internet. « Cette dépendance à Internet peut conduire à une atomisation de la société, où autrefois les jeunes se regroupaient en groupes sociaux pour passer du temps ensemble en personne. Aujourd’hui, la tendance est à la vie centrée sur soi et sur l’utilisation de smartphones », avait-il ajouté. 

Pour le sociologue, les parents qui donnent des smartphones et tablettes à leurs enfants et leur accordent une liberté excessive dans leur utilisation sont fautifs. « La pandémie de COVID-19 a encore renforcé cette tendance à l’addiction, car les mesures de distanciation sociale et les restrictions de mouvement ont poussé les gens à se tourner davantage vers Internet pour le divertissement et la communication », estimait Ibrahim Koodoruth.

Parents responsables et études impactées

Le pédagogue Jacques Malié parle de l’utilisation excessive des dispositifs électroniques comme un « fléau » répandu dans toutes les écoles. « Les parents, en tant que premiers éducateurs, sont souvent tenus pour responsables de cette situation, car ils fournissent ces outils à un très jeune âge dans le but d’obtenir un peu de tranquillité, mais cela entraîne souvent une addiction chez les enfants. »

Jacques Malié affirme que cette addiction se traduit par des échanges interminables et des heures indues passées sur des groupes WhatsApp, ce qui a pour conséquence une baisse globale des performances académiques. « Les devoirs prennent beaucoup plus de temps que prévu, ce qui conduit à une diminution du temps consacré à la lecture et à une baisse de la qualité de l’orthographe. Certains élèves justifient même le besoin de cours en ligne, bien qu’il y ait un abus délibéré de la part des utilisateurs », croit-il. 

Jacques Malié souligne que bien que les écoles prennent des mesures pour décourager l’utilisation de ces dispositifs en classe, le contrôle est difficile en raison du nombre élevé d’élèves et de la complicité des parents. « Il est impératif de maintenir une surveillance constante et de mettre en place des politiques strictes pour lutter contre ce fléau au niveau des écoles », souligne-t-il.

Conçus pour créer une addiction 

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Didier Sam Fat.

Le consultant en cybersécurité et réseau Didier Sam Fat explique que les réseaux sociaux et les plateformes de streaming sont conçus de façon à attirer et à retenir l’attention des utilisateurs de manière très efficace, et cela constitue un phénomène très grave. « Les réseaux sociaux et les jeux vidéo utilisent des algorithmes sophistiqués pour maximiser l’attention des utilisateurs sur leurs applications, créant ainsi un environnement où l’utilisateur est constamment incité à rester connecté », fait-il comprendre.

Didier Sam Fat déclare que ce désir constant d’attention provoque la libération de dopamine, l’hormone du bonheur, dans le cerveau, ce qui peut conduire à une véritable addiction, notamment chez les enfants qui commencent très tôt à utiliser des tablettes. « Cette addiction peut avoir des conséquences graves sur le neurodéveloppement des enfants, pouvant même entraîner des crises d’épilepsie et d’autres maladies liées à une utilisation excessive des écrans », avertit-il. 

Selon le consultant en cybersécurité et réseau, l’exposition à la lumière bleue émise par les écrans affecte également le sommeil et la concentration, ce qui peut aggraver les problèmes liés à l’addiction. Il cite aussi le fait que les adultes ne sont pas épargnés par ce phénomène d’addiction, et de nos jours, tout le monde semble être constamment connecté à leurs appareils électroniques.

« Avant l’avènement des smartphones, les gens socialisaient principalement en personne, mais aujourd’hui, la plupart des interactions sociales se déroulent en ligne. Cela crée un véritable phénomène d’addiction, où les individus passent de plus en plus de temps sur les réseaux sociaux et les plateformes de streaming, au détriment de leur vie sociale réelle », se désole-t-il. 

Pour contrer ce phénomène, Didier Sam Fat recommande aux parents de mettre en place des restrictions sur l’utilisation des appareils mobiles, en limitant l’accès aux réseaux sociaux et aux plateformes de streaming, et en encourageant plutôt l’utilisation de jeux éducatifs qui stimulent l’imagination et la créativité dans le monde réel.

Impacts de cette dépendance

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Siddick Maudarbocus, addictologue.

Selon l’addictologue Siddick Maudarbocus, l’addiction aux écrans présente de sérieux dangers pour la santé des enfants. Alors que l’utilisation excessive des médias en ligne augmente, les activités physiques sont en baisse, ce qui est particulièrement préoccupant à un jeune âge où le mouvement est essentiel pour le développement mental et physique.

« Lorsque les enfants passent leur temps sur leurs appareils mobiles, la consommation rapide de boissons et d’aliments sucrés entraîne une augmentation du taux de sucre, augmentant le risque de diabète à un jeune âge et d’obésité infantile due à la surconsommation en ligne », prévient-il. 

Le Dr Maudarbocus ajoute que le cerveau s’adapte au monde virtuel au détriment du monde réel, ce qui entraîne une diminution de l’importance accordée à la vie réelle et une confiance accrue au virtuel. « Les enfants se réfugient dans des mondes virtuels créés pour eux, créant une zone de confort virtuelle qui les éloigne des efforts physiques et mentaux nécessaires dans la vie quotidienne. »

L’addiction, rappelle-t-il, commence souvent par de petites doses, mais devient plus importante avec l’âge, et une fois établie, il est difficile de s’en défaire sans passer par un processus de désintoxication. « Les parents sont souvent blâmés car en accordant à leurs enfants une liberté excessive avec les appareils électroniques, ces derniers ne participent pas activement aux activités qui auraient dû être prioritaires. »

L’addictologue met en avant les conséquences de cette addiction qui sont nombreuses : des troubles du sommeil, affectant la capacité de concentration et de mémorisation, des cycles de sommeil perturbés et une baisse de la productivité et de l’humeur. « Les parents doivent établir des limites strictes, en fixant la durée quotidienne d’utilisation et en imposant une coupure après 20 heures pour éviter les perturbations du sommeil à cause de la lumière bleue », conseille-t-il.

Vijay Ramanjooloo : « Les jeunes préfèrent se réfugier dans le monde virtuel plutôt que d’affronter la réalité »

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Vijay Ramanjooloo, psychologue.

Le psychologue, Vijay Ramanjooloo, souligne que tout ce qui est excessif n’est pas bon. L’addiction se manifeste par différents signes et symptômes, suivant un « pattern » similaire à celle à l’alcool ou à la cigarette.

« Lorsqu’une personne devient accro, la technologie numérique devient alors une partie exclusive de sa vie, ce qui augmente les risques de problèmes physiques et mentaux. Les enfants sont particulièrement vulnérables, avec des troubles de comportement, un retard dans le développement moteur, du langage et des troubles du sommeil », fait-il remarquer. 

L’utilisation excessive des smartphones crée un monde virtuel où la vraie vie est mise de côté. 

« Cela a un impact sur la génération Alpha, qui rencontre des troubles relationnels et de socialisation. Elle préfère se réfugier dans le monde virtuel plutôt que d’affronter la réalité, trouvant plus d’intérêt et de facilité à interagir avec des amis virtuels qu’à développer des relations dans la vie réelle. »

Vijay Ramanjooloo précise que les statistiques confirment cette tendance inquiétante. De ce fait, le psychologue est d’avis qu’il est nécessaire, encore une fois, de tirer la sonnette d’alarme pour sensibiliser à ces problématiques et prendre des mesures pour protéger la santé mentale et le bien-être des enfants et des jeunes générations.


La génération Alpha passe jusqu’à quatre heures sur les réseaux sociaux

La génération Alpha, composée d’enfants âgés de huit à dix ans, est fortement impliquée dans les activités numériques au quotidien. C’est ce qui ressort d’une étude de Morning Consult publiée le 11 mars dernier.

Environ 54 % des parents estiment que leurs enfants de cette tranche d’âge passent jusqu’à quatre heures par jour sur les réseaux sociaux, un pourcentage similaire à celui de la génération Z.

L’étude de Morning Consult fait aussi ressortir que contrairement à 56 % des adolescents de la génération Z (âgés de 13 à 17 ans), 55 % des enfants de 8 à 10 ans consacrent jusqu’à quatre heures quotidiennes aux réseaux sociaux. Cependant, elle révèle également que 33 % des enfants de 8 à 10 ans ne fréquentent jamais les réseaux sociaux, tandis que 41 % des adolescents de 13 à 17 ans y passent plus de quatre heures chaque jour. Ainsi, même les plus jeunes Nord-Américains grandissent avec une présence significative des médias sociaux.

Selon les résultats de l’étude, seulement 22 % des enfants de moins de quatre ans et 17 % des enfants de 5 à 7 ans y consacrent moins d’une heure par jour. Ce qui démontre que le streaming vidéo est devenu la norme pour la génération Alpha.

Dans son rapport, Morning Consul souligne qu’environ la moitié des parents interrogés déclarent que leurs enfants regardent du contenu sur des plateformes de streaming vidéo au moins une fois par jour, un pourcentage supérieur à celui consacré à la lecture de livres (40 %) ou aux jeux vidéo (37 %). Parmi les plateformes les plus populaires figurent YouTube, Disney+ et Netflix.

Bien que les médias sociaux ne figurent pas parmi les trois activités préférées des enfants Alpha, ils gagnent en importance chez les enfants âgés de 8 à 10 ans, juste après le streaming vidéo et les jeux vidéo, indique Morning Consult.

Les plus jeunes internautes ont en moyenne cinq ans

jeuneSelon les statistiques sur les technologies de l’information et de la communication (TIC) - 2022 de Statistics Mauritius, des enfants de cinq utilisent un téléphone mobile. Voici quelques chiffres :

  • En 2020, environ 91 % des personnes âgées de cinq ans et plus utilisaient un téléphone mobile, contre environ 88 % en 2018. 
  • 46,8 % des personnes âgées de cinq ans et plus utilisaient un ordinateur, contre 49,6 % en 2018.
  • Les jeunes, en particulier ceux de la tranche d’âge de 12 à 29 ans, sont plus susceptibles d’être des utilisateurs d’ordinateurs que les plus âgés, comme en 2018.
  • 67,7 % des personnes âgées de cinq ans et plus étaient des utilisateurs d’Internet, contre 60,1 % en 2018.
  • Environ 95 % des jeunes de la tranche d’âge de 12 à 29 ans utilisaient Internet en 2020, contre environ 91 % en 2018.
 

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