Le 24 octobre 2025, le monde a célébré la Journée internationale des artistes. Profitant de cette occasion, le Directeur des Poursuites Publiques, Me Rashid Ahmine, a consacré son « newsletter » d’octobre 2025, aux divers aspects de notre culture et à la manière dont nos lois la protègent.
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Dans son éditorial, Me Nataraj Muneesamy, Assistant du Directeur des Poursuites Publiques (DPP), indique : « Les artistes sont de véritables gardiens de notre patrimoine. Ils jouent un rôle essentiel dans la préservation de notre culture, mais, malheureusement, leur contribution n’est pas toujours reconnue ou suffisamment valorisée. Les artistes femmes, en particulier, sont exposées à des violences (sexuelles) et à des formes imperceptibles de harcèlement. Hélas, nos lois ne se concentrent pas nécessairement ni suffisamment sur ces aspects de la vulnérabilité des femmes ».
Selon l’avocat, porter atteinte à la culture ou la détruire constitue une véritable attaque, non seulement contre une personne, mais aussi contre de vastes communautés. « Les actes de vandalisme sur le Morne n’affectent pas seulement les randonneurs, mais causent une profonde tristesse à tous les Mauriciens », souligne Me Nataraj Muneesamy.
La culture d’un pays est son véritable ADN : elle englobe l’ensemble des aspects et des complexités de son identité»
Il a fait état d’un acte inapproprié récent commis par un touriste sur le site sacré de Grand Bassin, rappelant combien la culture peut être profanée par de tels comportements irrespectueux. L’avocat évoque également le vol audacieux commis récemment au Musée du Louvre, à Paris, qui, selon lui, n’a pas seulement touché les citoyens français, mais marqué les esprits à travers le monde.
Pour l’homme de loi, nos textes législatifs s’efforcent de protéger la culture sous toutes ses formes. Cependant, des lacunes subsistent. Il précise que la culture d’un pays est son véritable ADN : elle englobe l’ensemble des aspects et des complexités de son identité. La culture, explique-t-il, ne se limite pas à ce qui est tangible -bâtiments, monuments historiques, œuvres d’art ou artefacts - mais comprend également l’immatériel : les arts du spectacle tels que la musique, les chants, la danse, la poésie, le théâtre et l’art dramatique, ainsi que les pratiques sociales, les rituels et les festivals.
« Elle n’appartient ni à une seule personne ni à une élite. Au contraire, elle est accessible à tous, indépendamment de l’origine ou de l’éducation. En clair, la culture est omniprésente et universelle », conclut-il.
Les droits accordés aux artistes
Me Hansinee Devi Purseed, Temporary State Counsel, a évoqué les principaux droits accordés aux artistes musicaux à travers le droit d’auteur.
- Droits économiques : section 6 du Copyright Act.
- Droits moraux : section 7 du Copyright Act.
- Conformément à la section 15(1) du Copyright Act 2014, la durée du droit d’auteur dure toute la vie de l’auteur et pendant une période de 70 ans après son décès.
- Toute personne qui, sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur ou de la Mauritius Society of Authors (MASA), vend, distribue ou reproduit des œuvres protégées par le droit d’auteur, en vertu de la section 56 du Copyright Act 2014, commet une infraction.
- En cas d’une première condamnation, elle est passible à une amende d’excédant pas Rs 300 000 et d’une peine de prison maximale de deux ans.
- En cas de récidive, la personne risque une amende ne dépassant pas Rs 500 000 et d’une peine d’emprisonnement de pas plus de huit ans.
- En parallèle, la section 21 du Cybercrime and Cybersecurity Act 2021 stipule une infraction pénale en cas de non-autorisation et prévoit les mêmes sanctions.
Les expressions culturelles traditionnelles et folkloriques
Me Yanish Jeerasoo, State Counsel, s’est, quant à lui, penché sur les « expressions culturelles traditionnelles » et les « expressions du folklore », telles que définies par le Copyright Act 2014. La question essentielle, dit-il, est de savoir si ces expressions devraient bénéficier d’un régime de protection juridique distinct. « Plusieurs de nos homologues africains ont entrepris des réformes législatives (…) », indique-t-il, citant le Kenya et le Nigéria.
Selon lui, l’enjeu est de taille pour Maurice : un régime efficace de protection des droits collectifs renforcerait le contrôle sur notre patrimoine culturel commun et favoriserait des échanges culturels respectueux. En revanche, une mise en œuvre défaillante pourrait avoir des conséquences néfastes.
Protéger le processus de création culturelle
De son côté, Me Rajeenee Segobin-Kalachand, Senior State Counsel, a abordé la question de l’appropriation culturelle. Elle a rappelé qu’en 2003, Maurice a ratifié la Convention de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel.
Aux termes de cette Convention, cinq domaines du patrimoine immatériel sont identifiés, dont l’artisanat traditionnel. Ce domaine, souligne l’avocate, concerne spécifiquement les compétences et connaissances liées à l’artisanat, plutôt qu’aux produits eux-mêmes, et vise à encourager les artisans à produire et à transmettre leurs savoir-faire au sein de leurs communautés.
Cependant, elle note qu’un obstacle majeur à la protection de l’artisanat traditionnel réside dans la question de la paternité des produits : « Les compétences artisanales font souvent partie d’un savoir transmis de génération en génération. Il n’existe donc pas d’auteur individuel, mais une implication collective d’une communauté dans la pratique artisanale. Il s’agit d’une spécificité que le droit devrait prendre en compte, car la notion de paternité est floue dans ces cas. Une identification communautaire de l’origine du produit serait plus réaliste ».
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