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Progression économique : mention bien, mais peut mieux faire

Maurice fêtera ses 55 ans d’indépendance le dimanche 12 mars.

Ce dimanche 12 mars marquera les 55 ans de l’indépendance de Maurice. Pour autant, avec une grande dépendance à l’importation, l’économie locale est loin d’être indépendante. Idem pour les institutions qui, depuis des années, sont fortement critiquées. Quant au produit intérieur brut (PIB), après la pandémie de Covid-19, s’il renoue avec la croissance, celle-ci reste relative. 

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Maurice célèbrera le 55e anniversaire de son accession à l’indépendance le dimanche 12 mars 2023, à la fin de cette semaine. L’économie locale a fait du chemin depuis 1968. Quelques années après l’indépendance, entre 1983 et 1991, le pays a enregistré une moyenne de progression de 6,1 %, dont une croissance de 8,3 % en 1987, 6,2 % en 1988, 4,6 % en 1989 et 7,3 % en 1990. Quant au produit intérieur brut (PIB), il est passé de Rs 841 millions en 1968 à Rs 485 milliards en 2018. 

Selon Lindsay Rivière, observateur politique et économique, la diversification de l’économie a été décisive. « Maurice est sorti d’une économie basée sur la monoculture. Il y avait la volonté et le besoin de se diversifier avec une base agricole et industrielle. Il y a eu l’avènement du secteur touristique, du secteur financier, de l’offshore et de tout ce qui vient avec. Le plus marquant a été la diversification industrielle qui avait commencé dès 1966. ». 

Croissance de 7,3 % en 1990 à 5 % en 2023 

L’économiste Sudesh Lallchand explique que l’évolution de la croissance à Maurice est caractéristique des pays en voie de développement. La croissance d’un pays baisse à mesure qu’il se développe, jusqu’à être plafonnée à un certain niveau. « C’est la philosophie de l’économie. Le Japon, la France, le Royaume-Uni ou encore les États-Unis ont des croissances annuelles de 2 à 2,5 %, voire de 1 %. C’est la progression des pays développés. La croissance est donc moindre pour un pays dont l’économie est mature. »

Maurice a connu une croissance moyenne de 3 à 4 % durant la décennie qui a précédé la pandémie de Covid-19. Sudesh Lallchand est d’avis que l’économie locale aurait pu mieux faire. Avec une contraction de 14,9 % en 2020, le PIB de Maurice a chuté par rapport à 2019. Tenant compte de la faible base sur laquelle le calcul de la croissance est effectué après la crise de la Covid, Sudesh Lallchand soutient qu’une croissance de 7 % en 2023 serait un bon chiffre. Pour cela, il faudrait que les investissements consentis dans le pays aient des effets multiplicateurs. 

La dépendance de l’économie locale

En l’an 2000, le déficit commercial était estimé à Rs 14 milliards. Selon les chiffres de Statistics Mauritius, il s’élève à Rs 190 milliards en 2022. C’est là un facteur qui, selon Lindsay Rivière, influe sur la croissance durable, alors que le pays dépense beaucoup pour l’importation du pétrole. Sudesh Lallchand souligne, pour sa part, que 80 % de notre nourriture provient de l’étranger. « C’est utopique de penser que nous pourrons avoir une économie indépendante », dit-il. 

La dépendance de l’économie mauricienne au monde extérieur n’a pas été sans conséquence ces dernières années. La Covid-19 a mis le tourisme à genou, alors que les prix ont grimpé de manière exponentielle en raison de la guerre en Ukraine. « Nous ne serons pas épargnés par les répercussions des différents événements qui frappent l’économie mondiale. C’est le phénomène de la mondialisation et de la globalisation. Notre secteur financier, connecté à l’extérieur, a aussi été affecté par l’inclusion de Maurice sur la liste grise du Groupe d’action financière et la liste noire de l’Union européenne », poursuit Sudesh Lallchand.

Nouveaux secteurs

Différents secteurs se sont développés à Maurice depuis 1968, comme le textile, la pêche, le tourisme ou encore les services financiers. Aujourd’hui, Lindsay Rivière place beaucoup d’espoir dans l’économie bleue. « Maurice est entouré par des millions de kilomètres carrés d’océan. Sans le développement de nouveaux secteurs, on va stagner. L’industrie pharmaceutique est également un secteur à fort potentiel en Afrique. Il y aussi le transbordement, le bunkering ou encore la bijouterie. Nous devons continuer d’innover et de nous diversifier dans des secteurs d’avenir », dit-il. 

Indépendance des institutions

Depuis l’indépendance, plusieurs institutions ont été mises en place avec des mandats et des missions bien spécifiques. Le pays compte des institutions majeures comme la commission anticorruption, la police, la Financial Intelligence Unit, la Banque de Maurice, la Financial Services Commission ou encore la Mauritius Revenue Authority. Or, certaines d’entre elles font l’objet de critiques régulières depuis des années. Pourquoi ? Selon Sudesh Lallchand, hormis la justice et la MRA, il y a eu une dégradation de la bonne gouvernance au sein des institutions. « C’est du jamais-vu et cela a un impact sur notre économie. Ce n’est pas le rôle de ces institutions de produire de la richesse, mais elles sont là pour s’assurer que les bonnes conditions prévalent pour attirer des investissements et augmenter la richesse. Il y a au contraire des problèmes de fraude et la perception de corruption. Je ne dis pas que les institutions fonctionnaient bien auparavant, mais c’était relativement mieux que maintenant », soutient l’économiste. La bonne gouvernance des institutions est suivie de près par les agences internationales, à l’instar de Moody’s, qui a d’ailleurs rétrogradé la notation de Maurice à Baa3 l’année dernière.

Dette publique

Quelle conclusion peut-on tirer de l’évolution de la dette publique après 55 ans d’indépendance ? Lindsay Rivière déplore, davantage que le niveau actuel de la dette, les opportunités que Maurice n’a pas su saisir pour l’exportation et l’économie bleue. Pour sa part, Sudesh Lallchand assure qu’une dette publique actuellement à quelque Rs 500 milliards fait mal à l’économie mauricienne. Il souligne qu’un tel niveau est inédit. « En 2023, 35 % de notre revenu issu de la taxe, soit Rs 53 milliards, seront utilisés par le gouvernement pour le remboursement de la dette publique et des intérêts. Il faudra déduire ce montant du revenu fiscal total de Rs 150 milliards environ. Ce remboursement se fait sur le dos des consommateurs et c’est un crime », s’inquiète l’économiste. Avant 2014, la dette publique était d’environ Rs 300 milliards.  

Un bref passage au rang de pays à revenu élevé 

En juillet 2020, notre pays avait accédé au statut d’économie à revenu élevé. Maurice est cependant revenu au rang de pays à revenu intermédiaire (tranche supérieure) en 2021, en raison des conséquences de la pandémie de Covid-19.

 

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