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Plateformes numériques « Streaming » taxé : la facture s’alourdit pour les abonnés mauriciens

À partir du 1er janvier 2026, les services de streaming étrangers seront soumis à une TVA de 15 %, rendant Netflix, Spotify et autres plateformes plus coûteux pour les consommateurs mauriciens.

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Regarder des séries ou écouter de la musique sur des plateformes comme Netflix ou Spotify coûtera bientôt plus cher. Le gouvernement appliquera la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) aux services numériques fournis depuis l’étranger.

Ainsi, à partir du 1er janvier 2026, les services de streaming – qu’ils soient audiovisuels, musicaux, ou liés à des applications payantes, jeux ou logiciels – seront soumis à une TVA de 15 %. Cette nouvelle mesure fiscale a été introduite dans le Budget 2025-2026. Jusqu’ici, ces plateformes échappaient à l’impôt local, contrairement aux fournisseurs mauriciens qui, eux, devaient déjà facturer la TVA. Le ministère des Finances justifie cette réforme par un souci d’équité fiscale entre opérateurs locaux et étrangers.

Les entreprises non résidentes réalisant un chiffre d’affaires supérieur à Rs 6 millions à Maurice devront s’enregistrer auprès de la Mauritius Revenue Authority (MRA). Une fois enregistrées, elles devront inclure la TVA dans les abonnements mensuels facturés aux clients mauriciens. Ainsi, un abonnement à Rs 499 grimpera à environ Rs 575. Pour des forfaits plus coûteux comme celui de Netflix, actuellement à Rs 800, la facture atteindra Rs 920 par mois.

Pour les autorités fiscales, cette réforme devrait permettre d’élargir la base de recettes publiques, sans alourdir la charge fiscale des entreprises mauriciennes. 

Témoignages

Ramchurn Yajnesh, 21 ans : « Cette taxe ne fait que creuser les inégalités »

Pour Ramchurn Yajnesh, 21 ans, étudiant en troisième année à l’Université de Maurice, l’introduction d’une TVA de 15 % sur les plateformes de streaming étrangères est tout simplement injuste. « Je ne suis pas prêt à payer plus. J’ai déjà annulé mes abonnements. Avec l’inflation, le taux de change et la vie étudiante, cette taxe devient un fardeau de trop », affirme-t-il.

S’il dit comprendre que l’État cherche à augmenter ses recettes ou à réguler le marché, il estime que la mesure est mal ciblée. « Elle pénalise surtout les jeunes, ceux qui se divertissent, s’informent ou s’éduquent à travers ces plateformes. C’est une taxe régressive qui frappe les usagers ordinaires, pas les grandes entreprises », déplore-t-il.

La dépréciation de la roupie ne fait qu’accentuer cette pression. « Un abonnement en dollars coûte déjà cher. Ajouter 15 % rend les contenus légaux inaccessibles. Ça pousse vers le piratage. Beaucoup vont retourner vers les sites illégaux, parce qu’ils n’auront pas le choix », prévient-il.

Au-delà du divertissement, Yajnesh Ramchurn rappelle que ces plateformes sont aussi des espaces d’expression : « Spotify permet à des jeunes artistes mauriciens de se faire connaître. Si les utilisateurs se désabonnent, ce sont eux aussi qui en paieront le prix. »

Il insiste sur l’importance de l’accès à la culture et à l’information : « Ce n’est pas qu’une question de films ou de musique. Des documentaires comme ‘Our Planet’ ou ‘Crip Camp’ sont éducatifs. Pourquoi rendre cela moins accessible ? » À ses yeux, cette taxe, bien qu’indirecte, accentuera la fracture numérique : « Elle isole davantage ceux qui sont déjà fragilisés. »

Emilie Soogund, étudiante : « Quand on aime le contenu, on s’adapte »

Emilie Soogund, étudiante, n’est pas surprise par cette nouvelle taxe. Elle estime que le public s’y habituera, comme pour d’autres hausses de prix : « Ce n’est pas la première fois que les tarifs augmentent, et pourtant, beaucoup de gens continuent de s’abonner. Quand on aime le contenu, on s’adapte. » Elle n’exclut pas d’ajuster sa consommation. « Je ne partage pas encore mon compte, mais je le ferai avec des amis si nécessaire. Sinon, je réduirai peut-être mes abonnements à une seule plateforme », indique-t-elle.

Sur le fond, elle comprend la logique fiscale. « Ces plateformes gagnent beaucoup d’argent ici, sans contribuer à l’économie. Une TVA peut donc sembler justifiée. Mais seulement si cet argent sert à développer notre culture, l’audiovisuel local ou améliorer Internet. Sinon, ce sera juste une taxe de plus », soutient-elle. Ce qu’elle juge incohérent, c’est la redevance audiovisuelle : « Payer Rs 150 par mois à la MBC pour un contenu que je ne regarde pas, c’est plus frustrant que de payer Netflix. Là au moins, je choisis ce que je regarde, quand je le veux, sur n’importe quel appareil. » Elle estime que l’État devrait revoir ses priorités : « On parle d’équité fiscale, mais où est l’équité quand on paie pour un service public audiovisuel inutile ? » 

Marwan Dawood, 34 ans : « Cette taxe est injuste et irréfléchie »

Pour Marwan Dawood, la nouvelle taxe frappe de plein fouet les jeunes consommateurs. « On parle d’une génération déjà écrasée par la hausse du coût de la vie, et voilà qu’on vient lui imposer une TVA sur les abonnements numériques. C’est absurde », lance-t-il.

Il dénonce un manque de transparence autour de la decision : « On parle d’un taux de 15 %, mais rien n’est clairement communiqué. Les jeunes ont le droit de savoir ce qu’on leur impose. » La mesure, prévient-il, aura des effets contre-productifs. 

« Beaucoup vont se désabonner, d’autres utiliseront des VPN pour contourner la taxe. Est-ce ça, la stratégie fiscale du pays ? » demande-t-il. Il invite les autorités à revoir leur approche : « Ce n’est pas en pénalisant ceux qui cherchent du contenu culturel ou éducatif qu’on bâtit une société équitable. Il est temps de soutenir les jeunes, pas de les saigner. »

Pourquoi ces plateformes sont taxées

Avec l’essor des services numériques comme Netflix, Spotify, Disney+, Amazon Prime Video ou YouTube Premium, de nombreux pays ont adopté des mécanismes fiscaux pour que ces entreprises étrangères contribuent aux recettes locales.

Deux types de taxes sont généralement appliqués :

  • 1.TVA / GST (Taxe sur la valeur ajoutée / Taxe sur les biens et services)

Appliquée à la consommation. Les plateformes facturent la taxe à l’utilisateur et la reversent à l’administration fiscale.

  • 2.DST (Digital Services Tax)

Impôt sur les revenus générés localement (publicité, abonnements, données), souvent sans présence physique de l’entreprise.
 

Tableau comparatif de la taxation du streaming dans quelques pays

Pays Type de taxe Taux Depuis Commentaires
France TVA + DST 20 % + 3 % TVA : ancien, DST : 2019 DST sur publicité et vente de données.
Allemagne TVA 19 % 2015 Appliquée à tous les services numériquesétrangers.
Australie GST 10 % 2017 Seuil d’enregistrement à 75 000 AUD.
Inde GST 18 % 2017 Facturation obligatoire aux clients indiens.
Espagne TVA + DST 21 % + 3 % DSwT : 2021 Inclut les revenus de streaming.
Pologne TVA + taxe 23 % + 1,5 % DST : 2020 Taxe spécifique sur la streaming locale vidéo à la demande.
Kenya DST 1,5 % 2021 Cible toutes les plateformes numériques.
Danemark DST (streaming) 2 % 2024 Appliquée uniquement à la vidéo à la demande.
Turquie DST 7,5 % 2020 L’un des taux les plus élevés.
Nigeria TVA + DST 7,5 % + 6 % 2021 Couvre streaming, jeux, publicité, e-learning.
Canada (Québec) TPS + TVQ 14,975 % 2019 Les fournisseurs étrangers doivent s’enregistrer.
Maurice TVA sur services numériques 15 % Dès 2026 Les plateformes étrangères devront facturer la TVA.

 

 

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