De nombreuses personnes changent d’emploi ou donnent une nouvelle orientation à leur carrière en ce début d’année. Et les recrutements sont en hausse pour pallier les départs et pour remplir les nouveaux postes.
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Départs : hausse dans le nombre de démissions
De nombreux salariés démissionnent en ce début d’année. « On constate un grand nombre de départs en ce début d’année. Il y a aussi des employés qui ont démissionné en novembre et en décembre avec l’étape de préavis et ont intégré une nouvelle entreprise cette année. C’est un peu dans la culture mauricienne de chercher ailleurs ou de changer de cap après avoir touché le boni de fin d’année en décembre », avance Adilla Diouman-Mosafeer, directrice de Talent Lab.
« Les salariés ne sont pas suffisamment informés de leurs droits. Ils sont nombreux à penser que pour être bénéficiaire du boni de fin d’année, il faut impérativement rester en poste pour une période de douze mois consécutifs. Cette croyance fait qu’ils préfèrent attendre la nouvelle année pour informer leurs employeurs de leurs démissions ou même commencer à rechercher activement un nouvel emploi », ajoute Astrid Vuddamallay, Talent Management Lead chez Myjob.mu.
Le phénomène commence peu à peu à s’étendre tout le long de l’année. « Certes, les départs sont en hausse en cette période, mais ils ne sont plus associés qu’au début de l’année. Les démissions ainsi que les arrivées dans les compagnies se font tout au long de l’année depuis que la loi permet le paiement du boni en prorata », souligne Thierry Goder, CEO d’Alentaris qui indique, au passage, que tous les secteurs sont touchés par les départs.
La relance économique est une autre raison qui explique le nombre de départs en ce début d’année. « À cause du confinement et des répercussions de la pandémie, les salariés étaient plus réticents à changer d’emploi. C’était la stabilité et des revenus mensuels garantis qui primaient. Depuis la reprise économique en 2022, les salariés sont à nouveau prêts à relever de nouveaux défis et à améliorer leurs conditions financières », fait observer Astrid Vuddamallay.
Les raisons
Le salaire est une des principales raisons qui poussent les employés à changer d’entreprise. « Les salariés bougent pour avoir un salaire plus attrayant et avantageux et pour mieux gagner leur vie. Avec la cherté du coût de la vie, il devient plus compliqué de joindre les deux bouts pour les jeunes qui viennent de fonder une famille. Ainsi, dès qu’une occasion se présente, ils bougent ailleurs. Nous avons vu des cas, notamment dans les centres commerciaux, où les salariés quittent un magasin pour un autre pour Rs 500/Rs 1 000 de plus », souligne Adilla Diouman-Mosafeer. Si certains salariés bougent d’une entreprise à une autre, d’autres cherchent l’herbe plus verte à l’étranger. « Ce phénomène commence à devenir inquiétant ! », estime Adilla Diouman-Mosafeer. Les salariés démissionnent aussi pour assumer de nouvelles responsabilités et progresser dans leurs carrières. Certains aussi font le choix de changer d’orientation professionnelle.
Une perte pour l’entreprise
Tout départ dans une entreprise est une perte. Ce n’est pas Astrid Vuddamallay qui dira le contraire. « Remplacer un collaborateur nouvellement diplômé coûtera en moyenne 35 % de son salaire annuel. Pour un collaborateur plus expérimenté, le coût est d’environ 150 % de son salaire. Mais, pour remplacer un collaborateur ultra-qualifié, cela peut coûter jusqu’à 300 % voire 400 % de son salaire brut annuel », indique-t-elle.
De plus, le processus de recrutement (annoncer les postes vacants, analyser les candidatures, faire passer les entretiens) représente une dépense considérable pour les entreprises.
« Les entreprises dépensent en moyenne l’équivalent de six à neuf mois de salaire d’un employé pour trouver et former son remplaçant, sans compter le temps précieux que consacre l’administration et les superviseurs lors de la formation sur le terrain », fait ressortir Astrid Vuddamallay. Adilla Diouman-Mosafeer abonde dans le même sens et souligne que la perte est notée dans le temps investi dans la formation de l’employé qui part. « Celui-ci a su absorber la culture de l’entreprise et avait des tâches bien définies », souligne-t-elle.
Il faut ajouter la perte de productivité. « Ces coûts indirects sont plus difficiles à quantifier, mais ont quand même un impact significatif sur la santé financière de l’entreprise. Les employés nouvellement embauchés ne sont tout simplement pas aussi productifs que la personne qu’ils remplacent. Arriver au même niveau peut prendre un ou deux ans », explique Astrid Vuddamallay. Et d’ajouter : « Sans parler des erreurs potentielles que peuvent commettre les employés qui ne sont pas familiers avec les processus, les outils et les politiques de l’entreprise. De plus, lorsqu’un collègue s’en va, les autres employés vont inévitablement se poser des questions et peuvent même envisager de partir également. Cet effet domino peut considérablement contribuer à démotiver des employés, engendrant une perte de productivité annuelle ».
Pour Thierry Goder, une démission est, certes, une perte, mais aussi une opportunité pour les autres collaborateurs de l’entreprise. Car il y a la possibilité qu’ils soient promus en interne si la compagnie décide de ne pas recruter. De même, si la société recrute, elle apporte du sang neuf. Et si elle donne la liberté à la nouvelle recrue d’apporter sa valeur ajoutée, c’est que du bonus pour l’entreprise.
« Certes, il y a l’émotion, mais il faut aussi prendre positivement un départ. Si un employé bouge pour de nouvelles responsabilités ailleurs après sept à douze ans dans une compagnie, ça démontre que l’entreprise l’a fait grandir », indique Thierry Goder.
Recrutement : les embauches sont en hausse
Qui dit départs, dit aussi arrivées dans les entreprises. Et pour cause, pas mal de sociétés recrutent en ce moment. « Les offres d’emploi ont augmenté comparativement à pareille époque l’an dernier », souligne Thierry Goder. D’ailleurs, certaines entreprises ont fait des campagnes de recrutement depuis octobre/novembre pour l’embauche en ce début d’année. Astrid Vuddamallay, Talent Management Lead chez Myjob.mu, dit constater elle aussi une hausse quant au besoin des entreprises de recruter. « Sur le portail de Myjob.mu, nous avons comptabilisé 1 972 postes actifs en janvier 2023 contrairement à janvier 2022 quand on comptait 1 433 postes actifs. Au cours des deux premières semaines de février 2023, nous avons répertorié 1 754 postes à pourvoir. Nous devons cette tendance à deux principaux facteurs. Il y a le remplacement des employés qui sont en partance et la création de nouveaux postes », explique Astrid Vuddamallay. Le secteur touristique maintient sa première position avec 387 postes à pourvoir, suivi de 320 postes en finance et 296 postes dans les technologies de l’information et de la communication. « Nous notons également une hausse des postes à pourvoir dans les services du BPO ainsi qu’au sein du domaine de l’administration et de la vente », avance Astrid Vuddamallay. Chez Myjob.mu, on constate également que le besoin de recruter a doublé de janvier 2023 à février 2023 pour les entreprises qui opèrent dans les secteurs suivants : comptabilité/finance (300 postes à pourvoir sur le portail de Myjob.mu), administration (210 postes disponibles), logistique/distribution (121 postes) et électrique/électronique (180 postes). Les profils les plus recherchés sont : account officer, account executive, junior accountant, assistant administratif, messenger/driver, techniciens et maintenance officer.
Les raisons
- Les entreprises recrutent pour remplacer les départs. « Le remplacement se fait quand un salarié quitte l’entreprise provisoirement ou définitivement (grossesse, maladie, démission, licenciement) », fait ressortir Astrid Vuddamallay.
- Certaines sociétés sont en quête de nouveaux talents suivant la diversification ou l’expansion de leurs structures. « Comme, elles ont besoin de compétences, elles vont débaucher des gens. Ce qui cause des départs dans d’autres entreprises », fait ressortir Thierry Goder.
- De nouvelles entreprises ont besoin de compétences.
- Avec de nouveaux corps de métier qui se mettent en place dans certains secteurs, le recrutement devient impératif.
Chiffres à retenir
355 241
C’est le nombre de visites sur le portail de Myjob.mu en janvier 2023.
4 261
nouvelles inscriptions des candidats ont été répertoriées sur la plateforme de Myjob.mu.
62 200
candidats ont postulé pour des postes dans 36 domaines d’activités sur le journal de l’emploi de Myjob.mu en janvier 2023.
Environ 2 000
jeunes sont disponibles sur le marché du travail, indique Alentaris.
Ils ont dit
Astrid Vuddamallay, Talent Management Lead chez Myjob.mu :
« Depuis 2022, nous avons noté que de nombreuses entreprises étrangères sont venues s’implanter à Maurice à la suite de la pandémie. Celles-ci recrutent en masse avec des salaires très attrayants. Cependant, nous perdons également de la main-d’œuvre mauricienne qui préfère aller au Canada, par exemple, afin de trouver de l’emploi dans les usines ou dans la mécanique, le secteur électrique, la plomberie et la peinture, car le salaire et les conditions de vie y sont meilleurs. »
Adilla Diouman-Mosafeer, directrice de Talent Lab :
« Les entreprises recrutent, mais trouver des candidats est un tout autre challenge. Du coup, de plus en plus de sociétés se tournent vers la main-d’œuvre étrangère pour remplir les postes vacants. Elles doivent payer plus, car il y a d’autres frais comme l’hébergement qui entrent en ligne de compte.
Parallèlement, des Mauriciens postulent à l’étranger pour avoir de meilleurs salaires. Il y a un véritable paradoxe. Le sujet pousse à la réflexion. Il est clair que la disparité entre l’offre et la demande est en train de s’accentuer. Les attentes des employeurs ne correspondent pas aux attentes des employés et vice-versa. Il faudra trouver un équilibre. »
Thierry Goder, CEO d’Alentaris :
« Il y a plusieurs cas où des candidats qui postulent et qui sont appelés pour des entretiens ne se présentent pas. C’est décevant et frustrant pour les employeurs ! Il y a un manque d’engagement et un problème d’attitude de la part des personnes en quête d’un emploi. De même, il n’y a pas un seul secteur qui ne fait pas face à un exode de compétences. Pourtant, les opportunités sont là pour ceux qui veulent travailler. À titre d’exemple, rien que dans l’hôtellerie, il y avait plus de 250 postes à pourvoir en janvier. »
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