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A l'origine des émeutes qui secouent le Népal, une jeunesse en quête d'avenir

Leur colère a fini par faire tomber le gouvernement. Privés de perspectives d'avenir, lassés par l'instabilité politique, désabusés par la corruption, les jeunes ont résolument pris la tête de la contestation meurtrière qui agite le Népal depuis lundi.

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Au fil des mois, leur colère contre une élite qu'ils jugent sourde à leurs aspirations et incapable d'accélérer le développement économique de cette république himalayenne de 30 millions d'habitants n'a cessé de grandir.

Le blocage la semaine dernière de 26 réseaux sociaux, dont Facebook, Youtube, X et Linkedin, a fait déborder le vase.

Lundi, c'est dans la rue que des milliers d'entre eux ont exigé leur rétablissement dans la capitale Katmandou et les plus grandes villes du pays. La police a répliqué en ouvrant le feu, faisant au moins 19 morts et des centaines de blessés.

Le rétablissement de leurs réseaux sociaux favoris, la promesse d'une commission d'enquête sur la répression et la démission du Premier ministre KP Sharma Oli, 73 ans, ne les a pas calmés.

Mardi, à Katmandou, ils ont bravé le couvre-feu et mis à sac de nombreux bâtiments ou résidences publiques, dont le parlement, symboles de dirigeants à leurs yeux déconnectés de leurs réalités.

Voici les raisons de leur révolte:

- Chômage

La croissance de l'économie du Népal a atteint 4,9% au cours des six premiers mois de 2025, contre 4,3 % sur la même période l'an passé, principalement grâce aux secteurs agricole et industriel.

Selon la Banque mondiale, 82% de la main-d'œuvre du pays est employée de manière informelle, un chiffre "bien supérieur aux moyennes mondiales et régionales".

En 2024, l'institution a évalué à 20,8% le taux de chômage des jeunes âgés de 15 à 24 ans.

Dans ces conditions, des centaines de milliers de Népalais sont contraints de s'expatrier pour trouver du travail en Inde ou dans les pays du Moyen-Orient.

Les transferts de fonds depuis l'étranger sont devenus une part essentielle de l'économie du Népal. L'an dernier, ils ont représenté un tiers de son produit intérieur brut, soit le quatrième taux le plus élevé au monde, selon la Banque mondiale.

Cette "dépendance (...) a été déterminante pour la croissance du pays mais n'a pas créé des emplois de qualité ni permis un véritable développement de son économie et de nombreux Népalais continuent de partir à l'étranger pour trouver un emploi", selon le dernier rapport de la Banque mondiale.

Les réseaux sociaux sont essentiels aux contacts au quotidien entre le Népal et cette diaspora.

Particulièrement pour les 12 millions de personnes âgées de 16 et 40 ans, qui représentent 43% de la population, selon les statistiques gouvernementales.

"Avec environ 500.000 jeunes rejoignant la population active chaque année au Népal, il est urgent de créer des emplois pour sortir les familles de la pauvreté et stimuler un développement durable", a déclaré Johannes Zutt, vice-président de la Banque mondiale pour l'Asie du Sud, à l'issue d'une visite la semaine dernière.

- Corruption

L'ONG Transparency International classe le Népal au 107e rang sur 180 dans son classement mondial des pays les plus touchés par la corruption.

Les jeunes Népalais sont particulièrement remontés contre les élites au pouvoir depuis des décennies.

Ces derniers jours, des vidéos illustrant le contraste entre le dur quotidien des citoyens ordinaires et la vie luxueuse des enfants de dirigeants politiques ont inondé la plateforme Tik Tok.

Le Népal est devenu une république fédérale en 2008 après une longue guerre civile qui a aboli la monarchie et permis l'accession des mouvements maoïstes au gouvernement.

Depuis, la succession de Premiers ministres vieillissants et les arrangements entre partis ont nourri le sentiment que le gouvernement était déconnecté de la population.

- Libertés

La Commission nationale des droits de l'homme du Népal avait récemment mis en garde le gouvernement contre un blocage des réseaux sociaux, estimant qu'il fragiliserait "l'esprit de gouvernance démocratique".

Cette interdiction "a touché les nerfs à vif" d'une jeunesse en colère, a écrit le journal Kathmandu Post.

"Ils les utilisent pour exprimer leurs frustrations, se connecter avec des amis et se tenir au courant de ce qui se passe dans le monde", a écrit le quotidien, dont les bureaux ont été incendiés mardi.

"Ils étaient déjà anxieux, exaspérés par l'état déplorable du système de santé et éducatif, la corruption et le népotisme endémique (...) et beaucoup d'entre eux ne voyaient aucun avenir dans le pays", a rappelé un éditorial.

© Agence France-Presse

 

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