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L’Église de Maurice salue un pape « grand par son humilité »

Le pape François, ici aux côtés de Mgr Piat et du père Goupille, a marqué les esprits par sa simplicité lors de sa visite à Maurice en septembre 2019.
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  • Un pontificat de réformes, d’inclusion et de proximité célébré
  • Mgr Durhône évoque un réformateur humaniste
  • Mgr Piat témoigne d’un héritage de fraternité

L’humilité du pape François, décédé le lundi de Pâques, à l’âge de 88 ans, sa proximité avec les plus fragiles et ses réformes audacieuses ont profondément marqué l’Église mauricienne, laissant un héritage de foi, de fraternité et d’espérance. 

L’humilité du pape François, au cœur de son pontificat, a profondément touché l’Église mauricienne. 

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L’évêque de Port-Louis célèbre un homme qui a incarné « une vie simple, fidèle à l’Évangile ».

Mgr Jean Michaël Durhône, évêque de Port-Louis, célèbre un homme qui a incarné « une vie simple, fidèle à l’Évangile », marquée par son humilité, sa proximité avec les plus fragiles. Cette simplicité s’est traduite en « réformes majeures » : lutte contre les abus, gouvernance plus collégiale et valorisation des laïcs, en particulier des femmes. 

La visite du pape à Maurice en 2019 est un moment gravé dans les mémoires. Pour Mgr Durhône, cet événement fut « un signe de proximité avec les Églises périphériques ». Le pape y avait insisté sur le rôle des jeunes, une priorité pour l’île. « Il nous avait interpellés sur les jeunes, qui représentent notre première mission. Il avait en effet longuement abordé leur place dans la société mauricienne : une jeunesse au futur souvent incertain, mais à qui l’Église peut offrir un chemin d’espérance. » 

Nommé évêque sous ce pontificat, Mgr Durhône se dit marqué par « la vision d’une Église plus accueillante et fraternelle » qui « continuera d’inspirer des générations. Que son héritage soit une lumière pour l’avenir ». En ce temps pascal, il invite les fidèles à prier pour François, souhaitant que « la grâce de la vie éternelle lui soit accordée ».

Cette fraternité, pilier du pontificat, trouve un écho dans les paroles du cardinal Maurice E. Piat, évêque émérite de Port-Louis. Pour lui, le pape François était « grand par son humilité », un trait illustré dès son élection, lorsqu’il demanda la bénédiction du peuple depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre. « Il a su entraîner l’Église dans une démarche synodale et fraternelle », affirme-t-il, saluant une attention constante aux « pauvres, exclus, malades et migrants victimes de la guerre, de la faim ou du trafic humain ».

Mgr Piat salue « un pape grand par sa façon de nous entraîner à marcher ensemble joyeusement, à la suite de Jésus, à nous ouvrir à la fraternité, à vivre une inlassable miséricorde ; un pape grand par sa vie donnée ». Il a aussi exprimé sa gratitude personnelle pour les 12 années passées sous le pontificat de François, marquées, selon lui, par une « affection stimulante et affectueuse ».

Une proximité empreinte d’humanité

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C’est en 2019 que le père Veder a rencontré personnellement le pape François.

Cette proximité, vécue au plus près par les Mauriciens en 2019, est au cœur du témoignage du père Jean-Claude Véder, curé de la paroisse Sacré-Cœur à Beau-Bassin. Responsable de l’animation liturgique lors de la messe au monument Marie Reine de la Paix, il garde l’image d’un pape d’une « grande simplicité ». 

Une anecdote au Vatican, avant la visite mauricienne, illustre ce trait. « Un soir, nous l’avons vu arriver discrètement pour le dîner, entrer dans la salle à manger. On était à quelques mètres de lui. Il était tranquille comme si de rien n’était. C’était son style à lui », raconte-t-il, ému par cette modestie.

Lors de leur rencontre à Maurice en 2019, le père Véder découvre un pape « très proche », dont l’humour rendait l’Évangile accessible. « Il avait une manière unique de rendre la foi vivante », dit-il.
Dès 2013, François appelait à une conversion profonde : « Il voulait une Église telle que Jésus l’a voulue, proche des gens. » Ce projet s’est incarné dans le synode récemment clôturé, un tournant pour l’Église « avec son accent sur l’inclusion, l’écoute et le dialogue, ce synode marque une révolution », souligne le père Véder. Pour lui, cette vision, où prêtres, laïcs, hommes, femmes, jeunes et pauvres ont leur place, reflète une Église « encore plus proche de l’Évangile ».

Un héritage universel

Les réformes de François, portées par cette vision, ont bousculé les traditions. « Il a posé des gestes prophétiques, comme prendre un enfant dans ses bras à Maurice, avec une simplicité désarmante », se souvient le père Véder. Ses prises de position – sur les migrants, la guerre, l’écologie ou la paix – témoignent d’un engagement pour les souffrants. « Il était là où l’humanité souffre », insiste-t-il. Au Vatican, il a cherché à réformer, rappelant que « celui qui dirige doit servir », en écho aux paroles de Jésus.

Malgré sa santé fragile, la dernière apparition du pape, lors de la bénédiction Urbi et Orbi le dimanche de Pâques, a marqué les esprits. « Il a voulu montrer son visage, puis s’en est allé le lendemain, dans la joie de la résurrection », confie le père Véder. Ce décès, en plein temps pascal, porte une espérance. « Malgré la tristesse, nous vivons dans la joie de l’espérance chrétienne », soutient-il.

« Un homme de foi »

« Le pape François était un homme extrêmement disponible, ouvert et d’une grande simplicité. Il rencontrait les personnes et les traitait d’égal à égal. On ne sentait jamais chez lui la moindre supériorité : il était vraiment au service et profondément humble. C’était un homme de foi, qui a fait beaucoup de bien à l’Église », confie le père Philippe Goupille, curé de la paroisse Notre-Dame-de-Fatima. En 2019, lors de la visite papale à Maurice, il a eu l’honneur d’agir comme interprète, traduisant les discours et interventions du Saint-Père. « Ce fut une expérience spirituelle profonde. Côtoyer un homme d’une telle sainteté m’a aidé à mieux comprendre l’Évangile et à incarner, dans ma vie de prêtre, le service des plus humbles et des plus démunis », raconte-t-il.

Le père Goupille se souvient d’une rencontre marquée par la décontraction. « Bien que ce fût notre première rencontre, il m’a immédiatement mis à l’aise. En tant qu’interprète, je traduisais ses discours et ses différentes interventions. Cela n’a pas du tout été stressant de travailler avec lui », ajoute-t-il. 

La nouvelle de son décès, annoncée au lendemain de Pâques, l’a profondément attristé. « Dimanche, lors de sa bénédiction Urbi et Orbi, il semblait essoufflé, fatigué. Sa mort est une grande tristesse, mais je pense qu’il était arrivé à la fin de sa vie et de son long parcours de service », confie-t-il. 

Pour le prêtre, le décès du pape François le lendemain de Pâques, à l’image de celui de Jean-Paul II une semaine après la même fête, revêt une portée symbolique. 

« Mourir le lendemain de la fête de Pâques, où l’on célèbre la résurrection de Jésus, envoie un message fort, d’une certaine manière : qu’au-delà de notre vie terrestre, il y a l’espérance d’une vie de ressuscité. C’est un beau symbolisme et une belle coïncidence », conclut-il.

Harry Ragoo, PRO du Conseil des religions : « Le pape François prônait l’unité entre les religions »

« Nous sommes attristés par le décès du pape François, d’autant que cela intervient juste après la Semaine sainte et les célébrations de Pâques. Au niveau du Conseil des religions, nous retenons le plaidoyer qu’il a toujours fait pour le rassemblement de toutes les croyances religieuses dans le monde, et particulièrement à Maurice. Nous avons à Maurice plusieurs croyances, et nous arrivons à travailler ensemble, main dans la main, ce qui correspond à la vision que le pape François avait pour le monde. Le Conseil des religions œuvre dans ce sens, afin de réunir toutes les dénominations religieuses et construire cette nation mauricienne. »

Gilles Joomun responsable de la chorale : «Le pape François nous a profondément marqués par sa bonté»

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Le décès du pape François, ce lundi de Pâques 2025, a bouleversé Maurice, ravivant les souvenirs de sa visite historique en 2019. Fabrice, engagé dans la préparation liturgique de cet événement, trente ans après Jean-Paul II, partage une émotion profonde. À la tête d’une chorale de 180 voix, il a orchestré des mois de répétitions avec ferveur. 

« C’était intense, mais tellement joyeux. Nous avons accueilli le pape avec tout notre cœur », confie-t-il.

Bien que n’ayant pas rencontré François, Fabrice fut marqué par sa simplicité et sa proximité, notamment avec les jeunes. « Ses paroles, prononcées avant le confinement de la COVID-19, ont continué de nous porter », dit-il. Le pape insistait sur la place centrale des jeunes dans l’Église, un message qui guide Fabrice dans son encadrement des nouvelles générations. « Pour nous, sa visite était un privilège. Son appel pour la jeunesse résonne encore », souligne-t-il. 

La nouvelle du décès, attendue vu la santé fragile du pontife, reste douloureuse. En ce temps pascal, Maurice pleure un guide dont l’héritage continue d’inspirer foi et espérance.

« Le pape François a rapproché l’Église de son peuple » 

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Le père De La Salle souligne l’importance révolutionnaire de l’encyclique « Laudato si » du pape François.

Le pape François, membre de la Compagnie de Jésus, a profondément marqué l’Église par sa simplicité sans précédent. Le père Patrice De La Salle, supérieur de la communauté des Jésuites à Maurice, garde un souvenir vivace de la première apparition publique du pontife au balcon de la basilique Saint-Pierre après son élection. Ce moment fondateur révélait déjà sa personnalité : « Avec cette simplicité de contact avec la foule qui était présente sur la place Saint-Pierre à ce moment-là. » Ce geste inaugural fut aussi marqué par une demande touchante : « priez pour moi », dit-il.

Cette connexion profonde avec les fidèles s’est manifestée dès le choix symbolique de son nom, François, en hommage à saint François d’Assise. Depuis le début de son pontificat, il a multiplié les initiatives concrètes en faveur des personnes marginalisées tout en s’engageant fermement pour la protection de l’environnement.

Le père De La Salle met particulièrement en lumière l’importance révolutionnaire de l’encyclique « Laudato si » : « Ce n’était pas courant pour les papes de parler d’écologie, d’environnement, de nature et de paix, hormis quelques passages rapides dans les encycliques sociales. » Il estime que le pape François a brillamment identifié le parallèle entre l’exploitation de la planète et les dynamiques de domination entre les êtres humains : « Les plus puissants exploitent les plus faibles en retirant des profits gigantesques, comme on le voit avec certaines grandes sociétés. »

En sa qualité de vicaire dominical de la paroisse Notre-Dame de Lourdes à Rose-Hill, le père De La Salle évoque également les réformes internes significatives, notamment la transformation de la curie romaine par une nouvelle constitution. « Même si cela se passe loin des regards des chrétiens car c’est l’administration interne, c’est aussi ce souci que l’Église soit proche du peuple et ne se contente pas uniquement d’utiliser la hiérarchie comme une instance de pouvoir », affirme-t-il.

Le supérieur des Jésuites mauriciens insiste sur l’évolution notable concernant la place des femmes dans l’Église. « Beaucoup sont d’avis qu’on n’est pas allé assez loin, mais le pape a néanmoins promu des femmes dans les différents dicastères, jusqu’à nommer une religieuse responsable d’un dicastère pour la vie consacrée – une première dans l’Église, jusque-là réservée aux cardinaux », précise-t-il. Les jeunes ont également bénéficié d’une attention particulière dans l’Église sous le pontificat de François.

« En douze années de pontificat, le pape François a fait avancer davantage l’Église sur les chemins de l’Évangile », souligne le père De La Salle, tout en reconnaissant l’apport essentiel des papes qui l’ont précédé. Selon le supérieur jésuite, le pape a constamment défendu cette approche synodale du « marcher ensemble » au sein du peuple de Dieu : que l’on soit clercs ou laïcs, nous sommes fondamentalement unis par le sacrement du baptême. 

Concernant la douloureuse question des abus au sein de l’Église, le père De La Salle rappelle enfin que le pape François a initié une véritable prise de conscience des souffrances des victimes et a mis en place des mesures strictes pour prévenir et sanctionner ces abus.

 

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