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Landing Station de Baie-du-Jacotet : des inquiétudes exprimées par l’Inde depuis l’année dernière

Est-ce finalement l’Inde qui a attiré l’attention du gouvernement mauricien sur des potentiels problèmes de sécurité nationale sur le réseau des télécommunications mauricien. Et cela, dans un contexte de rivalité entre l’Inde et la Chine ? Plusieurs pistes vont dans ce sens.

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Les autorités indiennes avaient-elles, ou ont-elles toujours, l’intention d’installer des équipements d’interception de données à la Landing Station de Baie-du-Jacotet pour contrer l’espionnage chinois ? Selon la presse indienne, la réponse à cette question pourrait bien être positive.

La publication indienne « The Print », qui suit l’affaire de « survey » de près, soutient que « des experts techniques du Research and Analysis Wing (RAW) (Ndlr, dont Kumaresan Ilango était un des responsables avant d’être envoyé à Maurice comme National Security Advisor en août 2021) ont émis de multiples avertissements, depuis le début de l’année dernière, par rapport à la People’s Liberation Army de Chine qui utiliserait des infrastructures Internet construite par la compagnie chinoise controversée Huawei à Maurice pour conduire de l’espionnage numérique contre des cibles indiennes et occidentales à travers l’océan Indien ». « The Print » soutient avoir eu ces informations de sources crédibles au niveau des services d’intelligence indiens.

La publication, connue pour la qualité de ses informations, précise que les inquiétudes de l’Inde, « qui étaient centrées sur la Landing Station du câble optique sous-marin à Baie-du-Jacotet à Maurice », ont été communiquées au gouvernement mauricien par le biais de Kumaresan Ilango.

Cette information semble rejoindre ce que le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a déclaré lors de son discours à la nation, mercredi soir. « L’année dernière, mon bureau a eu certaines informations sur la sécurité de notre réseau de communication et ça m’a amené à donner des instructions pour faire un « survey » indépendant par des techniciens spécialisés. (…) Cette équipe de l’Inde a été recommandée par le gouvernement indien à travers notre National Security Advisor », a-t-il indiqué.

Selon « The Print », « l’équipement que RAW a cherché à installer aurait prétendument consisté de sniffers numériques, c’est-à-dire des équipements qui permettent l’interception et le stockage de trafic Internet pour analyse ultérieure ». Elle souligne que l’Inde « a déjà déployé des équipements similaires à Kochi, un des points d’atterrissage du câble optique sous-marin SAFE qui relie l’Afrique du Sud, Maurice, La Réunion, l’Inde et la Malaisie ».

Précisons cependant que le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a nié à plusieurs reprises toute tentative d’installer des équipements pouvant permettre la capture de données à Baie-du-Jacotet. D’ailleurs, dans ses différents rapports, l’ex-Chief Technical Officer de Mauritius Telecom, Girish Guddoy, a toujours indiqué qu’aucun équipement de la sorte n’a été laissé à la Landing Station.

Par contre, dans ses rapports, il affirme que des équipements ont été branchés par l’équipe indienne pour faire de la « data capture », mais ceux-ci ont été enlevés par la suite.

La publication fait remarquer que Huawei a réalisé le projet Safe City, qui comporte un réseau de 4 000 caméras et que l’Export-Import Bank de Chine a financé le projet à hauteur de 350 millions de dollars (Rs 15,6 milliards selon le taux du jour). Le contrat avait été alloué par Mauritius Telecom sans appel d’offres et des exemptions avaient été accordées par le gouvernement mauricien, car le projet était placé sous « la sécurité et la défense nationales ».

Huawei Marine, une branche de Huawei, a aussi obtenu, à travers Mauritius Telecom, le contrat pour la mise en place du câble optique sous-marin MARS, qui relie Maurice à Rodrigues. Ce contrat avait été alloué fin 2017 par le gouvernement après un exercice d’appel d’offres. Ce câble prend sa source à la « Landing Station » de Baie-du-Jacotet, là où se trouve aussi le câble SAFE.

À noter que Huawei Marine a posé des centaines de câbles optiques sous-marin à travers le monde et a mis en place de réseaux similaires à celui de Safe City dans plus de cinquante villes en Chine et ailleurs. Toutefois, selon des experts, les équipements incluent des « digital back doors » qui permettraient aux services d’espionnage chinois de récolter des données en toute discrétion. C’est cette méfiance, qui reste cependant à être prouvée, qui a mené l’Australie à interdire Huawei à participer à un projet liant le réseau Internet australien aux îles Salomon en 2018.

En 2021, un projet pour relier Nauru, Kiribati et les États fédérés de Micronésie à Guam par câble optique sous-marin avait été annulé sur intervention des États-Unis, car le contrat devait être alloué à Huawei. Ce dernier avait fait l’offre qui était de loin la moins élevée pour la mise en œuvre du projet.

Ce sont ces inquiétudes qui auraient donc mené le gouvernement mauricien à demander un « survey » complet à Baie-du-Jacotet. À noter que l’essentiel du trafic Internet de Maurice passe par le câble SAFE.

L’audit technique décidé par le nouveau conseil d’administration de Mauritius Telecom, le vendredi 22 juillet, va aussi dans ce sens. La décision a été prise de faire appel à une équipe d’experts de haut calibre au niveau international pour procéder à des vérifications sur le réseau de la compagnie de télécommunications.

Demande d’assistance mutuelle avec l’Inde en préparation

Les autorités mauriciennes préparent une demande d’assistance légale mutuelle avec l’Inde sur le dossier du « survey » effectué le 15 avril dernier par une équipe de techniciens envoyée par la Grande Péninsule à la demande de Maurice. Le gouvernement mauricien souhaite obtenir des informations de la part des autorités indiennes sur un certain nombre de points.

 

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