Après plus d’un demi-siècle à cultiver la terre, Kisnah B. Somi, 70 ans, s’est désormais lancé dans la culture sous serre. Ce procédé prend de l’ampleur à Maurice grâce à ses nombreux avantages.
Kisnah aime la terre. Il l’a répété à plusieurs reprises lorsque nous l’avons rencontré, vendredi matin à Chemin-Grenier. Le manque de main-d’œuvre l’a contraint à se tourner vers la production végétale sous serre. Les premiers résultats sont concluants, comme le démontre la qualité de ses poivrons.
La culture sous serre est complètement différente de la culture traditionnelle. Elle est aussi plus coûteuse. Kisnah a investi près de Rs 700 000 dans son projet. Cela comprend l’ossature en métal, la bâche en plastique transparent pour couvrir toute la structure, le système de conduite d’eau, dont un déclencheur pour fournir de l’eau à la racine des plantes pendant trois minutes toutes les deux heures. Il faut aussi compter les installations pour placer les tourbes de coco et les semis de poivrons car, comme il s’agit de culture hors-sol, le sol doit être débarrassé des herbes envahissantes et d’autres nuisances. Il doit donc être complètement recouvert d’un plastique spécial.
La culture sous serre est très technique, selon notre interlocuteur. Il est primordial de garder l’espace toujours propre. Ainsi, chaque matin, il nettoie le plastique recouvrant le sol avec une serpillière. Selon ses explications, avant d’entrer dans une serre, il faut prendre un bain et enlever ses chaussures comme mesure de protection contre les pestes. Prenant beaucoup de précautions, il enlève les feuilles en partant du bas de la plante et maintient les branches à l’aide de fils afin de favoriser la croissance.
La serriculture comprend de nombreux avantages. Solution idéale contre le manque de main-d’œuvre, elle est aussi moins fatigante et salissante car il n’y a pas de contact direct avec la terre. L’irrigation se fait automatiquement. Les éléments nutritifs essentiels pour le développement des plantes sont directement rajoutés à l’eau, rendant ainsi la production stable, en hiver comme en été, notamment durant les périodes de sécheresse. La plantation sous serre donne une meilleure production aux plans qualitatif aussi bien que quantitatif.
Toutefois, dit-il, il est important d’être vigilant car il faut s’assurer que la température de la serre soit idéale pour le bon développement des plantes. C’est pourquoi, lorsqu’il fait trop chaud, Kisnah recouvre sa serre d’une bâche noire pour y faire baisser la température.
Et ce n’est pas tout. L’agriculteur se lance à titre expérimental dans la culture des laitues Nutritional Film Technique (NFT). Cette méthode de culture hydroponique, développée par le Dr Allen Cooper dans les années 60, a été introduite à Maurice en 1996. Kisnah a déjà investi Rs 110 000 dans l’achat d’équipements nécessaires pour mener à bien ce projet.
« Si c’est un succès, je compte bien abandonner définitivement la terre », dit-il. Mais en attendant, il continue sa culture de laitues à côté de sa maison, où il compte étendre son projet NFT.
Une complicité
Kisnah nourrit une douce complicité avec la terre depuis son enfance. Son père était planteur. Père et fils ont travaillé ensemble mais Kisnah a par la suite investi dans l’achat de camions, tout en gardant contact avec cette terre qu’il aime tant. Et au fil des années, il a décidé de se consacrer à la production de légumes en adoptant les nouvelles méthodes d’agriculture. À 70 ans, il reste toujours vert.
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