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Jean Maurice Labour : « La culture de ‘protez montagn’ et des ‘roder-bout’ domine »

Ce qui pose question ici, c’est pourquoi des citoyens à part entière de la République doivent-ils passer par un « protégé du pouvoir » pour recevoir des avantages qui sont payés en retour par une propagande partisane "

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Le vicaire général,  Père Jean-Maurice Labour maintient que les agissements de Jocelyn Grégoire sont contraires à la philosophie de l’Église catholique. Il s’exprime aussi sur le système politique qui encourage, selon lui, à devenir des protégés du pouvoir.

Vous affirmez, dans votre communiqué, avoir en plusieurs occasions rappelé le père Jocelyn Grégoire à l’ordre sur sa proximité avec le parti au pouvoir. Sommes-nous arrivés à une situation d’insubordination de sa part ?

Il connaît très bien la position de l’Église sur cette question. Ce qu’a fait le père Grégoire est un mépris des orientations du diocèse.

Mis à part le communiqué que vous avez émis, avez-vous eu l’opportunité de le rencontrer personnellement pour discuter de ce contentieux ?

Je l’ai croisé à maintes reprises avant cette affaire. J’ai eu l’occasion de lui dire que j’aimais beaucoup ses méditations d’Évangile que je reçois en ligne. Jocelyn, à mon avis, est un prêtre rempli de charisme. Par ailleurs, il apporte beaucoup à l’Église, à travers ses sessions d’évangélisation et ses compositions en créole notamment.

Dans l’entourage du père Grégoire, on affirme, cependant, que c’est sous le gouvernement du MSM que la FCM est en train de parvenir à faire avancer sa cause. Il affirme que la distribution des contrats de location envers différentes coopératives soutenues par la FCM est une réalisation sans précédente. Êtes-vous satisfait des résultats obtenus par Jocelyn Grégoire sous le gouvernement actuel ?

Je m’en réjouis pour les bénéficiaires. Mais je vous fais remarquer que le diocèse de Port-Louis est un partenaire du gouvernement dans plusieurs domaines. Ce sont, entre autres, l’éducation, la lutte contre les formes de pauvreté et les problèmes liés à la famille. De plus, le diocèse catholique a également fait avancer la cause de bien des pauvres. Il a aussi obtenu du gouvernement et des institutions gouvernementales plusieurs mesures en faveur des marginaux.

Ce qui pose question ici, c’est pourquoi des citoyens à part entière de la République doivent-ils passer par un « protégé du pouvoir » pour recevoir des avantages qui sont payés en retour par une propagande partisane. Depuis l’Indépendance, sous tous les gouvernements, la culture d « protez montagn » et des « roder-bout » domine. Elle fait fi de la méritocratie et des droits du citoyen et institutionnalise le népotisme.

Au fil des années, le père Grégoire est devenu un personnage indissociable de la chose politique. Dans le passé, il s’est mis le PMSD à dos avec une de ses déclarations, celle où il a appelé ses membres à « vot avek zot leker ». Cela a été interprété comme un mot d’ordre en faveur du MMM, sans compter qu’on lui a, lors des dernières élections, reproché de soutenir le MSM. Jocelyn Grégoire est-il devenu un personnage incontournable de la politique mauricienne, selon vous ?

C’est le communalisme scientifique pratiqué par tous les gouvernements depuis l’Indépendance qui favorise cette façon de fonctionner du père Grégoire. Les politiciens, en campagne électorale permanente, sont tout le temps focussed sur leur réélection. Tous ceux qui peuvent leur attirer des votes sont récompensés par des largesses. En ce faisant, ils alimentent le communalisme, qui est le schéma directeur de tout le système électoral mauricien, dont le découpage électoral et  le Best Loser System.

L’Église catholique, dont le cardinal, s’est illustrée en quelques occasions, ces derniers temps, avec de fortes critiques contre le gouvernement en poste. Notamment pour sa gestion des affaires du pays ou encore au sujet de la situation de la fraude et de la corruption. L’Église aurait-elle été plus confortable, si Jocelyn Grégoire avait adopté la même position ?

Je conteste fermement votre affirmation que l’Église aurait, je cite : « critiqué le gouvernement en poste pour sa gestion des affaires du pays ». C’est une globalisation à l’emporte-pièce qui ne respecte pas les combats spécifiques que nous menons dans des domaines différents. S’il arrive que nous avons une opinion critique sur tel dossier, nous exprimons notre opinion à qui de droit dans un esprit de partenariat pour faire avancer les choses. Nous avons largement répété que nous n’étions pas d’accord avec le slogan « fou li deor ».

Il faut reconnaître aussi que cette pandémie nous dépasse tous. N’importe quel gouvernement au pouvoir pourrait commettre des erreurs dans sa gestion. "

L’Église a pris pour habitude de monter au créneau pour critiquer certaines actions gouvernementales. Cependant, on l’entend moins lorsque le gouvernement vient de l’avant avec des mesures sociales telles que le Wage Assistance Scheme (WAS) ou encore le décaissement de fonds pour financer des subsides. Cette attitude pousse, la plupart du temps, le gouvernement à penser que vous ne faites que critiquer sans reconnaître les bonnes actions. Que répondez-vous à cela ?

J’entretiens des contacts réguliers avec des membres du gouvernement et je leur ai souvent dit mon appréciation sur leur soutien des entreprises et des travailleurs indépendants durant cette crise sanitaire. Il faut reconnaître aussi que cette pandémie nous dépasse tous. N’importe quel gouvernement au pouvoir pourrait commettre des erreurs dans sa gestion. Par ailleurs, l’année dernière à la messe de la Saint-Louis, le cardinal Piat a salué les initiatives du gouvernement dans sa manière de gérer la crise sanitaire et pallier la crise économique. Nous avons aussi eu l’occasion de dire publiquement que la mise en place du Metro Express témoigne de la vision d’avenir de ce gouvernement.

Cependant, nous avons une réserve sur des louanges publiques pour que nos églises restent ouvertes aux personnes de toutes les opinions politiques.

Le pays a, depuis peu, rouvert ses frontières. Cela semble apporter de l’optimisme pour l’économie. De plus, le gouvernement se félicite d’avoir bien géré la pandémie, surtout à travers la campagne de vaccination. Peut-on, selon vous, s’attendre à de jours meilleurs en tenant en ligne de compte ces deux points ?

Nous nous réjouissons tous du redémarrage de l’économie, qui serait aujourd’hui à genoux si le gouvernement ne l’avait pas bien gérée à travers l’assistance aux entreprises. Les arrivées touristiques sont encourageantes. Cependant, le nombre de cas de contamination fait peur. Il faut espérer que nous parviendrons à traverser cette transition.

 

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