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Financement CSR : les ONG sur la corde raide

nef Les entreprises sont désormais tenues de verser 50 % de leurs fonds CSR à la National CSR Foundation.


Les ONG n’obtiennent que la moitié de la somme qu’elles demandent à la National CSR Foundation, alors même que celle-ci impose un plafond de Rs 3 millions. Elles sont plusieurs à être inquiètes, n’ayant pas de quoi soutenir leurs activités pour la prochaine année financière. Il existe toutefois la possibilité de négocier avec la fondation.

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La plupart des organisations non gouvernementales (ONG) sont rongées par l’inquiétude. Elles manqueront bientôt cruellement d’argent si la National Corporate Social Responsibility (NCSR) Foundation ne revoit pas sa position quant aux fonds qui leur ont été alloués. Les ONG interrogées expliquent avoir reçu tout au plus la moitié de la somme qu’elles ont demandée pour l’année financière 2019-20.

Le Défi Quotidien a déjà révélé que Caritas se trouve privée de Rs 10 millions à cause des nouveaux règlements du CSR. Ce n’est pas un cas isolé. Marlène Ladine, directrice de Chrysalide, ONG qui vient en aide aux femmes alcooliques et toxicomanes, explique : « Il nous faut Rs 300 000 par mois pour gérer nos centres, ce qui fait Rs 3,6 millions sur un an. Nous avons obtenu Rs 1,17 million. Pour la prochaine année financière, on nous donné la moitié de ce que nous avons demandé. »

Pourquoi uniquement la moitié ? « Ils ont dit qu’il y a beaucoup de demandes et d’ONG. Ils ont ajouté qu’ils n’ont pas beaucoup d’argent. Le jour, où il n’y aura plus de sous, il n’y aura pas 36 000 solutions : on fermera les centres », déplore Marlene Ladine.
ANFEN, engagée dans l’éducation informelle, est confrontée aux mêmes problèmes, comme l’explique Koomaren Vadeevaloo, le responsable. « Nous avons déposé trois demandes de financement. Deux d’entre elles ont été approuvées à 50 %. Ce sera impossible pour nous, avec un tel montant, d’opérer tous les services de nos 15 centres et de nous occuper des 1 000 jeunes bénéficiaires. »

Il estime que si d’ici un mois l’ONG ne reçoit pas le financement requis, les opérations seront affectées. « Nous sommes à la fin de janvier. Les projets ont été soumis fin août 2018. C'est trop long. Malgré le bon vouloir de la NCSR Foundation, nous restons dans le doute. Nous devrons éliminer certains services », regrette-t-il.

Géraldine Aliphon, d’Autisme Maurice, raconte une histoire similaire : « On a demandé Rs 3 millions alors que notre projet coûte Rs 4,2 millions. Nous n’avons obtenu que Rs 1,6 million avec une avance de Rs 800 000. »

Même les ONG qui pouvaient autrefois compter sur le soutien financier direct de l’État se retrouvent dans une situation délicate. C’est notamment le cas de la Blood Donors Association qui recevait une subvention du ministère de la Santé. « La NCSR Fondation nous a donné la moitié de la subvention », révèle le trésorier Dewanand Hossen. « Nous attendons l’autre moitié. Mais nous avons déjà entamé des démarches. »

La dernière subvention directe obtenue se chiffrait à Rs 263 000, alors que l’association n’a obtenu que Rs 134 000 de la fondation. Sans cette somme, difficile d’organiser toutes les activités de collecte de sang. Le budget annuel de la Blood Donors Association est de Rs 2,5 millions.  Au milieu de toute l’incertitude et l’angoisse, certains de nos interlocuteurs trouvent néanmoins qu’il y a du bon dans la NCSR Foundation. À l’instar de Marlène Ladine : « On ne recevait pas autant des CSR. Parfois, une entreprise pouvait vous financer une année, puis retirer ses fonds l’année suivante. La NCSR est plus fiable. »

Constat que fait aussi Koomaren Vadeevaloo. « La NCSR Foundation a ouvert une porte pour dialoguer avec les ONG. Elle nous a proposé de réduire certaines dépenses. » Face à la demande de réviser les 50 % du financement demandé, la réponse est la même : il y a une grande demande et la fondation fera son maximum.


Ce qui a changé

C’est en 2017, dans son discours budgétaire, que Pravind Jugnauth annonce le gros changement dans le système de Corporate Social Responsibility (CSR). Les entreprises ne peuvent dès lors plus injecter l’argent de leur CSR directement dans des projets des ONG. Elles doivent remettre 50 % de cette somme à la National CSR Foundation, créée pour redistribuer les fonds aux ONG qu’elle juge les plus méritantes. Les entreprises peuvent alors disposer des 50 % restants à leur guise. Puis l’année dernière, le seuil de contribution à la fondation passe à 75 %. Les entreprises ne peuvent disposer que de 25 % de leurs fonds CSR. Celles ayant déjà démarré un projet correspondant aux guidelines de la National CSR Foundation peuvent cependant conserver jusqu’à 25 % supplémentaires, donc les 50 % de 2017.  Durant sa première année d’opération, la National CSR Foundation a financé 230 projets d’ONG pour un coût total de Rs 201,8 millions. Un plafond de Rs 3 millions est imposé pour chaque projet.


Menon Munien, président de la National CSR Foundation : «On tente de trouver un juste milieu»

Les ONG peuvent-elles espérer plus de la National CSR Foundation ? C’est une éventualité à ne pas écarter. « Nous avons un comité d’appel indépendant auquel les ONG peuvent recourir. Nous examinons les demandes et nous faisons une analyse critique pour formuler une proposition », explique Menon Munien, président de la fondation. Il ne s’agit pas d’une proposition finale, assure-t-il. Il est, selon lui, toujours possible d’en discuter. Ce que font déjà certaines ONG, affirme-t-il. « On tente de trouver ensemble un juste milieu. »

Quid de la politique de ne proposer que la moitié de la somme demandée ? « Il y a un aspect de monitoring et de mentoring. Souvent nous donnons la moitié, voire un tiers. Nous décaissons la somme par tranches et nous suivons le projet. » Il soutient que si les ONG utilisent l’argent convenablement, elles obtiendront les fonds sans discussions. Sauf que certaines ne respectent pas les règles, dit-il.

La National CSR Foundation compte également proposer de nouvelles formules au courant de l’année. « Début février, nous lancerons un Special Call for Proposals. Nous nous attaquerons à un secteur en particulier et nous essaierons d’avoir un impact sur ce domaine en travaillant avec toutes les ONG qui y opèrent. » Il est possible que plusieurs ONG aient donc à travailler sur le même projet. L’idée est encore naissante et la National CSR Foundation en est encore à l’étape de la définition des possibles thématiques. « Il y en aura plusieurs éventuellement, mais je crois commencer avec un thème pour démarrer et une fois qu’on aura un modèle qui fonctionne, on pourra le reproduire sur quatre ou cinq autres thèmes », conclut Menon Munien.

  • LDMG

 

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