Rebelote. Pour la troisième fois, les écoles sont fermées en raison de la situation pandémique actuelle dans le pays. C’est ainsi que, depuis le jeudi 11 novembre, les cours sont assurés en ligne et sur les chaînes de la télévision nationale. Pour la majorité des élèves et des parents, ce n’est pas nouveau, mais y sont-ils mieux préparés ? Éléments de réponse.
Laqksayu Somera, Grade 13 : « C’est extrêmement difficile, surtout psychologiquement »
Laqksayu Somera, élève en Grade 13, indique qu’à son collège, les cours en ligne sont bien organisés : « On n’a pas vraiment de difficultés par rapport à la continuité de notre programme d’études. » Il ajoute que grâce au système mis en place, « c’est un soulagement de savoir qu’on a un médium assuré et familier pour continuer le travail qu’on a commencé ». À son niveau, il a refait un nouvel emploi du temps « pour gérer efficacement cours en ligne, devoirs, révisions » et son temps personnel.
Néanmoins, confie-t-il, cette situation, suivant les deux confinements, n’est pas sans conséquence sur le moral des apprenants. Laqksayu Somera parle même d’une grande frustration : « La plupart des élèves sont vraiment frustrés. C’est extrêmement difficile, surtout psychologiquement, car nous avions eu l’opportunité de rencontrer nos amis et enseignants en face à face après plusieurs mois. »
Il se dit toutefois conscient que « nous n’avons pas le choix ». Et pour Laqksayu Somera, « il faut s’adapter et se débrouiller pour pouvoir réussir les examens qui nous attendent l’année prochaine, même pendant la pandémie de Covid-19 ».
Christelle Joanna Jacquette, Grade 12 : «J’essaie de me réadapter pour ne pas décrocher»
Sa plus grande peur, c’est le décrochage scolaire. « Avec la fermeture répétée des écoles, la peur de ne pas pouvoir atteindre mes objectifs académiques et d’être à la traîne dans les cours en ligne a été le principal défi que j’ai rencontré », partage Christelle Joanna Jacquette, élève en Grade 12.
Pour ne pas décrocher, elle dit avoir élaboré un emploi du temps qu’elle compte suivre à la lettre : « J’ai fait un plan très détaillé et j’en ai informé ma famille, afin de pouvoir étudier sans interruption. »
Et comment se motive-t-elle ? Faire des pauses permet d’améliorer la concentration, observe-t-elle. « Pendant mes pauses, j’essaie de faire quelque chose de relaxant, plutôt que de rester au téléphone. C’est ainsi que j’essaie de me réadapter pour ne pas décrocher », dit Christelle Joanna Jacquette.
Taksheel Goorye, Grade 12 : «Je mets l’accent sur le ‘self-learning’»
Pour Taksheel Goorye, 17 ans, élève en Grade 12, c’est difficile de s’adapter à un système en ligne « monotone ». « Le lien entre élèves et enseignants est coupé, malgré la connexion virtuelle », soutient-il. Il estime d’ailleurs que « les classes en ligne ne sont pas assez captivantes et le risque d’une perte d’intérêt est élevé ».
L’adolescent fait aussi ressortir que ne pas avoir la possibilité de poser des questions ou faire des discussions « rend l’éducation monotone ». Sans compter, observe-t-il, que « sans l’aspect social de l’éducation, nos capacités en tant que membres de la société ne peuvent se développer pleinement ».
Alors, pour ne pas être à la traîne, il dit mettre l’accent sur le « self-learning ». « Je tente de m’adapter avec un plan de travail détaillé. Le self-learning est primordial. Et pour éviter le stress, je communique souvent avec mes amis grâce aux réseaux sociaux. »
Chloé, Grade 5 : «L’encadrement de mes parents est primordial»
En sus de ses cours en ligne et de ses leçons particulières, Chloé, qui est en Grade 5, dit faire du self-learning : « Zoom est un outil auquel je me suis habituée durant les deux confinements. De ce fait, ce n’est pas quelque chose de nouveau pour moi. » Elle explique que, grâce à cette plateforme, elle suit les classes « avec plus d’attention en comparaison aux cours télévisés ».
Chloé confie que l’encadrement de ses parents est d’une grande aide : « Je reste motivée et je veux toujours en faire plus, car mes parents font le suivi avec moi et m’encouragent à faire mes révisions par moi-même. » Elle est catégorique : « L’encadrement de mes parents est primordial pour la continuité de mes études à la maison. »
Vinod Seegum : «Les cours télévisés sont en constante amélioration»
Selon Vinod Seegum, président de la Government Teachers Union (GTU), les cours télévisés destinés aux élèves du primaire sont mieux préparés : « Cette année, les cours sont préparés de manière plus professionnelle, avec un groupe d’enseignants au Mauritius Institute of Education (MIE) qui s’y sont consacrés. »
L’engouement des parents en témoigne, fait-il valoir. « Ils ont exprimé leur satisfaction devant l’amélioration des cours, avec la disponibilité d’un emploi du temps et la possibilité de revoir les cours. »
Vinod Seegum indique, d’autre part, que le ministère de l’Éducation a fait appel à la GTU pour aider à conceptualiser des vidéos de façon professionnelle dans les studios du MIE et à l’Open University. « Il y a de l’engouement parmi les enseignants, qui souhaitent donner un coup de main. Les cours télévisés connaissent une amélioration constante », assure-t-il.
Nadège Adisson, parent d’élève : «Une bonne organisation s’impose»
Mère d’une élève du primaire, Nadège Adisson explique qu’une bonne organisation est primordiale. Certes, dit-elle, l’éducation est assurée par les cours en ligne. Mais elle insiste sur un point : « faire le suivi est très important, car les enfants n’ont pas le même encadrement qu’ils recevaient à l’école avec l’enseignant. Cela devient très difficile pour les enseignants de veiller sur chaque enfant. D’où le rôle crucial des parents. »
Elle dit s’assurer que sa fille fasse ses révisions par elle-même, après les cours en ligne dispensés par son enseignant de leçons particulières : « Cela lui permet de garder le rythme et de ne pas décrocher. »
Marie-Ange Kali Din, parent d’élève : «J’endosse le rôle de l’enseignant»
Marie-Ange Kali Din dit faire le suivi avec sa fille, qui est en Grade 2 : « Je dois m’organiser pour finir toutes mes tâches, afin de m’asseoir avec elle, de 10 heures à midi, pendant la diffusion des cours télévisés. »
Comme sa fille est encore toute petite, dit-elle, elle a besoin de plus d’attention : « Je dois pleinement me consacrer à elle, car les cours télévisés vont trop vite pour elle. Je dois lui faire des notes et lui réexpliquer les cours. J’endosse le rôle de l’enseignant. » Ce n’est, du reste, pas nouveau pour Marie-Ange Kali Din. « Cela a été le cas pour mes deux filles durant les deux confinements », précise-t-elle.
Les conditions nécessaires à l’apprentissage en ligne
Les cours en ligne demandent davantage d’implication de la part des apprenants. Première observation de Bhojeparsad Jugdamby, président de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE). La balle, fait-il comprendre, est désormais dans le camp des élèves : « Dans le passé, les cours en ligne ont prouvé leur efficacité. Cela dépend beaucoup de l’intérêt personnel de l’élève et la priorisation de l’éducation. »
L’apport des parents est aussi essentiel, poursuit-il. Bhojeparsad Jugdamby parle même de « valeur ajoutée » : « Certains parents sont consciencieux et s’assurent que leurs enfants sont présents en ligne à l’heure requise. »
Le président de l’UPSEE est néanmoins conscient que tous les parents n’ont pas la possibilité de rester avec leurs enfants, car ils travaillent. « Cela devient alors difficile d’avoir un contrôle sur eux. Certains enfants manquent de motivation et le fait d’être livrés à eux-mêmes n’arrange pas les choses. Ils ont besoin d’un guide pour les encadrer et le soutien parental est alors primordial à la réussite de l’online learning », estime-t-il.
Autre problème, selon lui : « toutes les familles n’ont pas les mêmes moyens financiers. Si nous voulons que tous les enfants reçoivent la même éducation, les outils doivent être uniformes. Ce n’est pas un problème nouveau. » Raison pour laquelle il préconise de rendre accessibles différents outils, afin de permettre aux enfants, indistinctement de leur classe sociale, d’avoir accès à l’éducation en ligne.
Pour Bhojeparsad Jugdamby, le système d’apprentissage doit être amélioré : « Nous n’avons pas encore tout exploré. Le ministère de l’Éducation a mis en place un programme, mais il faut l’appliquer et l’étoffer constamment. »
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