Depuis vendredi, une circulaire du ministère du Commerce demande de limiter la vente d’huile comestible à un maximum de deux litres par personne. C’est après les restrictions annoncées par certains pays pour l’exportation d’huile vers Maurice. Ce qui a provoqué le panic buying durant ce week-end.
La situation n’est pas facile, avance Rajshree G. qui est dans la vente de gâteaux frits. « On est impuissant face à ce qui se passe. Malgré la hausse de prix, nous devons acheter de l’huile qui est un produit essentiel pour les marchands de gâteaux frits. Nous avons besoin d’au moins cinq litres d’huile par jour. Un quota de deux litres nous pose problème », indique-t-elle. Elle souligne que pour des raisons de santé, elle doit régulièrement changer l’huile pour la friture.
Elle estime que les autorités doivent trouver une formule pour les commerçants dont l’un des produits de base pour leur opération est l’huile. « On aurait pu augmenter le quota pour les marchands. Pour un contrôle et pour éviter des abus, on peut présenter notre permis d’opérateur », dit-elle. F. R., un marchand de gâteaux frits, abonde dans le même sens. Elle a pu se constituer un stock. « Plusieurs membres de ma famille se sont rendus dans divers supermarchés. Ce n’est pas plaisant. Mais on n’a guère le choix, car l’huile est essentielle pour notre commerce. Au quotidien, on utilise quatre litres. Même si les prix continuent d’augmenter, on en achète, car c’est notre gagne-pain. Les autorités doivent avoir de la considération pour nous et assouplir cette mesure », fait-elle observer.
Deepak Doolooa, gérant du restaurant Kesar, avance que pour le bon déroulement de ses activités, il lui faut au moins dix litres d’huile par jour. « Les restaurants ne peuvent pas opérer avec deux litres d’huile par jour. Si cette restriction perdure, nous ne pourrons pas opérer. Je pense qu’il faut une formule différente pour les commerces », lance-t-il. Il garde espoir que les autorités vont éclaircir les commerçants sur la question.
Ajmal Tincowree, un des trois co-propriétaires de Food Factory, indique qu’il dispose d’un stock qui s’épuisera dans quelques jours. « Il faudra trouver une alternative. Sinon, on va devoir revoir notre menu. Un assouplissement de cette mesure pour les commerces serait temporaire. Il faut trouver des solutions à long terme. L’huile est un produit très utilisé. Les fournisseurs doivent remédier à la situation », fait-il ressortir.
Rencontre entre le ministre Callichurn et des distributeurs d’huile ce lundi
Selon nos recoupements, c’est ce lundi 21 mars qu’est prévu un tête-à-tête entre le ministre du Commerce, Soodesh Callichurn, et des distributeurs d’huile du pays. Le ministre a demandé à la population de ne pas céder au « panic buying », car d’autres sources d’approvisionnement ont été identifiées. Il soutient qu’il n’y a aucune pénurie. « Dans les jours à venir, d’autres cargaisons seront livrées », assure-t-il
Plusieurs méthodes de cuisson sans l’huile
Ayushi Gooroochurn (chef Yu) indique qu’il existe plusieurs façons de préparer les repas en utilisant d’autres huiles que l’huile de tournesol ou peu d’huile. On peut aussi ne pas utiliser d’huile. « Il y a des substituts comme le beurre. Les personnes qui cuisinent de la viande et du poulet peuvent le faire dans un poêlon très chaud. La viande ou le poulet va rendre du gras naturel et la cuisson peut se faire avec. C’est valable pour le poisson aussi », précise chef Yu. Selon elle, on peut aussi opter pour de l’huile de ricin, d’arachide, d’olive, d’avocat ou de sésame. « À la place de la deep frying, les personnes peuvent utiliser le four ou le grill », fait-elle ressortir.
Tina Bhogun : « Il est temps de revoir les habitudes alimentaires »
Selon la nutritionniste Tina Bhogun, « c’est le moment de revoir les habitudes alimentaires en utilisant moins d’huiles dans la préparation des repas ». Elle cite l’exemple des fritures qui sont très prisées par les Mauriciens. « Les gâteaux frits, dont raffolent plus d’un, ne nécessitent pas forcément une immersion dans l’huile. On peut les mettre au four. Les grillades, rôtis et steer fry sont recommandés », avance-t-elle.
Elle fait ressortir que l’huile qui surchauffe et brûle a tendance à libérer des radicaux libres responsables du cancer. « L’huile qui est chauffée et réchauffée développe le mauvais cholestérol », précise-t-elle.
Elle recommande l’utilisation d’ustensiles de cuisine antiadhésifs. Sinon, elle précise qu’il existe des substituts à l’huile de tournesol : l’huile de coco qui a des propriétés antioxydantes.
« Les personnes peuvent aussi utiliser de l’eau pour la cuisson à la place de l’huile », dit-elle.
Moroil dispose d’un stock suffisant
Un autre gros distributeur de plusieurs marques d’huile, Moroil rassure la population. Dans un communiqué, le dimanche 20 mars, la compagnie dit disposer d’un stock pour approvisionner le pays durant les prochains mois. « Nos équipes travaillent sans relâche pour assurer la production et la livraison de l’huile de manière régulière. Cependant, c’est le ‘panic buying’ de ces dernières semaines qui complique la situation. Nous faisons appel au patriotisme mauricien pour acheter de manière raisonnable, afin d’éviter ce ‘panic buying’ qui prive des familles de la possibilité de s’approvisionner normalement », indique le communiqué. Moroil distribue les marques d’huile : Rani, Moroil Soya, Moroil Sunflower, entre autres.
Sharon Ramdenee : «Une cargaison d’huile en transit»
Dans une déclaration au Défi Quotidien, le dimanche 20 mars, la CEO d’Agilis, un gros importateur d’huile du pays, qui commercialise les marques Orient et Leader se veut rassurante. « Nous avons déjà un stock d’Égypte. Une cargaison d’huile est déjà en mer et en transit. Elle arrivera incessamment au pays. Il y a un autre stock en production qui sera embarqué bientôt », explique Sharon Ramdenee.
Elle précise qu’il y a suffisamment de stock sur le marché. « Les étagères de certains supermarchés étaient vides, Agilis les a remplies. Il n’y a pas lieu de paniquer. Malgré la situation dans le monde, des mesures ont été prises pour fournir adéquatement le marché », déclare-t-elle.
Jaganathan Rangan : «Le public a agi de manière déraisonnable»
Il n’y a aucune pénurie d’huile comestible sur le marché local. Assurance donnée par le Permanent Secretary du ministère du Commerce. Selon lui, la limitation de deux litres d’huile par personne a pour but de dissuader les consommateurs de faire du stock. Le rationnement est instauré pour encourager l’achat raisonnable. « La surveillance du marché a démontré que le public a agi de manière déraisonnable. On a envahi les rayons et on les a vidés. Les rayons ont été remplis. Il n’y a pas de pénurie. La limitation sur la vente d’huile est une mesure pour empêcher le public d’acheter en excès », lance Jaganathan Rangan.
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