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Décès de patients dialysés: les familles toujours en quête de vérité et de justice 

Canavady Pillay Ramsamy souhaite un tête-à-tête avec le ministre de la Santé. Sarodinee Devi Ramsamy, 57 ans était une patiente dialysée depuis 12 ans et a été testée positive. Dharmanand Beesoo, l’un des patients dialysés décédés allait fêter ses 57 ans le 26 juin dernier.
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Cette semaine, les familles des 11 patients dialysés décédés en 2021 ont été confrontées à la douleur ravivée quand les conclusions du rapport du Medical Neglecting Standing Committee (MNSC) qui était chargé d'examiner les allégations de négligence médicale dévoilées par Radio Plus. Quatre cas de négligence ont été identifiés, tandis que dans les autres situations, le comité n'a pas pu trancher en raison de documents manquants. Les familles gardent espoir que la vérité éclatera au grand jour quant à l’agonie et le traumatisme qu’ont vécus les victimes tant à l’hôpital de Souillac qu’au centre de quarantaine de Tamassa. 

Depuis la tragique disparition des 11 patients dialysés en 2021, les familles sont plongées dans un abîme de détresse émotionnelle. Elles sont désespérément à la recherche de réponses quant aux circonstances entourant les décès de leurs proches  survenus de manière soudaine et inattendue.
 
Alors qu'elles nourrissaient l'espoir que le Comité d'enquête révélerait la vérité sur le sort tragique des 11 patients dialysés, leurs attentes ont été déçues en mars dernier lorsque le ministre de la Santé, le Dr Kailesh Jagutpal, a annoncé que le rapport ne serait pas rendu public. Malgré cela, les proches n'ont pas baissé les bras et ont continué d'exiger que le rapport soit divulgué, mais jusqu'à présent, leurs demandes sont restées sans réponse.

Rapport gardé secret 

Par la suite, une lettre leur a été envoyée, leur informant que seules deux personnes avaient été officiellement reconnues comme victimes de négligence médicale. Cette révélation a déclenché l'indignation des autres familles et du secrétaire de la Renal Disease Patients Association, Bose Soonarane. 

Face à cette situation, c'est le Medical Negligence Standing Committee (MNSC) qui a pris le relais pour mener l'enquête. Cependant, une fois de plus, le rapport final soumis au ministère de la Santé a été gardé secret. Malgré cela, les conclusions du rapport ont fuité, mettant en évidence que le comité avait identifié quatre cas de négligence.

Cette affaire a récemment été mise en lumière lors de la séance de PNQ de mardi dernier. Kailesh Jagutpal a une fois de plus mentionné qu'il y avait seulement deux cas de négligence, ce qui a provoqué une vague de colère parmi les familles des victimes qui accusent ouvertement le ministre de « cacher la vérité ». Cette dissimulation ne fait qu'intensifier leur douleur d'avoir perdu leurs êtres chers, contraints de se retrouver en quarantaine à l'hôtel Tamassa, même si certains d'entre eux n'étaient pas positifs à la Covid-19.

Pertes tragiques

Au fil du temps, la frustration et la colère grandissent au sein des familles. Elles veulent désespérément obtenir des réponses claires et une transparence totale pour pouvoir faire leur deuil et obtenir une certaine forme de réparation pour les pertes tragiques qu'elles ont subies. Parmi, on retrouve Canavady Pillay Ramsamy, un ancien maçon de profession âgé de 64 ans. Son épouse, Sarodinee Devi Ramsamy, 57 ans, était sous dialyse depuis 12 ans. 

Centre de quarantaine

À l'origine, son test était négatif, mais après 15 jours, le résultat s'est révélé positif. Notre interlocuteur se confie  : « Nous étions en contact tous les jours alors qu'elle était en quarantaine. De plus, j’allais la voir pendant ses séances de dialyse à Souillac trois fois par semaine. Elle me confiait qu'il y avait des problèmes, que les séances de dialyse se déroulaient mal et que la nourriture était de mauvaise qualité ».

Pendant 12 ans, sa femme a survécu grâce à leur attention et à leurs soins à domicile, mais tout a changé lorsqu'elle a été emmenée par les autorités vers un centre de quarantaine. C'est à partir de ce moment que tout a basculé. « Chez nous, nous prenions soin d'elle, tandis que là-bas, elle était livrée à elle-même. Elle se plaignait constamment de cette situation », se souvient-il.

Canavady Pillay Ramsamy indique que sa défunte épouse lui avait confié que les séances de dialyse duraient seulement deux heures au lieu des quatre habituelles. De plus, il révèle qu'une douzaine de personnes, qu'elles soient positives ou négatives, étaient transportées ensemble pour ces séances de dialyse. Sa femme est décédée le 21 avril 2021. « Le lundi, elle m'a appelé pour me dire qu'elle n'avait pas encore fait sa dialyse et qu'elle se sentait mal. Ils ont attendu que la femme avant elle termine sa séance de dialyse avant de commencer celle de mon épouse. La femme est décédée, et le lendemain, mon épouse a rendu l’âme. C'est une négligence totale. Le ministre Jagutpal tente de dissimuler la vérité », s'indigne-t-il avec véhémence.

Sentiment de désarroi

Il exprime un sentiment de désarroi face à cette situation. « Nous avons besoin de la vérité. Nous devons avoir accès au rapport. Au Parlement, le ministre ne dit pas tout, car il y a un arbitre. Dites-lui de venir au No. 13 (Rivière-des-Anguilles-Souillac) où il a été élu, pour une discussion en face à face. Nous lui poserons des questions directes. Nous voulons connaître la vérité et obtenir une compensation », déclare Canavady Pillay Ramsamy avec détermination.

Il évoque une immense perte et souligne également l'épreuve douloureuse qu'ont été les funérailles. « Nous n'avions pas le droit de regarder. Ils ont utilisé une pelle mécanique pour creuser la tombe et pour l'enterrer. Je n'ai pas pu voir mon épouse une dernière fois. J'ai des regrets. Elle était bien chez nous, assise et souriante. Elle a été forcée d'aller en quarantaine et elle n'est jamais revenue », se lamente notre interlocuteur, gardant précieusement tous les souvenirs de la victime intacts.

Repas pas adaptés 

Vimi Beesoo, une baby-sitter de 53 ans, a été confrontée à une tragédie. Son époux, Dharmanand, aurait célébré son 57e anniversaire avant-hier, mais il est décédé à l'âge de 55 ans alors qu'il était en quarantaine avec d'autres patients dialysés. Elle exprime avec fermeté : « Je suis convaincue qu'ils cachent des choses et qu'ils mentent énormément. Ils m'ont envoyé une lettre affirmant qu'il n'y avait pas eu de négligence médicale. Cependant, Bose Soonarane insiste sur le fait qu'il ne laissera pas tomber, car il y a bel et bien eu de la négligence. Je suis du même avis », souligne cette habitante de Baie-du-Cap. 

Poulet bouilli et du riz 

Elle affirme que lors de leurs conversations téléphoniques, son époux lui faisait part de son mécontentement concernant les repas qui n'étaient pas adaptés aux personnes dialysées. Il mentionnait que le médecin ne proposait pas de repas de qualité et que la nourriture laissait à désirer. « Nous parlions tous les jours et il se plaignait constamment de la nourriture. Il me demandait de lui apporter à manger, mais il n'avait pas la permission de sortir. Ils lui servaient du briani, du poulet bouilli et du riz. Or, depuis qu'il avait commencé la dialyse il y a un an, il n'appréciait pas le poulet», confie-t-elle.

Vimi Beesoo indique que son époux avait faim à chaque séance de dialyse à l'hôpital. « C’est pourquoi je le préparais un petit en-cas, mais quand il rentrait à la maison, il était affamé. À l'hôtel, il n'a pas pu manger suffisamment pour reprendre des forces. Il était seul, et lorsqu'un de ses amis qui subissait également la dialyse est décédé, cela l'a anéanti. Le lendemain, mon époux a lui aussi perdu la vie. Ce jour-là, il est sorti de sa séance de dialyse à 23 heures et il est décédé dans sa chambre, sans que personne ne soit au courant », déplore-t-elle.

Elle souligne qu'elle était consciente de la fragilité des patients dialysés et qu'il était inévitable qu'ils succombent tôt ou tard. « On dirait que leur mort a été hâtée. Des négligences ont eu lieu à différents niveaux. Rien que d'y penser, cela me fatigue mentalement. Je suis constamment tourmentée par cette terrible situation que mon époux a endurée jusqu'à sa mort, alors qu'il n'avait même pas été testé positif », déclare-t-elle avec une vive émotion.

En détresse

Dharmanand, explique-t-elle, était un passionné de sport et passait beaucoup de temps à regarder la télévision et à surfer sur son téléphone portable. « En quarantaine, il n'y avait pas de wifi, pas de télévision. C'était comme s'il avait été mis en prison. Enfermé sans aucune forme d'assistance, il a finalement perdu la vie », ajoute notre interlocutrice. 

Annick, dont l’époux fait partie des victimes, passe par des moments extrêmement difficiles depuis la divulgation des conclusions du rapport du MNSC par la presse. « Il y a des vérités qui nous sont cachées. J'ai été choquée en entendant la réponse du ministre. Lorsqu'il prétend que le choix de la nourriture était la responsabilité du patient, c'est totalement faux. Mon mari était en détresse et profondément agacé par toute cette situation », indique-t-elle.

Certes, elle ne souhaite pas accuser le ministre de « mentir », mais il est possible qu'il n'ait pas été correctement informé sur les événements. « Mon époux devait se faire vacciner contre la Covid-19, mais il n'a pas pu recevoir le vaccin, même s'il lui avait été demandé de fournir sa carte d'identité lorsqu'il s'est rendu en quarantaine. La décision ne nous appartenait pas. C'était l'hôpital qui prenait la décision », avance-t-elle, soulignant les problèmes de communication et les obstacles qu'ils ont rencontrés tout au long de cette tragédie.

Tristesse et dégoût

Elle remet en question sa compréhension de l'anglais après avoir entendu les réponses de Kailesh Jagutpal concernant le transport des patients dialysés de l'hôtel à l'hôpital. « Il prétend qu'il y avait 5 à 6 personnes, ce qui est encore une fois faux. En réalité, il y avait entre 12 et 14 personnes transportées ensemble. Mon époux m'en a fait part », affirme-t-elle. Annick confie aussi que son mari lui a rapporté des cas où des patients sont décédés sans aucune assistance médicale. « Ces pauvres patients ont été éloignés de leur famille. Quand j'entends ces réponses, cela me remplit non seulement de tristesse, mais aussi de dégoût », déclare-t-elle avec une pointe d'amertume.

Situation préoccupante 

Notre interlocutrice considère que cette situation est profondément préoccupante et insiste sur le fait qu’elle souhaite connaître la vérité sur la mort de son époux. « Donnez à chaque personne son rapport. Même en ce qui concerne les compensations, on nous mène en bateau. Pour être franche, je ne veux même pas de compensation. Ne mentez pas sur la dépouille, dites la vérité. Tout ce que je veux, c'est la vérité », dit-elle.

Annick ajoute que récemment, le ministre de la Santé a évoqué des erreurs administratives. « Qui est responsable de cela ? Qui est l'administrateur ? C'est épuisant et révoltant. Ces allers-retours pour témoigner devant les comités. On nous prend pour des idiots. Cela fait deux ans et trois mois. Cela m'a brisée. Il est temps de mettre fin aux mensonges et aux manipulations. Au début du mois de mai, je reçois une lettre affirmant qu'il n'y a pas eu de négligence, et maintenant le MNSC parle de négligence dans le cas de mon époux », explique-t-elle.

Sentiment de révolte

Aziza Unjore, dont son époux fait partie des 11 patients décédés, partage le même sentiment de révolte. Pour elle, il est indéniable qu'il y a eu négligence dans le cas de son époux. « Il a été infecté huit jours après. J'avais même fait une demande pour qu'il puisse s'isoler à la maison, où nous vivions seuls dans une grande maison. Au moins, il aurait pu recevoir les soins nécessaires, alors qu’en quarantaine, il était livré à lui-même », dit-elle.

Aziza Unjore affirme qu'elle avait également fait une demande pour pouvoir accompagner son époux en quarantaine à l'hôtel Tamassa. Elle avait même préparé son sac, mais malheureusement, son époux est décédé. « Ces personnes savent qu'elles ont mal fait leur travail. Qu'elles l'admettent au lieu de mentir. Soyez honnêtes, soyez sincères. Si vous avez commis une erreur, assumez-la. Que justice soit rendue aux victimes », réclame-t-elle avec fermeté.

Les leçons à retenir

Le président de la Renal Disease Patients Association, Bose Soonarane, est catégorique. Il ne s’agit pas seulement de quatre cas de négligence. Les 11 patients dialysés décédés sont tous concernés. « Tous les patients sont touchés, mais il n'y a aucune preuve, car certains documents ont disparu. De plus, il y a des informations indiquant que les séances de dialyse étaient raccourcies, passant de quatre heures à seulement deux heures », déplore-t-il.

Il souligne que la vaccination était disponible dès janvier 2021 et aurait pu contribuer à sauver la vie des patients dialysés décédés. Il demande instamment qu'une enquête judiciaire soit lancée pour faire toute la lumière sur ces cas. « J'ai déjà écrit au Directeur des Poursuites Publiques. J'espère sincèrement qu'il prendra l'initiative, en faisant preuve de sagesse », ajoute-t-il.

Bose Soonarane déplore aussi le fait que l’Equal Opportunity n’ait pas primé dans le cas des patients dialysés. « L'hôpital ENT avait été aménagé pour les patients positifs à la Covid-19. On aurait pu envisager l'installation d'un appareil de dialyse mobile et d'une unité de traitement de l'eau pour ces personnes. Malheureusement, cela n'a pas été le cas. Elles ont été transférées à Souillac, où le personnel et les équipements nécessaires faisaient défaut. Même les véhicules utilisés pour leur transport n'étaient pas adaptés et ne disposaient pas d'oxygène », critique-t-il avec indignation.

Aucun plan de préparation

Pour sa part, le Dr Vasant Gujadhur, ancien directeur des services publics de santé, demande à Kailesh Jagutpal de « prendre ses responsabilités en cas de défaillances administratives, tout comme le corps médical et paramédical impliqué dans les cas de négligence ». Il souligne qu'au cours de la première vague, alors qu'il était en charge, un plan avait été mis en place dès janvier 2020, sachant que la Covid-19 allait éventuellement atteindre nos côtes. « Pendant la deuxième vague, ils avaient suffisamment de temps pour se préparer. Cependant, il n'y avait aucun plan de préparation, même après huit mois écoulés. Les patients n'avaient même pas été catégorisés en fonction de leur vulnérabilité », fait-il ressortir.

Il souligne que le ministère de la Santé avait un « duty of care » envers ces patients qui ont été contraints de se mettre en quarantaine, qu'ils soient positifs ou non. « Il y a eu des lacunes, et si ce n'est pas de la négligence, où se situe le problème? Le Medical Negligence Standing Committee affirme ne pas avoir pu attribuer les défaillances à des personnes spécifiques. Le ministre lui-même est responsable de l'administration. Ne devrait-il pas assumer sa responsabilité ? Les administrateurs de l'hôpital de Souillac et de Nehru n'auraient-ils pas dû faire une évaluation sur place ? » se demande-t-il.

Didier Lesage : « Nous avions été emmenés à l’abattoir »

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Didier Lesage est l’un des rescapés et dit devoir son salut au vaccin.

Didier Lesage, l'un des rares patients dialysés ayant survécu, exprime sa colère et sa tristesse face au fait que le rapport n'a toujours pas été rendu public. Il est encore profondément marqué par les traumatismes qu'il a vécus et se considère chanceux d'avoir survécu contrairement aux 11 victimes. Il souligne qu'il avait patienté dans la file d'attente pour se faire vacciner et pense que cela a joué un rôle dans sa survie.

Formalités administratives

« Je suis un témoin oculaire. J'ai personnellement vécu les événements qui se sont déroulés le 26 mars 2021. J'ai reçu un appel m'informant que j'allais devoir me mettre en quarantaine, car des patients dialysés avaient été contaminés. Vers 17 heures, une ambulance est arrivée pour me récupérer et m'a conduit à Britannia, à bord d'un bus où certains patients étaient contaminés et d'autres ne l'étaient pas. Nous étions entassés les uns sur les autres », se remémore-t-il. Ensuite, ils sont arrivés à l'hôtel Tamassa peu après minuit. « Nous avons dû passer par des formalités administratives et on nous a conduits chacun dans notre chambre sans avoir la possibilité de manger. Le lendemain, nous avons reçu un petit-déjeuner, mais les repas fournis n'étaient pas du tout adaptés pour des patients dialysés », affirme-t-il avec indignation, soulignant qu'ils se voyaient servir du riz frit, des pâtisseries, et bien d'autres plats inappropriés.

Le dimanche, ils ont dû se soumettre à des tests de dépistage. Après une semaine, les résultats sont arrivés et ceux qui étaient positifs ont été transférés à l'hôpital de Souillac. C'est là que le cauchemar a commencé. « Nous avions été emmenés  à l’abattoir. Nous essayions de nous encourager mutuellement. Lorsque nous sommes arrivés à Souillac, on nous a conduits dans une salle infestée d'araignées. Les draps étaient sales. La cuisine était dans un état pitoyable, avec des rats dans le micro-ondes. Je ne pouvais même pas m'échapper à cause des règles imposées. Personne n'est venu à notre secours. Nous avons commencé à nettoyer la salle par nous-mêmes et avons réalisé des vidéos pour exercer une pression médiatique. Les problèmes se sont ensuite concentrés sur la nourriture », se souvient-il.

Décédés sans assistance médicale

Il souligne que la majorité des patients dialysés n'étaient pas positifs à la Covid-19 lorsqu'ils étaient à l'hôtel Tamassa. « Beaucoup ont contracté le virus lors du transport vers Souillac pour les séances de dialyse qui se déroulaient tard le soir, de 21 heures à 22 heures. Au lieu des quatre heures habituelles, nous avions droit à des sessions de deux heures seulement. Je me souviens d'une fois où, en rentrant à Tamassa, un patient en fauteuil roulant avait été laissé seul sous la pluie. Il pleurait et suppliait qu'on lui sauve la vie », relate-t-il, cet épisode le marquant toujours profondément.
« Le personnel se contentait de jeter les repas dans une boîte comme si nous étions des chiens. Nous étions forcés de partager cette nourriture, car ils ne le faisaient pas. En outre, il nous était interdit de recevoir des vivres de nos proches qui venaient les déposer pour nous », relate notre interlocuteur. Ce dernier évoque également la douleur de ceux qui sont décédés sans aucune assistance médicale, dans l'agonie et la solitude. « Certains étaient gravement malades et appelaient à l'aide, mais en vain. Le lendemain, il était trop tard. Ils étaient déjà décédés. Pendant les dix premiers jours, nous étions livrés à nous-mêmes et traités comme des animaux », se désole-t-il.

Vidéo datant de 2021

Deux ans après le décès des 11 patients dialysés lors de la deuxième vague de la Covid-19, Didier Lesage a rendu publique une vidéo datant de 2021 dans laquelle une infirmière déclare aux patients qu'aucun membre du personnel ne souhaitait travailler avec eux. Bien qu'il ait témoigné devant le Fact Finding Committee, il n'a pas été contacté par le MNSC. Il se tient toujours prêt à partager le calvaire qu'il a vécu, ainsi que celui des autres victimes.

Les points saillants des conclusions du rapport du MNSC 

Le rapport fait état de « serious failures and omissions » et mentionne que l’enquête a permis d’identifier quatre cas présumés de négligence médicale, alors que le ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, dans une déclaration publique, avait parlé de deux cas seulement.

Manquements et omissions 

Les conclusions du rapport mettent en évidence de graves manquements et omissions concernant les soins et la gestion de plusieurs cas, notamment les patients décédés Surwon, Beedassy, Unjore et Bissoo. Le comité a identifié des preuves évidentes de négligence et de mauvais traitements qui auraient pu contribuer à la détérioration de l'état de santé de ces patients.

Absence de documents

Le MNSC déplore « le chaos » dans le transport des patients dialysés vers le centre de quarantaine Tamassa. Le comité exprime aussi sa consternation concernant l’absence « déplorable, voire totale » de documents tels que les fiches de dialyse. « En réalité, il n’y avait aucun rapport ni aucune trace écrite permettant de confirmer le suivi des signes vitaux. Cela a rendu la tâche du comité difficile », est-il expliqué. 

Esseulés 

Le rapport souligne que les patients sous dialyse sont vulnérables et ont besoin d’un environnement « confortable and caring » avec toute l’assistance que nécessite leur état de santé. « Or, pendant leur quarantaine à Tamassa, ces patients ont tous été laissés seuls et ils ont dû se débrouiller par eux-mêmes ». 

Les cas de deux patients dialysés qui n’avaient pas été testés positifs à la Covid-19 et qui sont décédés alors qu’ils étaient en isolement dans des chambres du centre de quarantaine de Tamassa sont également évoqués. «Ils se sont effondrés et sont décédés seuls pendant la nuit, et tout cela est passé inaperçu jusqu’à ce que le personnel de l’hôtel leur apporte leur petit-déjeuner le matin du 29 mars et du 7 avril 2021 respectivement», indique le MNSC. 

Assistance inadéquate

Le rapport ajoute que dans ces circonstances, il est indéniable que le niveau d’assistance médicale et de soins infirmiers pour plusieurs des cas faisant l’objet d’une enquête était « gravement insuffisant, voire simplement inexistant ». « Une fois de plus, le manque de préparation, de disponibilité et l’absence de planification de contingence de la part des responsables de la direction du New Souillac Hospital ont conduit à une situation où des patients très malades ont été laissés sans surveillance », dit le MNSC. 

Sanctions 

De plus, dans certains cas où il y a eu négligence, « le comité n’a pas été en mesure d’attribuer la responsabilité du manquement aux soins à des personnes, en raison du manque de documents ou d’une mauvaise consignation des événements dans l’ensemble ».

Plaidoyer pour une compensation aux familles endeuillées et aux rescapés 

Xavier-Luc Duval plaide en faveur d'une compensation financière pour les familles des 11 patients dialysés décédés pendant la pandémie de Covid-19. Il soutient également que les autres patients dialysés ont également enduré des souffrances pendant leur quarantaine à l'hôtel et devraient également avoir droit à cette compensation. C’était lors d’une conférence de presse, mardi dernier, où il est revenu sur sa PNQ concernant les patients dialysés décédés en 2021. 

« Zot osi zot inn pass enn kalver, zot osi zot bizin konpansasion finanisyer », a-t-il déclaré. Xavier Luc Duval affirme également que le ministre Kailesh Jagutpal devrait présenter des excuses pour la souffrance infligée aux proches des 80 patients dialysés.

Jagutpal persiste et signe 

souillac
L’état d’insalubrité de l’hôpital de Souillac a été mis en avant par les patients qui s’y rendaient pour leurs séances de dialyse.

Le 9 mai 2023, alors qu’il répondait à une question parlementaire sur le dossier des 11 patients dialysés décédés, le ministre de la Santé soutenait que le Medical Negligence Standing Committee (MNSC) a soumis le rapport des enquêtes menées à son ministère. « Sur les 11 cas examinés, le rapport a conclu que deux patients n'ont pas reçu des soins médicaux adéquats. Les neuf autres cas ne présentaient aucune négligence. Par conséquent, mon ministère a référé les deux cas au Medical Council et au Nursing Council pour de nouvelles investigations. De plus, conformément à la pratique habituelle, le MNSC a déjà informé tous les plaignants des résultats de leur enquête », a-t-il déclaré. 

Alors que les conclusions du rapport du MNSC font état de quatre cas de négligence, il continue à parler de deux cas seulement. «  My ministry took cognizance of the report and noted that MNSC [Medical Neglience Standing Committee] did not make any specific reference of negligence to any officer in particular in the eleven cases of alleged medical negligence. It is understood that the MNSC, in light of this unprecedented event could not specifically pinpoint any person being negligent ». C’est ce qu’a déclaré, Kailesh Jagutpal, à l’Assemblée nationale, mardi dernier, alors qu’il répondait à la PNQ axée sur le décès des 11 patients dialysés. 

Il a déclaré que le ministère avait décidé de transmettre le cas au Medical Council et au Nursing Council pour mener une enquête approfondie. Il explique qu’en mars dernier, les familles des 11 patients décédés avaient été informées par lettre des résultats de l'enquête. Dans deux cas, il a informé les familles que l'affaire avait été renvoyée au Medical Council et au Nursing Council. Pour les neuf autres cas, le Medical Council a demandé que ces cas soient également examinés.

Xavier-Luc Duval, le leader de l’opposition, est revenu sur une réponse au Parlement le 9 mai dernier où Kailesh Jagutpal avait déclaré que seuls deux cas de négligence avaient été identifiés et que les autres cas ne présentaient aucune faute. Il a voulu savoir, à l’encontre de ce que dit le rapport lui-même, si le ministre avait mal informé la Chambre en disant que les neuf cas sont « devoid of any negligence ». Ce, à quoi, le ministre de la Santé devait affirmer qu’il maintient ce qu’il avait dit. Il est revenu sur sa réponse au début de son intervention, « where the MNSC has stated clearly that where there is an act of medical negligence, these cases have been referred to Medical Council and to other authorities for further investigations».

Concernant d’autres cas, Kailesh Jagutpal, a affirmé qu’il y a eu des manquements en termes, de transport, communication et d’autres facilités. Il a évoqué les conditions difficiles dans lesquelles les « frontliners » ont dû travailler durant la période de Covid-19.  « It was not the normal situation », a-t-il fait ressortir. Il a également évoqué un « manque de ressources ». « But we acted faithfully » a-t-il lancé.

Xavier-Luc Duval, se basant sur un document, a évoqué le « transport désastreux », de « nourriture inappropriée » aux patients, d’absence de « medical monitoring » dans deux cas et de « destruction » ou de manque de « documents ». Il pointe du doigt le ministre de la Santé. Selon le leader de l’opposition, « he is refusing to publish the report because he knows well that he is the person blamed in the report ».

Xavier-Luc Duval parle de « cover-up »

Selon le leader de l'opposition, il y a eu un « cover-up » pour dissimuler leur « incompétence ». Xavier-Luc Duval a interrogé le ministre de la Santé sur la possibilité d'accorder une compensation financière aux proches des victimes, car plusieurs d'entre elles sont décédées dans des conditions horribles. Certaines d'entre elles étaient les soutiens financiers de leur famille. Il a également demandé si le rapport serait remis aux proches des victimes.

Le ministre de la Santé devait répondre que l’enquête est en cours et qu’il faut attendre les conclusions de toutes les enquêtes. « […] obviously in cases where there is medical negligence or any forms of negligence, the ministry will definitely act according to the compensation, whatever the procedures we will act according to that ».

Lors de son intervention, Kailesh Jagutpal a souligné avec force que « si nous n'avions pas mis en place la quarantaine à ce moment-là, nous aurions été confrontés à des centaines de décès parmi les patients dialysés, les personnes atteintes de cancer, des centaines de décès parmi les travailleurs de première ligne, et des milliers de décès parmi les personnes souffrant de comorbidités et les personnes âgées ». 

Sept familles des victimes ont écrit au leader de l’opposition

Sept familles ont écrit au leader de l’opposition. Elles demandent la publication du rapport. Dans ce sillage, Xavier Luc Duval a déposé les lettres sur la table du parlement.

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