Débats à la mairie de Port-Louis - Reeaz Chuttoo : «Syndicats et partis politiques n’ont pas le même agenda»

Reeaz Chuttoo

Le porte-parole de la Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP) a défendu l’idée d’un syndicalisme indépendant de tout apparentement à un parti politique, faisant valoir une lutte qui doit s’ancrer dans un combat revendicateur pour l’ensemble des salariés. 

« Un syndicaliste ne doit pas faire de distinction dans son combat. Il doit défendre tous les salariés, peu importe leur coloration politique », a déclaré Reeaz Chuttoo lors d’un débat organisé par le parti Lalit sur le thème « Décolonisation », le jeudi 19 avril 2018, à la mairie de Port-Louis. Les autres participants étaient Pitch Venkasatamy, membre de Think Mauritius et ancien président de la Federation of Civil Service et  Rajni Lallah, de Lalit.

Animé par Rada Kistnasamy (Lalit), le débat avait pour objectif de dresser un état des lieux des luttes à Maurice, au moment où sont organisées des activités dans le cadre du 50e anniversaire de l’Indépendance et à une semaine de la Fête du Travail. S’il reconnaît que le combat syndical a connu des avancées notables depuis l’Indépendance et cela grâce à la dimension politique des revendications, l'animateur fait toutefois observer qu’il y avait eu un « fléchissement  » en 1982-1983, à cause de la « trahison » du MMM. Sur ce recul, dit-il, est venu se greffer l’introduction de la Higher Purchase Act, qui n’a fait qu’entraîner les classes populaires dans la spirale de l’endettement. « Dès lors, la priorité des travailleurs a été d’acheter à tout-va, en s’endettant. Les femmes se sont mises à travailler pour rembourser les dettes. »

Unité Syndicale

Selon le syndicaliste, les orientations économiques, la recherche des marchés de niche et le souhait de devenir compétitif ont modifié les structures du travail à Maurice. Certains syndicats se sont accommodés avec le système, en acceptant des compromis. « On n’a fait que repousser la surexploitation », fait observer Reeaz Chuttoo.Si l’absence d’unité syndicale est un des facteurs qui ont permis aux différents gouvernements et aux institutions financières internationales d’asseoir leur politique économique à Maurice, tel n’a pas été toujours le cas, selon Pitch Venkatasmy.

« Vers la fin de 1981, c’est un front syndical unitaire qui a obligé le gouvernement à refuser les conditions de la Banque mondiale, laquelle demandait à Maurice de réduire ses dépenses sociales et  supprimer des centaines de postes dans la Fonction publique. La leçon à tirer de ce combat, c’est qu’il avait une unité syndicale pour faire valoir la cause des salariés. »

Au nom de Lalit, Rajni a dressé une analogie entre la lutte syndicale en Afrique du Sud, qui a eu le soutien de l’African National Congress, avec à Maurice, le combat du Mauritius Labour Congress, qui était le bras syndical du Parti travailliste et la General Workers Federation, dont les dirigeants étaient aussi membres du MMM. « De 1969 à 1982, dira-t-elle, le MMM a pu contribuer davantage à la cause des travailleurs lors de son passage au gouvernement. » Mais la victoire de 60-0 aux élections législatives de 1982, le MMM commençait déjà à parler de « nouveau consensus social ». Et Rajni Lallah d'observer : « Il ne peut y avoir de consensus avec le patronat, dont la logique réside en l’exploitation des travailleurs. »

 

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