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Crise énergétique sans précédent : Maurice face à un risque de blackouts cet été 

La centrale de Fort Victoria est parmi celles sous haute pression.

Maurice se prépare à un été sous tension. Face à un réseau vieillissant et une demande croissante, le risque de coupures de courant devient réel. Pour éviter un black-out, le gouvernement explore plusieurs pistes d’urgence. Le hic est que certaines sont coûteuses. Maurice se trouve à un tournant. Sans solutions rapides, les coupures seront inévitables dès l’été 2025.

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À l’approche des mois d’été, période de forte consommation électrique, Maurice risque de faire face à une crise énergétique sans précédent. Alors que la capacité de production peine à répondre à une demande en constante hausse, de sérieuses craintes de blackouts émergent au sein des autorités. Le Central Electricity Board (CEB), selon des informations fiables, redoute des pénuries critiques pouvant entraîner des coupures tournantes (rotating cuts) similaires à celles observées en Afrique du Sud depuis des années.

Cette situation est exacerbée par le vieillissement des infrastructures et l’absence de solutions immédiates. « Très peu de solutions peuvent être mises en place pour pallier le problème. Trop de temps a été perdu ces dernières années alors que la fourniture d’énergie est aujourd’hui extrêmement tendue », explique une source proche du dossier.

Le 24 juin dernier, lors d’une session parlementaire, le ministre des Services publics et de l’Énergie, Patrick Assirvaden, répondait à une Private Notice Question (PNQ) de Joe Lesjongard, leader de l’opposition. Il avait  alors dressé un constat alarmant : en été 2024-25, la demande de pointe a atteint un record de 567,9 MW, dépassant de 42 MW les prévisions du CEB (544 MW). 

Cette surcharge a forcé le recours à des mesures d’urgence, notamment la sollicitation des hôtels pour qu’ils activent leurs générateurs de secours, permettant ainsi de soulager le réseau de 40 à 45 MW. Sans cette intervention, des délestages complets auraient pu paralyser le pays. Une situation similaire se serait présentée il y a quelques semaines. 

Un parc de production à bout de souffle 

Le parc de production du CEB, composé de centrales au charbon et de turbines à gaz, est à bout de souffle, avait affirmé Patrick Assirvaden. Des unités comme dans la centrale thermique de Savannah 1 (37 MW), la Centrale Thermique du Sud (30 MW), Fort George G8 (15 MW) et Nicolay G2 (20 MW) tombent régulièrement en panne. En avril 2025, 65 MW supplémentaires étaient indisponibles pour maintenance.

Parallèlement, 87 MW de projets sont en attente de connexion, ce qui complique davantage l’équation énergétique.

Ces défaillances, combinées à une demande accrue aggravent la situation. Les centrales à charbon fonctionnent 24 heures sur 24 et les turbines à gaz sont utilisées bien au-delà des périodes de pointe. Ce qui alourdit les coûts et polluent davantage. « Certains projets économiquement importants ne parviennent pas à être mis en place faute de pouvoir répondre à la demande en termes de courant », confirme une source.

À quelques mois d’une crise potentiellement « extrêmement difficile », selon des sources internes, Maurice se trouve à la croisée des chemins. Sans solutions rapides, les coupures tournantes pourraient devenir inévitables dès l’été 2025. 

Ces trois plans de secours explorés en vue de la tempête énergétique

1. Barge flottante : solution temporaire, coûteuse et incertaine 

Pour pallier cette crise, le gouvernement explore l’option des barges flottantes (powerships). Lors d’une mission en Turquie en avril 2025, Patrick Assirvaden a discuté avec son homologue turc de cette technologie dans laquelle la Turquie excelle. Un appel d’offres international a été lancé le 18 juin 2025 pour sécuriser une barge de 90 à 110 MW. La clôture de l’exercice est prévue le 15 août. 

Cependant, cette solution, bien que flexible, est coûteuse et incertaine. La forte demande mondiale pour ces barges et leurs risques environnementaux, malgré le respect des normes MARPOL (limitation du soufre à 0,5 %), rend leur mise en opération à Maurice improbable, même si la porte n’est pas encore entièrement fermée. 

En 2022, un appel d’informations avait déjà recueilli 18 propositions, notamment d’opérateurs d’Allemagne, des Émirats arabes unis, de Hong Kong, de Corée, de Chypre, de Finlande, de Malaisie, de la Turquie, des États-Unis et du Japon. Mais il n’y a eu aucune suite concrète. 
 

2. Turbines mobiles et LNG : des alternatives à l’étude 

Face à l’incertitude des « powerships », le CEB étudie la possibilité d’installer des centrales mobiles, capables de produire environ 30 MW chacune. Rapides à déployer car elles seraient connectées aux centrales existantes, elles restent cependant insuffisantes pour combler le déficit urgent estimé à 100 MW. 

Autre option à l’étude : le gaz naturel liquéfié (LNG). Une réflexion est en cours pour un appel d’offres international visant des machines fonctionnant au LNG. Déjà envisagé sous le ministre Ivan Collendavelloo, ce combustible pourrait remplacer les centrales à charbon polluantes et obsolètes, réduisant dans la foulée l’empreinte carbone. Le LNG, considéré comme une option intermédiaire, permettrait de réduire l’empreinte carbone tout en répondant à la demande à moyen terme.

Le gouvernement réaffirme son engagement envers les énergies renouvelables, mais là aussi, leur développement accuse un retard considérable. En 2014, les énergies renouvelables représentaient 23 % à 24 % de la production électrique, contre seulement 17,6 % en 2025, bagasse incluse. À noter que la très grande partie du renouvelable est produite à partir de la bagasse. L’ambition des 60 % d’énergies renouvelables d’ici 2030 semblent aujourd’hui hors de portée. 

3. Une coopération internationale pour éviter le pire

Dans l’urgence, le gouvernement a sollicité l’aide de partenaires internationaux. Une délégation indienne de haut niveau collabore actuellement avec le CEB et la Mauritius Renewable Energy Agency (MARENA), entre autres. La France, via l’Agence française de développement, et la Chine apportent également un soutien technique. L’objectif est double : sécuriser des solutions immédiates et bâtir une stratégie énergétique durable.

Cependant, la situation financière du CEB, avec un découvert de Rs 7 milliards, complique ces efforts.

 

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