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Condamnation pour corruption électorale : retour sur le cas Ashock Jugnauth

Ashock Jugnauth

Comble d’ironie, la circonscription n°8 est, à nouveau, le théâtre de contestation de l’élection d’un Jugnauth. Alors que le cas contre Pravind Jugnauth a été entendu lundi, son oncle avait, lui, perdu devant le Privy Council en novembre 2008, soit près de 15 ans auparavant.

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La seule personne à avoir été jusqu’ici condamnée pour corruption électorale est Ashock Jugnauth, l’oncle de Pravind Jugnauth. Ironiquement, sa condamnation par le Privy Council, le 5 novembre 2008, a permis à Pravind Jugnauth de revenir au Parlement après sa défaite de 2005. Cela a été possible grâce à l’élection partielle du 1er mars 2009 organisée dans la circonscription n°8 (Quartier-Militaire/Moka) à la suite du jugement qui avait invalidé l’élection d’Ashock Jugnauth.

L’affaire Ashock Jugnauth prend racine lors des élections générales du 3 juillet 2005. Ministre de la Santé sous le gouvernement MSM-MMM depuis 2000, il se présente de nouveau sous la même bannière et remporte la première place.

Raj Ringadoo, candidat travailliste, termine à la 5e place. Non satisfait, il présente une pétition électorale le 22 juillet 2005, arguant que « depuis la dissolution de l’Assemblée nationale le 24 avril, et en tout cas depuis la délivrance du Writ of Election le 9 mai 2005, l’intimé et ses agents et personnes agissant en son nom avec son consentement et sa connaissance se sont livrés à des pots-de-vin, contrairement aux articles 45(1)(a)(ii) et 64(1) de la loi sur la Représentation du peuple, afin d’obtenir, de promouvoir et/ou d’influencer l’élection du répondant dans la circonscription n°8 ».

Quatre points sont mis en avant par Raj Ringadoo : lors d’un meeting public le 29 juin 2005 à St-Pierre, Ashock Jugnauth a déclaré que des fonds publics étaient disponibles pour l’acquisition d’un terrain destiné à fournir un espace supplémentaire à la section musulmane du cimetière local. Les trois autres questions étaient globalement similaires les unes aux autres. Il s’agissait d’exercices menés par le ministère de la Santé pour recruter trois groupes de personnel dans la période précédant les élections législatives de juillet 2005. Les trois groupes étaient les General Workers, les domestiques hospitaliers et les aides-soignants (Health Care Assistants).

Gain de cause

Le 20 mars 2007, deux juges de la Cour suprême, Paul Lam Shang Leen et Bhushan Domah, donnent gain de cause à Raj Ringadoo sur les quatre points. Ils invalident l’élection d’Ashock Jugnauth, qui se tourne cependant vers le Privy Council.

L’affaire sera entendue devant cinq Law Lords du Privy Council : Lord Scott of Foscote, Lord Rodger of Earlsferry, Lord Walker of Gestingthorpe, Lord Brown of Eaton-under-Heywood et Lord Mance. Dans son jugement, le Privy Council indique qu’il est « convaincu qu’après avoir procédé à une analyse et une évaluation minutieuse de la preuve, la Cour suprême était pleinement en droit de parvenir aux conclusions qu’elle a tirées en ce qui concerne ces trois plaintes et – sur la base que, avec la participation de l’appelant, des promesses d’emploi avaient été faites aux électeurs, étant entendu qu’en échange, ils voteraient pour lui – pour constater le motif de la plainte établi ».

Lors de l’élection partielle du 1er mars 2009, Ashock Jugnauth, qui a perdu son siège, se représente comme candidat dans une alliance MMM-PMSD-Union Nationale contre son neveu Pravind Jugnauth, qui sera activement soutenu par le Parti travailliste. Ayant obtenu 42,04 % des votes contre 52,46 %, Ashock Jugnauth est battu.

Affaire Suren Dayal devant le Privy Council : Divergence d’opinions entre juristes

« La position de Suren Dayal était plus difficile à défendre. » C’est l’avis de l’avocat Penny Hack concernant la contestation de l’élection du Premier ministre Pravind Jugnauth, de Yogida Sawmynaden et de Leela Devi Dookun-Luchoomun devant le Privy Council. Une affaire portée par Suren Dayal, candidat battu aux élections législatives de 2019 dans la circonscription n° 8.

En revanche, l’argument du camp de Pravind Jugnauth et de ses deux colistiers était « plus direct », souligne l’homme de loi. « La loi à Maurice permet certaines largesses. Par exemple, on parle de promesse électorale et de corruption. Une promesse peut être l’équivalent d’une corruption, mais la question est de savoir si la promesse a été faite avec une intention malhonnête », ajoute-t-il. 

La complexité de ce cas, selon Me Hack, est que la Cour suprême « a refusé de voir certaines réalités ». « C’est sur ce refus que repose toute la décision de la Cour suprême », fait-il part. 

D’ajouter que les Law Lords vont examiner les points de droit. « Techniquement, le Privy Council a les mains liées. » Prenant l’exemple de la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC), Me Hack soutient que la Cour suprême n’a pas trouvé que la MBC n’était « pas indépendante ». 

L’ancien juge Vinod Boolell voit les choses sous un angle différent. « Je ne pense pas qu’on puisse parler d’optimisme, ni de pessimisme dans cette affaire. C’est vrai que l’avocat de Suren Dayal n’a pas été percutant, mais chaque avocat a son style dans sa plaidoirie. Je trouve que Robin Ramburn, l’avocat de Suren Dayal, reste confiant, mais le Privy Council aura le dernier mot. Il sera important de déterminer quand la campagne électorale du gouvernement a vraiment commencé et si les promesses du Premier ministre étaient un ‘bribe’. Le reste ne compte pas », a-t-il dit. 

 

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