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Campagne Enn Sel Lepep Kont Covid : quelle efficacité ?

Il s'agira d'insister sur la nécessité que le virus circule toujours que le déni est dangereux.
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Lors du lancement de la nouvelle campagne nationale de sensibilisation sur la Covid-19 au complexe sportif à Côte d’Or le dimanche 23 mai, l’importance du respect des consignes sanitaires, a été soulignée. Baptisée Enn Sel Lepep Kont Covid, cette campagne aboutira-t-elle à conscientiser davantage les Mauriciens sur les gestes barrières ?

Comme la Covid-19 perdure à Maurice, la cohabitation est une source de préoccupation tant pour la population que pour les autorités. En mars 2020, lorsque la pandémie a atteint Maurice, les autorités ont initié une campagne de sensibilisation pour conscientiser les Mauriciens. Notamment sur la maladie et sur les gestes barrières. Cela tout en veillant que les consignes sanitaires soient respectées afin d’enrayer au plus vite l’épidémie. 

Après avoir vaincu une première vague, le pays s’est retrouvé, depuis le 10 mars 2021, en face d’une deuxième vague. Confinement total, traçage des cas positifs, mise en quarantaine de toute personne potentiellement exposée au virus, identification des foyers de l’épidémie, classification des endroits contaminés en zones rouges, restrictions de sorties, règlements à respecter en vertu de la Quarantine Act, verbalisations et contrôle pour non-respect des gestes barrières et maintenant une nouvelle campagne nationale de sensibilisation pour lutter contre la pandémie.  

Maintenant  qu'il y a une résurgence de cas, le maintien  des gestes barrières est essentiel.

Voici autant de mesures prises par les autorités pour assurer la santé publique des Mauriciens. Ces derniers respectent-ils vraiment les consignes ? 

Highlight de la campagne : piqûre de rappel sur les gestes barrières 

Enn Sel Lepep Kont Covid est une campagne nationale de sensibilisation sur la Covid-19 du ministère de la Santé en collaboration avec plusieurs partenaires.  Parmi, la WHO, les Nations Unies, la MFDC, la MBC et GIS. D’une durée de trois mois, elle comprend des affiches informatives sur les gestes barrières qui seront placées dans les centres de santé, des entreprises, bureaux et lieux publics. Des messages, sous forme de vidéo, seront également adressés au public par des personnalités, des jeunes, des sportifs et des artistes, entre autres. Pareillement, la sensibilisation sur l’importance des gestes barrières se fera dans les centres commerciaux, dans les rues de la capitale et dans divers endroits du pays. Notamment par des jeunes en collaboration avec le ministère de la Jeunesse, entre autres. Toute une panoplie de matériel a été réalisée pour la sensibilisation nationale sur la Covid-19. « C’est une continuité des campagnes entamées depuis mars 2020. C’est une piqûre de rappel pour les gestes barrières pour assurer la santé publique », explique un cadre du ministère de la Santé.

À Quatre-Bornes - Leila, 50 ans : « J’espère que ces messages s’ancreront dans les esprits »

Lorsque la pandémie a atteint Maurice, Leila et sa famille ont tout fait pour éviter les risques de contamination au virus. Ainsi depuis le premier confinement, cette mère de famille âgée d’une cinquantaine d’années confie que tout comme les règlements de la Quarantine Act, elle a imposé des règles à la maison. Cette habitante de Quatre-Bornes explique que chaque personne qui sort que ce soit pour faire des courses ou aller au boulot doit impérativement, en rentrant à la maison, enlever les chaussures et les vêtements dans le garage et les mettre dans un panier. « Nous avons une salle de bain en dehors de la maison. Donc, tout le monde doit prendre une douche avant de rentrer à l’intérieure », dit-elle. 

Celle-ci précise que ses enfants ne sortent jamais sans masque et hand sanitizer. « Je les rappelle constamment de faire attention. D’une part pour assurer leur santé et d’autre part celle de mon mari qui est âgé et malade. Depuis la Covid-19, nous faisons tous l’effort pour les gestes barrières », confie Leila. 

Néanmoins, elle ne cache pas sa crainte de contracter le virus lorsque des visiteurs ou des proches viennent chez elle. Surtout les dimanches. « On ne sait pas qui est porteur du virus. Ce n’est pas toujours évident de leur fermer la porte », ajoute-t-elle. 

Que pense Leila de la nouvelle campagne nationale de sensibilisation ? Elle répond : « En voyant ce qui se passe dans les rues et le nombre de cas actifs au virus, je pense qu’il est important de continuer à éduquer les gens. Car il y a toujours des personnes qui ne respectent pas les gestes barrières. J’espère que les messages de cette campagne s’ancreront dans les esprits ».


En autobus - Mahesh, 40 ans : « Mo konpran ena konsign, sa loder lalkol-la pa fasil »

En autobus
   

Vers les 11 heures, des passagers prennent un autobus à destination de Beau-Bassin. Devant la porte d’entrée, le receveur pulvérise à la chaîne leurs mains avec « Lalkol blé ». Sans broncher une jeune femme regagne un siège. Mais pas question pour Mahesh, 40 ans, de se désinfecter les mains avec le produit. 

Face à son refus, le receveur n’a autre choix que de le laisser entrer dans l’autobus. Le chef de gare est témoin de la scène. Il indique que c’est un problème récurrent tous les jours. Quid du gel hydroalcoolique ? « Nous faisons avec ce que la compagnie nous donne. Les gens ne respectent pas les protocoles. Certains refusent de se désinfecter les mains, car l’odeur d’alcool les importune. » Mahesh laisse entendre : « Mo konpran ena konsign, sa loder lalkol-la pa fasil. Ti bisin o-mwen itiliz enn prodwi korek ». Masque au visage et dans un siège libre tout en respectant la distanciation sociale, nous avons fait le trajet jusqu’à Beau-Bassin. Dans l’autobus, tout le monde garde autant que possible la distanciation sociale. Sauf une dame qui s’est mise à côté d’une autre. Elle baisse son masque pour faire la causette.

Tandis que parmi les autres passagers, d’autres ont le masque sur le menton. Si ce n’est pas pour manger, c’est pour parler au téléphone. Une fois fini, ce n’est pas pour autant que le masque est remis correctement. À l’arrêt d’autobus vers Plaza, des passagers en attente des autobus n’observent pas la distanciation sociale. Certains ne portent pas correctement leur masque et discutent tout en rigolant. Et ce n’est qu’au moment d’entrer dans l’autobus de leur destination qu’ils se couvrent la bouche avec leur masque. Mais une fois à l’intérieur et assis, le masque est de nouveau abaissé jusqu’au menton, sans se soucier que la moindre imprudence peut mettre en danger ceux présents.


 

Dr Catherine Gaud : « Si des gens se mettent hors la loi, ils en porteront la responsabilité »

Cette campagne nationale de sensibilisation sur la Covid-19 a pour objectif de faire respecter les gestes barrières. Mais aussi pour que la population comprenne que chacun est responsable de son attitude pour veiller à la santé de tous et au bon fonctionnement du pays. Ainsi affirme la conseillère au Bureau du Premier ministre sur la Covid-19, la Dr Catherine Gaud. 

Que font les autorités pour enrayer la pandémie ? 
Tout ce qu’il faut, en citant pour exemple le dépistage, le contact tracing, l’isolement des cas contacts, la mise des patients en centre de soins, la coordination de la réponse (Hight level Commitee), la conférence de presse pour l’information du public, la vaccination de la population et la campagne nationale pour conscientiser le grand public sur les gestes barrières. 

La sensibilisation de la population est-elle un pari difficile ? 

Dr Catherine Gaud
  


Je constate qu’aujourd’hui les gens ont moins peur du virus, qui ne se voit pas, et ils pensent que cela ne va pas leur arriver. Ce déni est très dangereux. Pour que la campagne de sensibilisation réussisse, dit-elle, il faut la médiatiser, faire des mobilisations et rappeler sans cesse les gestes barrières à travers divers médias. Informer et former sont toujours essentiels mais il faut aussi rappeler les messages.

En quoi Enn Sel Lepep Kont Covid diffère-t-il des autres campagnes de sensibilisation des autorités faites depuis mars 2020 ?
Cette nouvelle campagne nationale de sensibilisation comprend plus de visuels mauriciens qui symbolisent la population de l’île. Elle comporte aussi un message d’union et de lutte commune, en particulier la responsabilité individuelle pour une victoire commune sur la Covid-19.

La raison de cette campagne est-elle liée à l’indiscipline qui persiste ? 
Oui. Nous notons qu’il y en a beaucoup trop. Très souvent, les masques ne sont pas portés de façon correcte, la distanciation physique n’est pas respectée et des réunions se font avec de nombreuses personnes, voire plus de 10. Au même moment où beaucoup de Mauriciens font tous ces efforts, d’autres les rendent inutiles. Car avec ce virus, la propagation est rapide. 

Quel scénario pour Maurice si un tel scenario persiste ?
Si les personnes sont indisciplinées et ne donnent pas toutes les informations durant le contact Tracing et si des personnes malades se cachent, ce sera très mauvais pour le pays. A elles seules, les autorités ne pourront pas enrayer la pandémie. Il faut nous aider. Beaucoup de personnes respectent très bien les consignes. Mais c’est tout le monde qui doit les respecter et au cas contraire, ça deviendra un problème. 

Maurice a 99 cas actifs en ce moment, est-ce le non-respect des gestes barrières la cause ? 
Oui, mais aussi parce que des individus positifs ne nous donnent pas tous leurs contacts et d’autres qui sont infectés et qui se cachent. 

Est-ce que des informations sont cachées au public ? 
Au contraire. Depuis le début de l’épidémie, nous avons donné une information quotidienne et transparente. Néanmoins, certains ne peuvent s’empêcher d’inventer des sornettes, les fake news, selon le langage actuel.

Je constate qu’aujourd’hui les gens ont moins peur du virus."

Est-ce que la rétention des informations est dangereuse ?  
Ce serait inquiéter les gens afin qu’ils ne fassent pas confiance à leur système de santé et justement faire naitre une suspicion sur la véracité des communiqués.  Selon elle, le problème vient de toutes les histoires qui sont inventées. Notamment pour des raisons non médicales et autour de la vérité. C’est ça qui fait mal aux gens et qui décrédibilise le discours ainsi que les informations données par le ministre de la Santé qui, je peux vous l’assurer, ne cache rien. 

Dans quel mesure cette campagne aura-t-elle une incidence sur le changement de mentalité ? 
Nous informons, nous sensibilisons. Les gens ne peuvent pas venir dirent qu’ils ne sont pas au courant. S’ils se mettent hors la loi, ils en porteront la responsabilité.

Quel  est le plan de recours si cette campagne échoue ? 
On ne peut vaincre ce virus sans l’effort de tous. Après, si malheureusement les gens ne comprennent pas, il faudrait prendre des sanctions contre les contrevenants.

Pourquoi est-il important que tout le monde joue le jeu pour retrouver une vie « normale » ?
Si une seule personne ne fait pas ce qu’il faut, cela peut mettre en péril toutes les autres.


Métro  : « Mask obligatwar ek handsanitizer dan tou kompartiman »

Vers les 13 heures, direction la station du Metro Express à Rose-Hill.  Sur la plateforme, des passagers attendent l’arrivée du tram à destination de Port-Louis. Personne ne respecte pas la distanciation sociale. En empruntant les escaliers, on s’attend à la prise de température et la désinfection des mains. Mais, aucun employé du Metro Express en vue. 

Métro
   

On s’approche d’un superviseur et on lui demande s’il y a des protocoles avant d’embarquer ? Il répond : « Si, si. Il y a quatre désinfectants pour les mains dans le train. Les appareils sont rechargés avant chaque service tous les matins. Le niveau de produit disponible est également vérifié. Quant à la prise de température, nous avons des équipes qui le font sur tous les plateformes ». Mais personne n’a pris notre température. Qui est chargé de faire cet exercice ? « Vous voyez ce garçon près du distributeur de ticket qui aide cette dame, c’est lui », indique le superviseur. Mais comment peut-il aider les passagers et prendre les températures en même temps ? « Il y en a d’autres qui le font mais là ils sont partis déjeuner. En ce moment, il n’y a pas beaucoup de passagers. Mais durant les heures de pointe, la vérification de température se fait plus », soutient-il, tout en nous indiquant le départ du tram.  

Une fois à l’intérieur, nous testons le hand sanitizer, afin de voir s’il fonctionne. Contrairement à hier, il est rempli. « Nou rapel tou bann pasager ki por du mask li obligatwar ek ena handsanitizer dan tou konpartiman trin », entendons-nous. 

Un coup d’œil autour de nous et on note quand même des passagers avec leur masque au menton. Encore une fois,  durant le trajet, des passagers montent à bord sans se désinfecter les mains avant de s’asseoir. A notre sortie du métro, nous avons marché un peu dans les rues. 

Et le constat est que certaines personnes sont encore indisciplinées. L’absence de masque ou alors le masque au menton ainsi que le non-respect de la distanciation sociale sont flagrants. Tandis que d’autres respectent les consignes à la lettre. Devant les supermarchés, tous se plient aux consignes avant de faire leurs achats. Mais une fois sortis, le ‘masque menton’ reprend ses droits.


 

Dr Vasantrao Gujadhur  : « La sensibilisation doit être faite dans un langage simple » 

Pour l’ancien directeur de la santé, le Dr Vasantrao Gujadhur, la sensibilisation nationale sur la Covid-19 revêt toute son importance. Cependant, il estime que les messages de la campagne doivent être faites dans un langage simple, voire en kreol. Notamment à la télévision, sur les réseaux sociaux et autres médias. « Il faudrait aussi que des personnes clés soient privilégiées pour diffuser les messages. Notamment celles que le public écoutera. Le Risk Communication est important pour instaurer la confiance au public », dit-il. 

Ce dernier pense aussi que le gouvernement doit aussi accorder un intérêt particulier au port du masque. Selon lui, en ce moment, tous les types de masques sont disponibles dans les quatre coins du pays. Beaucoup de personnes en portent, même des masques en tissus et à motifs floraux ou autres. « Il faudrait que les masques en vente soient approuvés par le Mauritius Standards Bureau. Il faut qu’ils soient aux normes, sinon ils ne protègeront en rien.  Ce serait comme un coup d’épée dans l’eau », dit-il, en constatant aussi que de nombreuses personnes utilisent le même masque à plusieurs reprises. « C’est dangereux et inefficace. Le gouvernement devrait subventionner pour un certain temps les masques appropriés. Cela permettrait aux gens d’en acheter souvent et de les changer. Car, en ce moment, ils dépensent beaucoup d’argent pour s’en acheter et ce n’est pas facile pour eux », dit-il. 

Quant à l’utilisation de l’alcool dans les autobus pour la désinfection des mains, le Dr Vasantrao Gujadhur soutient que ces désinfectants sont à privilégier pour éviter tout déconfort. Même si les commerçants et entreprises privilégient le principe de « cut cost », ils doivent cependant adopter les bons principes et suivre les consignes. « Pour être efficace, le hand sanitizer doit contenir 70 % d’alcool, de la glycérine et de l’hydroperoxide. Je conseille ainsi au membre du public de toujours avoir du gel désinfectant sur eux. Il est en vente partout », conclut-il. 

 

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