Elle a un doux prénom, Sarah. Elle n’a que 15 ans. Pourtant, elle donne du fil à retordre à ses 11 frères et sœurs. Elle a choisi de vivre dans la rue depuis deux mois avec son copain Kinsley, un homme violent en liberté conditionnelle. Ses proches ont récupéré la mineure, vendredi soir à Beau-Bassin. Mais elle a décidé de faire une énième fugue dans la soirée, le même jour.
Elle est fugace. Elle traîne dans les rues de la capitale un jour, un autre à Rose-Hill, puis à Beau-Bassin. Sinon, c’est à Vallée-Pitot ou à Tranquebar qu’on peut la trouver avec un certain Kinsley, tout juste majeur.
Ils étaient presque voisins à Camp-Levieux et ont eu des atomes crochus et désormais, c’est le grand amour. La mineure de 15 ans a décidé de faire une onzième fugue. Cette fois, pour aller se jeter dans les bras de son amoureux. Ils dorment dans la rue, à proximité d’une banque à Beau-Bassin ou encore dans une maison abandonnée à côté de la piscine Serge Alfred, à Beau-Bassin.
Nous souhaitons que ces enfants, qu’importe leur parcours, aient un encadrement»
« Il y a quelques années, elle vivait avec notre mère dans le village de St-Julien ou avec notre grand-mère. Sarah quittait la maison sans rien dire. Elle allait souvent chez des amis et ne rentrait que deux ou trois jours après. On a déposé des cas de missing à maintes reprises. C’est un enfant beyond control et c’est triste qu’elle a emprunté ce chemin », soutient son frère.
Lors d’une escapade, des policiers de la station de Quatre-Bornes avaient mis la main sur les deux fuyards et tourtereaux, Kinsley et Sarah. « Si je vous dis toute l’histoire rocambolesque qu’ils nous ont racontée, on pourrait faire un livre, tellement les mensonges étaient grotesques », nous livre un proche, faisant référence à ce que lui a dit un policier.
Alors que les policiers les avaient placés dans une salle, le temps de prendre leurs dépositions, ils ont pris la poudre d’escampette à travers une fenêtre, au grand étonnement des officiers en fonction»
Alors que les policiers les avaient placés dans une salle, le temps de prendre leurs dépositions, ils ont pris la poudre d’escampette à travers une fenêtre, au grand étonnement des officiers en fonction.
Vani, la grande sœur de Sarah, est furieuse devant le comportement de celle-ci. Elle souhaite que sa petite sœur retrouve ses repères. « Tout ce que Sarah a voulu avoir, elle l’a eu, contrairement à nous. Elle a sa chambre, elle a des parfums de marque, elle va à l’école, elle a tout et ne réalise pas la chance qu’elle a. alors que nous, on a galéré, car nous étions nombreux. Notre papa est mort et Sarah nous a alors fait vivre un calvaire. Si je la retrouve, elle aura une raclée », soutient-elle.
Cette famille ne veut pas sauver la face. Elle en a marre. Certains frères et sœurs de Sarah veulent lui tendre la main mais elle a choisi de refuser toute aide. Quant à Kinsley, il s’est retrouvé à la rue, à la suite de conflits familiaux. Du moins, c’est ce qu’il raconte.
Des habitants de Beau-Bassin ont voulu aider ces deux jeunes, car dormir dans la rue en hiver est un calvaire. Ils ont ainsi alerté les autorités, mais en vain. Ces dernières ont fait la sourde oreille. « Nous souhaitons que ces enfants, qu’importe leur parcours, aient un encadrement. La rue n’est pas une option, indépendamment des circonstances. Un des habitants avait même proposé d’aider financièrement l’organisation qui va les soutenir. Nous avons compris que ce sont des enfants à problème. Mais ce n’est pas une raison pour les laisser livrés à eux-mêmes, sans repères, dans la rue. De plus, en restant dans la rue, ils restent oisifs, sans travail, sans éducation. Ils seront, à terme, un danger pour les habitants de cette région. Ils vont nous voler et nous agresser », avance une habitante de la région, Emma. Jusqu’ici, ces riverains attendent un encadrement des autorités pour les soutenir.
Un couple infernal
Kinsley est connu pour être très violent, selon des proches. Il aurait un cutter sur lui, il vole, il menace. Il est très protecteur envers Sarah et il s’inquiète peu des conséquences. Il semble n’avoir rien à perdre. Quand Le Dimanche/L’Hebdo l’a rencontré avec Sarah à Beau-Bassin, jeudi, il paraissait tranquille. Ils voulaient à manger, ce qu’on leur a offert, car il faisait frisquet dans cette région à 19 heures. Kinsley nous disait qu’il cherchait du travail. Sarah, elle, buvait les douces paroles de son bien-aimé. Sarah dit aimer Kinsley. Elle le suit dans la rue. Elle dort dans des taudis, même dans le froid de l’hiver, blottie contre son bien-aimé. Et si elle tombait enceinte, si on les attaquait... Ils reçoivent de l’aide des passants ou ont à manger avec les propriétaires des commerces du coin, pour survivre.
Une opération-sauvetage qui n’a rien donné
Il était 18 h 55, le vendredi 5 juin. Une petite équipe, composée de frères et sœurs de Sarah, soit cinq personnes, a garé sa voiture sur le parking de la banque MCB à Beau-Bassin. Puis, elle a marché une centaine de mètres pour atteindre la rue Napier Broom (dite rue Téléphone), où se trouve les deux jeunes. Là, les deux amoureux étaient blottis l’un contre l’autre. Les proches de Sarah se sont rués vers eux et Sarah n’a pu prendre la fuite, mais Kinsley si. Elle a été conduite, au départ, au poste de police de Beau-Bassin, puis vers celui de Stanley, où des dépositions formelles pour fugue ont été faites contre Sarah.
Quand les policiers l’ont interrogée, selon sa maman Annick, « elle n’a pas ouvert la bouche, elle a refusé de répondre aux questions ».
Entre-temps, son frère a appelé la CDU. Une responsable lui a dit ceci : « Prenez la fille et emmenez-la chez sa mère. Demain, vous l’emmenez au bureau. C’est la Brigade des mineurs qui s’occupe de ce genre de cas. « Mon fils lui a répondu que Sarah est une enfant hors de contrôle et qu’elle risque de fuguer de nouveau, car elle en a l’habitude », relate la maman.
Effectivement, ce qui devait arriver arriva. « Sarah est venue à la maison. Elle a pris un bain, a mangé, puis elle est entrée dans sa chambre. Je lui ai demandé si je devais fermer la porte de sa chambre. Elle a refusé, me disant qu’elle n’allait plus s’enfuir. Il était 23 heures. Quand je me suis réveillée à 4 heures du matin, elle n’était plus là. Elle avait pris des vêtements et d’autres choses, et elle est partie. Je ne sais comment elle a fait pour passer entre les barreaux de la fenêtre et j’ai dû encore une fois aller faire une déposition pour fugue », soupire la maman de Sarah.
Au niveau de la CDU, on a attendu en vain une réaction de sa part. Le PMO est lui aussi au courant, car ce bureau a contacté l’ONG Saphire pour qu’elle intervienne auprès de la mineure.
La maman de Sarah a aussi consigné une déposition contre Kinsley pour détournement de mineure.
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