- Cinq suspects, dont un Réunionnais, en état d’arrestation
- Une caméra Safe City sabotée pour éviter d’être repéré
- Les astuces ingénieuses des dealers
Les trafiquants de drogue utilisent des méthodes de plus en plus ingénieuses pour échapper aux autorités. Ces derniers jours, quatre Mauriciens impliqués dans le trafic de cannabis entre Maurice et la Réunion, et un « collecteur » réunionnais ont été arrêtés. L’un d’eux a même avoué avoir saboté une caméra de surveillance à Pointe-aux-Sables en la couvrant de peinture, afin d’éviter d’être repéré lors d’une transaction importante de zamal.
Grâce à des renseignements précis et une surveillance rigoureuse, les autorités ont réussi à intercepter les suspects, à terre comme en mer. Les efforts coordonnés de la brigade antidrogue (Adsu), de la Maritime Intelligence Cell (MIC) et de la Customs Anti-Narcotics Section (CANS) ont permis de déjouer cette opération criminelle.
Dans leur lutte contre ce trafic, les autorités ont procédé à l’arrestation d’un Réunionnais durant la semaine écoulée. Jean-Luc Taritas, qui avait élu domicile à Grand-Baie, était chargé de « collecter » l’argent émanant de la vente de zamal à Maurice pour un caïd réunionnais.
Si les autorités mauriciennes, notamment la brigade antidrogue, la Force Crime Intelligence Unit (FCIU), la MIC ou encore la CANS, sont sur le pied de guerre contre les trafiquants de drogue, accroissant leur surveillance dans des zones stratégiques (surtout en mer) et multipliant les descentes et arrestations, les dealers, pour leur part, ne restent pas inactifs non plus.
Face à l’équipement technologique de pointe dont disposent les autorités, les trafiquants déploient des stratagèmes de plus en plus ingénieux pour atteindre leurs objectifs. Cette semaine, après l’arrestation de quatre suspects impliqués dans le trafic de cannabis entre Maurice et la Réunion, l’un d’eux a avoué avoir saboté une caméra Safe City à Pointe-aux-Sables. Ce dispositif représentait un obstacle majeur pour l’équipe de trafiquants à terre qui planifiait une opération importante, le lundi soir : débarquer une importante cargaison de zamal achetée à l’île-sœur pour la ramener à Maurice par voie maritime. Malgré leurs efforts, l’opération conjointe de la MIC et de la CANS de la Mauritius Revenue Authority en mer a finalement fait échouer ce « payment trip » des trafiquants.
La bande de trafiquants avait minutieusement prévu leur passage à Pointe-aux-Sables, afin de neutraliser une caméra de surveillance. Cependant, ils n’avaient pas anticipé que d’autres caméras le long de la route menant à Pointe-aux-Sables les captureraient également.
Grâce à l’efficacité des unités de renseignement de la police, les autorités ont rapidement découvert que la bande se préparait à une importante transaction sur place, impliquant le transport d’une somme d’argent destinée à l’achat de drogue à la Réunion.
Mardi 9 juillet, la FCIU, avec l’aide de la MIC, a ainsi épinglé quatre individus. Les deux premiers avaient été arrêtés en mer : Charles Andy Toolsee, 42 ans, et son fils Megan, 21 ans. Les deux autres, Ricardo Mars, 47 ans, et Stephano Marjolin, étaient eux sur la route de Pointe-aux-Sables à bord d’un SUV. Ils avaient en leur possession environ 20 000 euros (équivalant à Rs 1 million). Cet argent allait être utilisé pour l’achat d’une cargaison de zamal lors de cette transaction par voie maritime, selon les suspects.
Selon les aveux recueillis, la première étape avant l’expédition était de neutraliser tout ce qui pourrait représenter le moindre danger pour les suspects. Ainsi, le vendredi 28 juin, la caméra Safe City a été recouverte d’une peinture noire et les câbles électriques la reliant au réseau sectionnés. La caméra enregistrait et diffusait les images de la plage de Pointe-aux-Sables. L’enquête policière a révélé que trois suspects s’étaient présentés dans ce périmètre peu avant. C’est vers 2 heures que les individus sont arrivés sur place à bord d’un véhicule dont la plaque d’immatriculation était dissimulée. Ce véhicule avait été repéré par la police sur d’autres caméras CCTV de la région.
Selon Megan Toolsee, « nou ti met spray lor enn baton pou pintir kamera-la ». Le plus jeune des suspects a raconté aux limiers de la FCIU comment ses complices et lui se sont rendus sur place pour neutraliser l’appareil pour ne pas se faire remarquer lors de leur départ pour leur mission en mer. C’était lors d’un interrogatoire serré par la FCIU qu’il a tout raconté aux limiers après son arrestation.
Depuis, les quatre hommes restent en détention sous des accusations provisoires de complot pour l’importation de drogue. Le suspect Marjolin fait, lui, face à une accusation de blanchiment d’argent également.
La voie maritime très surveillée par la MIC
Outre la brigade anti-drogue, plusieurs autres unités policières et douanières redoublent d’efforts pour contrer les trafiquants de drogue qui préfèrent utiliser la voie maritime. Avec le soutien de la Maritime Intelligence Cell (MIC) de la National Coast Guard (NCG), la surveillance des points d’entrée de la drogue par voie maritime a été rehaussée. « À l’aéroport, l’Adsu et la douane sont sur le pied de guerre et procèdent à des saisies de drogue. Et depuis quelque temps, nous avons renforcé les contrôles en mer », explique un gradé des Casernes centrales.
La MIC de la NCG surveille les mouvements des bateaux suspects dans nos lagons. C’est grâce à cette vigilance que le réseau dirigé par Stephano Marjolin a été démantelé ce mardi. En collaboration avec d’autres unités, notamment la FCIU et la CANS, les complices de Marjolin ont été appréhendés lors de deux opérations menées en mer et sur terre.
Financement : 5 000 euros pour collecter l’argent du trafic
En fin de semaine dernière, la Maritime Intelligence Cell, en collaboration avec la police criminelle (CID) du Port, a arrêté un Réunionnais résidant dans un appartement à Grand-Baie. Se basant sur des renseignements précis indiquant que Jean Luc Taritas collaborait avec des trafiquants de zamal opérant entre la Réunion et Maurice, les policiers ont fouillé son domicile. Au cours de cette opération, une somme de 7 075 euros, équivalant à environ Rs 367 900, a été découverte.
Confronté à la présence de cette importante somme d’argent, Jean Luc Taritas, résidant à Saint-Paul à la Réunion, a déclaré qu’il allait recevoir 5 000 euros d’un trafiquant de drogue réunionnais basé à Sainte-Marie pour lui remettre ces devises. « J’ai reçu l’argent (7 075 euros) de deux individus pour l’achat de drogue destinée aux marchés mauricien et réunionnais. »
Inculpé provisoirement pour « conspiracy to import dangerous drugs », Jean Luc Taritas a comparu devant le tribunal de Rivière-du-Rempart ce vendredi et a été reconduit en cellule policière. Les enquêteurs de la CID du Port poursuivent leurs investigations pour identifier les complices de Jean Luc Taritas à Maurice.
La ruée vers l’île sœur
Malgré le renforcement des contrôles maritimes entre Maurice et la Réunion, cela n’a pas dissuadé les trafiquants de drogue de continuer à tenter d’importer du zamal cultivé sur l’île sœur. Depuis le début de l’année, plusieurs tentatives ont été déjouées, que ce soit par le naufrage des embarcations sur la côte est réunionnaise ou par l’interception de leurs bateaux dans les eaux mauriciennes.
Mi-avril 2024, un bateau est signalé volé dans le lagon de Grand-Gaube. Une opération menée par la Maritime Intelligence Cell a permis d’intercepter cette embarcation près de l’île Plate. Le skipper et son aide ont été arrêtés. Lors de leur interrogatoire, ils ont affirmé qu’un individu leur avait confié le bateau volé pour ramener de la drogue sur la terre ferme.
La facilité d’obtenir de l’herbe de cannabis à la Réunion pousse les Mauriciens à importer cette drogue malgré les risques. « À Maurice, comme le sait la police, on arrache et saisit tous les plants de marijuana, mais à la Réunion, le zamal est plus disponible et il y a moins de saisies qu’à Maurice », explique un contact.
Rs 75 000 le kilo de zamal
À ce jour, avec la hausse de l’euro, le kilo de zamal se négocie autour de Rs 75 000, comparé à Rs 50 000 il y a quelques années. Une fois que les trafiquants parviennent à ramener l’« or vert » cultivé à l’île sœur jusqu’à Maurice, ils ne peuvent que se frotter les mains devant les profits juteux qu’ils en tirent. « Enn kilo zamal kout ant Rs 500 000 e Rs 600 000 à Maurice », explique un agent du Field Intelligence Office (FIO) de l’Adsu. Dans le marché local de la toxicomanie, le gramme de cannabis réunionnais se monnaye encore plus cher : « Isi enn gram zamal kout Rs 2 500 ».
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