L’Alliance du Changement respire de nouveau. Au sommet de l’État, l’orage a cessé de gronder. La poignée de main Ramgoolam–Bérenger, la semaine dernière, n’a pas seulement scellé un cessez-le-feu : elle marque la volonté de retrouver une cohérence gouvernementale et de passer, enfin, à la mise en œuvre du programme qui les a portés au pouvoir.
Le dernier Conseil des ministres l’a montré : plus long que d’habitude, mais par excès de production, pas de frictions. Les dossiers défilent, les décisions s’enchaînent, les ministres s’attardent. Dans les couloirs, on se réjouit d’une « ambiance de travail » retrouvée. La majorité redevient un gouvernement, et non plus une alliance sous perfusion politique. La machine a repris son rythme — un rythme qui doit bondir en année 2. Le rodage ne peut plus durer.
L’adrénaline politique remonte
Et pourtant, à mi-semaine, un frisson a parcouru l’alliance : l’annonce d’une conférence de presse de Paul Bérenger. Aussitôt, les souvenirs de la crise de décembre ont refait surface : anxiété contrôlée chez les uns, pression artérielle en hausse chez les autres.
Les proches du patriarche mauve le savent : une phrase trop libre, une flèche mal dirigée, et les braises encore tièdes pourraient reprendre feu. Personne n’a envie d’un nouvel épisode de la saga « Game of Thrones à la mauricienne ».
Son entourage rassure pourtant : pas de procès, pas de rupture. Il veut « remettre les pendules à l’heure », corriger l’idée de « volte-face » à son encontre. Le mot l’a blessé. Et lorsque Paul Bérenger ne digère pas… c’est tout le système digestif politique qui s’enflamme, ironise un ministre mauve.
Deux courants, et des équilibristes
Au MMM, la fracture ne s’est pas effacée :
• Ceux qui considèrent que quitter le gouvernement serait suicidaire.
• Ceux qui suivront leur leader quel que soit le chemin — même s’il mène loin du pouvoir.
Et au milieu, les funambules : « oui » au Premier ministre, « oui » au leader mauve… exactement dans le sens du vent. Ces profils existent partout ; mais dans une alliance sous tension, ils deviennent cruciaux. Comme ce ministre qui n’a plus répondu à personne pendant les trois jours d’alerte maximale.
Quant à Joanna Bérenger, certains l’imaginaient déjà sur les bancs de l’opposition ou sur le trône mauve. Elle dément.
Ramgoolam reprend la main
Navin Ramgoolam avance méthodiquement ses pions. La reconduction du Commissaire de police l’a prouvé : il fixe le cap, et personne d’autre. Ce geste a valeur de message : le Premier ministre ne sera pas dirigé par procuration.
Plus encore, l’insistance à propos de la nomination possible de Dhiren Dabee à la tête d’Air Mauritius est lue comme une démonstration d’autorité supplémentaire.
Navin Ramgoolam semble être décidé d’effacer une perception : celle du Premier ministre sous tutelle du mauve historique. La crise l’a certes fait réfléchir ; la réponse doit être politique. Et visible.
Les défis qui n’attendent pas
Pour l’année 2, les chantiers sont immenses. Ils ne pardonneront ni les egos en liberté, ni les parenthèses partisanes.
La drogue. Elle gangrène, elle tue, elle infiltre. La National Crime Agency devra frapper juste et vite — et surtout haut.
La sécurité. La peur gagne le quotidien. La loi doit redevenir protection concrète, pas souvenir rassurant.
La vie chère. Aucune réforme ne survivra si le panier des Mauriciens continue de s’alourdir. C’est là que se joue la confiance populaire.
La richesse de demain. Transition énergétique, économie océanique, numérique : le futur doit quitter les slides PowerPoint pour entrer dans la vie des gens.
L’intelligence artificielle. Le monde accélère. Maurice n’a plus le luxe de regarder passer les trains.
L’heure des comptes approche déjà
Dans un quinquennat, trois années pour bâtir, la quatrième pour défendre, la cinquième pour rendre des comptes. L’Alliance du Changement entre donc dans la seule année qui compte vraiment : celle où l’on passe du discours au résultat, du programme au chantier du pouvoir à la preuve. Si elle réussit : récit construit. Si elle échoue : réponse immédiate des urnes.
Les Mauriciens n’attendent pas un gouvernement parfait. Ils en veulent un efficace. Et surtout, uni.
À 80 ans passés, Ramgoolam et Bérenger sont à l’âge où les hommes politiques ne cherchent plus la conquête… mais la postérité. Ils ont l’occasion unique de terminer leur carrière en beauté, de laisser une trace qui dépasse leurs légendes personnelles, de faire de leur dernière séquence un chapitre historique.
Ils n’ont pas le droit de gâcher leur ultime mandat. Ni de finir en eau de boudin, noyés dans leurs querelles, oubliés par l’Histoire qu’ils ont contribué à écrire.
La deuxième année commence. Elle dira si leur héritage sera une référence… ou un regret.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !

