Interview

Me Hervé Lassémillante: «Maurice est un des rares pays où la charge provisoire existe encore»

Me Hervé Lassemillante, vice-président de la National Preventive Mechanism Division de la National Human Rights Commission, estime qu’il faut abolir la notion de ‘Provisional Charge’. Il fonde l’espoir que ce sera chose faite avec l’introduction du Police Evidence Bill. Quel est le rôle de la National Preventive Mechanism Division (NPMD) ? Nous avons pour mission de visiter les lieux de détention, c’est-à-dire, les prisons, les hôpitaux, les postes de police, les Correctional Youth Centres (CRC), les Rehabilitation Youth Centres (RYC) de même que les salles réservées aux prisonniers dans les hôpitaux comme l’hôpital psychiatrique Brown-Séquard et l’hôpital Jawaharlal-Nehru. Nous veillons à ce que soit respecté le protocole de la convention des Nations unies mis en place concernant les droits de l’homme. S’il y a le moindre soupçon de négligence, nous agissions vite et faisons des recommandations aux autorités concernées. Uniquement pour 2015, nous avons émis 39 ‘summons’. À la prison de Melrose, depuis un an, il y a un problème de ventilation. Êtes-vous au courant ? Nous sommes au courant depuis janvier 2015. Nous avions écrit au Commissaire des prisons qui avait assuré que la question serait examinée au niveau d’un comité. Puis, l’hiver est arrivé. Nous avons continué à visiter cette prison régulièrement en 2015. En décembre dernier, nous avons envoyé une correspondance aux autorités carcérales afin de nous assurer du progrès. À la suite de cette lettre, nous avons rencontré l’Acting Commissioner of Prisons le jeudi 28 janvier 2016 afin d’aborder la question, entre autres choses. Il nous a informés qu’une commande de 40 ventilateurs avait déjà été placée et qu’ils seraient installés dans les plus brefs délais. Les premiers servis sont les dortoirs de l’unité 4 Kestrel. Les autres suivront. [blockquote] Une prison reste une prison (…). Les détenus ne jouissent pas du droit fondamental à la liberté… [/blockquote] Les divers trafics – stupéfiants, cigarettes, téléphones cellulaires, etc. – persisteraient en prison. Qu’en pensez-vous ? Nous en avons entendu parler, mais nous n’avons rien vu. S’il y a de tels trafics, les cas doivent être rapportés par l’administration pénitentiaire à la police qui devrait prendre la relève. Ce n’est pas le rôle de la NPMD de démanteler de tels réseaux. Notre rôle est de veiller à ce que les droits des détenus soient respectés, conformément aux protocoles des droits de l’homme. On entend souvent dire que les détenus sont logés et nourris, agréablement, aux frais des contribuables. Quels sont vos commentaires ? Je ne suis pas d’accord. Une prison reste une prison. Nous sommes en 2016 et il faut changer cette perception que la prison est comme un hôtel de plusieurs étoiles. Les détenus ne jouissent pas du droit fondamental à la liberté. Ils sont tenus en isolement. Il faut qu’on humanise davantage cette détention et ternir compte de l’aspect psychologique et moral. Combien de plaintes la NPMD a-t-elle reçu en 2015 ? Nous avons reçu environ 1 400 lettres de doléances. Nous examinons de près chaque plainte. Le public a accès directement à nous, sans passer par quelque intermédiaire. Ceci dans le but d’assurer une qualité de service, car les droits humains sont fondamentaux. En 2015, nous avons effectué 80 visites aux prisons et 14 visites aux cellules policières, y compris à Rodrigues. La NPMD fait des visites surprises à tout moment. Nous avons le droit de saisir tous les documents concernant les détenus, même s’ils sont confidentiels, afin de faire lumière sur une plainte. Par la suite, on peut éventuellement convoquer par voie de ‘summons’ les autorités concernées. Le prisonnier Naseerudeen Tengur, condamné à 40 ans de prison, fait face à un deuxième procès et n’hésite pas à insulter le juge. Qu’en pense la NPMD ? Il y a ce qu’on appelle un excès de punition – 40 ans, 30 ans, 20 ans et d’autres peines. Pour moi, la punition, c’est la destruction de l’individu. Il faut adopter l’attitude ‘Safe Custody and Rehabilitation’. On note une faille dysfonctionnelle dans le système. Par exemple, beaucoup de récidivistes sont d’anciens résidents d’un RYC ou d’un CYC. Nous avons déjà proposé aux autorités concernées d’organiser un séminaire en vue de trouver une solution au problème de la délinquance juvénile. Mais en vain. N’oubliez pas que les jeunes délinquants d’aujourd’hui risquent d’être les criminels de demain, si on n’arrive pas à détruire le mal à la racine. Un simple délit de drogue est inscrit sur le certificat de caractère des prévenus. Est-ce normal ? Non, ce n’est pas normal. Mais il y a des solutions à chaque problème. J’encourage toute personne qui a ce genre de problèmes avec son certificat de caractère d’écrire à la Commission de pourvoi en grâce pour que son cas soit examiné. Quelle est la prise de position de la NPMD par rapport à la question de ‘Provisional Charges’ retenues contre des personnes faisant l’objet d’une enquête policière ? Maurice est parmi les rares pays où existe la notion de ‘Provisional Charge’. Cela depuis deux siècles, hélas ! La NPMD espère bien qu’avec le Police Evidence Bill, ce sera chose du passé.

National Preventive Mechanism Division

  • Nombre de visites
  • Prisons : 80
  • Cellules policières : 14
  • RYC/CYC: 8
  • Shelters : 5
  • Hôpitaux : 12
  • Prisonniers : 199 hommes/ 111 femmes
  • (Juillet à décembre 2015) : 310
  • Summons ( janvier à décembre 2015) : 39
  • No de dossiers : 321
  • No de lettres : 1 400 approximativement

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