Pour l’économiste Takesh Luckho, il est crucial de surveiller de près la dette étrangère par rapport à la dette locale afin d’éviter une crise économique dans le pays.
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Pensez-vous que le ministre des Finances dispose de suffisamment de flexibilité pour établir son budget 2023-2024, compte tenu de facteurs tels que la dépréciation de la roupie, une forte inflation, la situation économique mondiale et un taux élevé de la dette ?
Le gouvernement est sur le point de terminer son mandat et le budget 2023-2024 revêt une importance cruciale, car il pourrait être tenté de mettre en place des mesures populistes en vue des prochaines élections. D’ailleurs, des observateurs politiques et économiques ont remarqué des signes précurseurs de l’approche des élections générales. Ce qui me pousse à dire que le gouvernement est condamné à trouver des sources de financement afin qu’il puisse présenter un meilleur budget possible à la population malgré les circonstances économiques difficiles.
Pouvez-vous confirmer que l’augmentation de notre dette, étant donné le niveau déjà élevé de celle-ci, ne risque-t-elle pas de mettre gravement le pays en difficulté financière ?
Exactement. Toutefois, si on étudie la composition de la dette du pays qui a atteint plus de 80 % du PIB, on constate que plus de 50 % sont locales. Cela peut se faire notamment à travers des bons de trésors émis par le gouvernement et qui sont remboursables à échéance. Je suis loin de dire que l’endettement local n’est pas un problème, mais cela éviterait au pays de subir la même situation que la Grèce et le Sri Lanka. Cela dit, si la dette internationale avait été plus importante, les conditions de prêt étranger auraient été plus contraignantes, y compris avec des taux d’intérêt plus élevés.
Le GM devra négocier des lignes de crédit avec des pays amis pour financer le Budget.
Cependant, le gouvernement est contraint de chercher des sources de financement telles que des lignes de crédit pour boucler son budget. N’est-ce pas ?
Bien que le pays connaisse une relance économique avec un taux de croissance d’environ 8 %, cela est en grande partie dû à une inflation de 11 % qui sévit depuis les huit derniers mois. En d’autres termes, notre PIB a été artificiellement augmenté. Bien que la croissance économique ait repris depuis la pandémie, nous n’avons pas encore atteint le taux de croissance réel d’avant. Par conséquent, le gouvernement devra négocier des lignes de crédit avec des pays amis pour financer son budget. Cependant, il faudra s’assurer que le niveau de l’endettement étranger ne dépasse pas le niveau de la dette locale, car cela pourrait avoir des conséquences néfastes sur le pays.
Ne pensez-vous pas qu’il serait plus sage pour le gouvernement de revoir la mise à exécution de certains de ses projets ?
Étant donné la présente conjoncture économique et les difficultés à venir sur le plan international, le gouvernement aurait pu mettre en pause des projets qui ne sont pas prioritaires. Il aurait été judicieux de se concentrer davantage sur des projets visant le bien-être de la population comme la lutte contre l’inflation, le renforcement de la roupie mauricienne et d’autres mesures sociales.
Quelles devraient être les priorités du Budget 2023-2024 ?
À mon sens, la priorité absolue devrait être de stimuler l’innovation dans l’économie mauricienne. Cela impliquerait de créer de nouveaux secteurs économiques à long terme, ainsi qu’un investissement massif dans la modernisation des secteurs traditionnels tels que l’agriculture à moyen et court terme. Cela aurait permis de créer des emplois innovants pour les jeunes, qui, pour la plupart, détiennent des diplômes universitaires. Mes autres priorités seraient, entre autres, de créer plus de facilités pour encourager les femmes à intégrer le monde du travail. J’aurais aussi accordé une attention particulière au domaine social. Cela se traduirait, entre autres, par des actions concrètes, dont l’éducation et des campagnes de sensibilisation pour protéger les jeunes du fléau de la drogue.
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