La situation du VIH/sida n’est pas sous contrôle, compte tenu de la prévalence des drogues dans la société, affirment les porte-parole de PILS et AILES. Le ministère de la Santé affirme, lui, que le nombre de nouveaux cas est en baisse. Nicolas Ritter, Brigitte Michel et Dr Deven Ponnoosamy expliquaient les faits au micro de Sunil Gopal, dans l’émission Xplik ou K Santé sur Radio Plus.
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La drogue est devenue un problème majeur, surtout avec les produits de synthèse qui seraient disponibles partout, indique Nicolas Ritter, directeur général de Prévention Information Lutte contre le Sida (PILS). Il affirme que l’épidémie du VIH/sida est concentrée parmi la population des injecteurs de drogues, soit environ un cas sur deux. Dans un cas sur quatre, poursuit notre intervenant, il s’agit de personnes engagées dans la prostitution, et un cas sur cinq concerne les hommes qui ont des relations sexuelles avec les hommes.
Ajouté à cela, entre 19 et 23 % de la population carcéral seraient infectés, selon le directeur général de Prévention Information Lutte contre le Sida (PILS). Pour Nicolas Ritter, aussi longtemps qu’il n’y aura pas de programmes appropriés pour contrecarrer cette situation, « nous ne verrons pas de réponses à ce problème. » « Il est urgent de s’attarder sur la question des drogues injectables et les drogues en général, car 60 à 70 % des usagers de drogues sont infectés par le VIH, cela après avoir utilisé une seringue souillée. »
Il regrette que les nouvelles politiques, mises en place depuis environ un an et demi, aient chamboulé le programme de Réduction des risques (RdR), lancé en 2006. Cela comprenait un programme d’échange de seringues couplé avec un programme de substitution à la méthadone à l’intention des toxicomanes qui voulaient sortir de l’enfer des drogues. Nicolas Ritter affirme qu’il y avait une bonne coordination entre tous les acteurs engagés dans la lutte contre le VIH/sida et la toxicomanie à cette époque-là. « Hélas, le programme a été chamboulé depuis un an et demi », dit-il.
Un avis que partage également Brigitte Michel, coordinatrice de d’Aide, Infos, Liberté, Espoir et Solidarité (AILES). Elle affirme que dans toutes les régions où œuvre l’Organisation non gouvernementale (Ong), il y a beaucoup de drogues injectables qui circulent auxquelles les jeunes ont accès. « Nos jeunes sont en danger s’ils n’ont pas de matériel propre pour s’injecter ou s’ils n’ont pas les informations appropriées sur la RdR », dit-elle.
Baisse de nouveaux cas
Alors que le VIH/sida est plus présent chez les usagers de drogue qui sont de plus en plus jeunes, Brigitte Michel déplore le fait qu’ils n’aient pas accès à des traitements de désintoxication et de réhabilitation. « C’est un parcours du combattant pour les faire admettre dans un centre », dit-elle. Ainsi, en l’absence d’une bonne prise en charge, nombreux sont ceux qui rechutent.
En dépit du tableau sombre que dépeignent les deux ONG, Dr Deven Ponnoosamy, Acting Head à la Aids Unit du ministère de la Santé, soutient de son côté que le nombre de nouveaux cas d’infection au VIH a connu une nette diminution ces dernières années. Cela, avec les mesures prises comme le programme de réduction des risques et les campagnes de sensibilisation. Le pays a une prévalence de 0,88 % de VIH/sida, selon lui.
De 1987, année où le premier cas a été détecté, à juin de cette année, 6 500 cas de VIH ont été enregistrés, ce qui représente 4 953 cas chez les hommes et 1 547 cas chez les femmes. Il affirme aussi que des 92 % des injecteurs de drogues infectés au VIH en 2005, le nombre est passé à 35 % à décembre 2015. Selon les derniers chiffres disponibles pour cette année, le taux était de 32 % en juin.
Levons la main sur la prévention
Levons nos mains pour #préventionVIH. Tel était le thème de la Journée de la lutte contre le sida, qui a été observée le 1er décembre. Le rapport Prévention Gap de l’ONUSIDA révèle que 1,9 million d’adultes sont infectés par le VIH sida chaque année dans le monde. Le document préconise ainsi qu’il faut redynamiser les efforts de prévention afin d’accentuer la riposte face à la maladie et de mettre fin au sida d’ici l’horizon 2030. La campagne Levons la main pour #préventionVIH vise à mettre l’accent sur la prévention chez les adolescents et les jeunes, les populations clés et les personnes vivant avec le virus.
Source : unaids.org
L’importance d’une bonne prise en charge
Les tests de dépistage du VIH peuvent être effectués dans les divers centres de santé du service public ou encore chez les ONG PILS et AILES. Les vérifications sont effectuées au laboratoire de virologie de l’hôpital Victoria. De quatre centres de traitement, le ministère de la Santé en dispose maintenant huit. Ces National Day Care Centre for Immuno-suppressed se trouvent dans les cinq hôpitaux régionaux (SSR, Pamplemousses ; Dr A. G. Jeetoo, Port-Louis ; Victoria, Candos ; Flacq et Jawaharlal Nehru, Rose-Belle) et communautaires de Mahébourg, Souillac et Yves Cantin à Rivière-Noire. Dr Deven Ponnoosamy affirme que sur les 4 200 personnes enregistrées, 3 164 suivent leur traitement régulièrement. « Nous assurons une prise en charge et conseillons les patients. Nous leur donnons aussi des explications sur la maladie, les analyses qu’ils vont subir ainsi que les traitements qu’ils vont recevoir. » Par-dessous tout, l’importance de suivre son traitement régulièrement est aussi expliquée aux patients « s’ils veulent vivre. » Dr Ponnoossamy explique que comme pour les autres maladies chroniques, diabète ou hypertension, il est important de bien prendre ses médicaments. « Un arrêt du traitement ou la prise irrégulière des médicaments peuvent entraîner des complications. Il y a plus de risque de mourir des complications liées au VIH/sida que de la maladie elle-même. »
Se faire dépister à tout prix
Le dépistage au VIH/sida est vital. C’est un des moyens de prévention de la maladie. Pour vaincre la pandémie, l’Onusida a mis en place une cible ambitieuse de traitement intitulée « 90-90-90 ».
Celle-ci préconise que, d’ici 2020, au moins 90 % des personnes vivant avec le virus connaissent leur statut sérologique ; 90 % des séropositifs suivent leur traitement régulièrement et que 90 % de ces derniers parviennent à une charge virale nulle.
Pour atteindre cet objectif, il faudrait que tout le monde travaille ensemble, lance Nicolas Ritter. Il souhaite aussi que les politiques qui freinent la lutte contre la maladie soient revues. « Un de nos plus gros problèmes à Maurice est les politiques autour des drogues et les réponses y relatives ! Nous ne pouvons dissocier la problématique du Sida à Maurice de celle des drogues », affirme-t-il.
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