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À Triangle Road, accéder à l’eau est un véritable combat quotidien. À l’instar de Tonton Apollo, 77 ans, ils sont nombreux à devoir parcourir des kilomètres chaque jour, confrontés à l’inefficacité d’un projet coûteux. Les habitants exigent des actions concrètes face à cette crise.
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«Kan mem pena manze dan lakaz, dilo li pli inportan. » Dans l’air lourd de Triangle Road, à Goodlands, les mots de Tonton Apollo résonnent. À 77 ans, ce pêcheur retraité au visage buriné par les années raconte son quotidien, un ballet incessant entre sa maison au robinet désespérément sec et la fontaine publique du centre communautaire.
Chaque jour, peu importe les caprices de la météo, il accomplit le même rituel. À 7 heures du matin, puis à nouveau à 16 heures, on peut le voir arpenter les rues, un ingénieux système de fortune sur l’épaule : un bâton auquel sont suspendus trois sacs en raphia, gorgés de bouteilles et de gallons d’eau. « Cette nouvelle routine est fatigante, mais je n’ai pas d’autre choix. Sans eau, comment vivre ? » confie-t-il, les yeux emplis de lassitude.
L’ironie de sa situation ne lui échappe pas. Chez son voisin, l’eau coule encore. « Mo pa konpran kifer kot mo vwazin delo pe vini, kot mwa, non », s’indigne-t-il, pointant du doigt cette inexplicable disparité. Depuis plus d’un an, son foyer est privé de ce droit fondamental, transformant chaque journée en défi. Car l’eau est vitale pour boire, cuisiner, assurer un minimum d’hygiène et effectuer les tâches ménagères.
La situation est d’autant plus critique que son épouse, atteinte d’une maladie cardiaque, dépend entièrement de lui. Tous les deux jours, il doit entreprendre un voyage épuisant jusqu’à Poudre-d’Or, chez sa fille, pour faire sa lessive. Un aller-retour éprouvant qu’il préférerait éviter.
Cette réalité quotidienne n’est qu’un exemple parmi tant d’autres à Triangle Road, où la pénurie d’eau est devenue chronique. A.B., mère de quatre enfants, partage le même combat. Chaque jour, seule ou accompagnée de sa petite troupe, elle fait le pèlerinage vers la fontaine du centre communautaire pour remplir ses bouteilles en plastique. « Si pa ranpli delo, be kouma nou pou fer ? » lance-t-elle, résumant l’urgence de leur situation.
Elle explique que chaque jour, ils sont nombreux à se rendre à la fontaine du centre communautaire. « Nous n’avons pas d’eau chez nous. Il m’arrive de me baigner chez d’autres personnes, et mes enfants aussi », confie-t-elle. Cette dépendance aux autres est une humiliation pour les familles concernées, qui aspirent simplement à avoir accès à une ressource de base.
Face à cette crise, l’incompréhension grandit. Les habitants de Triangle Road ne peuvent concevoir comment des travaux de tuyauterie ayant coûté Rs 700 millions à l’ancien gouvernement n’ont pas résolu leur problème. « Ena tiyo, me pena delo », résument-ils avec amertume. Pour eux, il est inconcevable que des millions de roupies aient été englouties dans un projet censé améliorer l’accès à l’eau, sans que cela se traduise par un changement tangible dans leur quotidien.
Malgré les nombreuses doléances des résidents, le silence des autorités a longtemps été assourdissant. Dans ce quartier où les infrastructures défaillantes dessinent le paysage urbain, l’eau manquante cristallise toutes les frustrations. Les appels à l’aide des résidents se sont perdus dans le vide administratif, aucun élu, aucun représentant n’ayant daigné franchir le seuil de leur détresse pour constater l’ampleur du problème, jusqu’à la visite de Nitish Beejan, député de la circonscription n°6 (Grand-Baie/Poudre-d’Or), la semaine dernière.
Outre le problème de fourniture d’eau, le parlementaire a constaté un autre problème : l’état désastreux de la route principale de Triangle Road, qui n’a toujours pas été asphaltée. Il a déploré cette situation, soulignant que ces travaux auraient dû être réalisés après la pose du nouveau réseau de tuyauterie par la CWA. Face aux routes défoncées et aux canalisations défaillantes, il a promis d’agir.
Tonton Apollo, lui, continue sa routine quotidienne, se questionnant sur les décisions de la CWA : « Zot ti repar enn tiyo, si mo kone. Depi sa dilo pa koule kot mwa. Mo pa kone kouma pou explik sa. » Acheter de l’eau en bouteille reste un luxe inaccessible pour ce foyer modeste. « Les bouteilles d’eau sont chères dans les supermarchés », dit-il.
Les habitants de Triangle Road attendent désormais plus que des paroles. Ils espèrent des actions concrètes pour mettre fin à cette situation où l’accès à l’eau, ressource vitale, est devenu synonyme de parcours du combattant. En attendant, chaque jour qui passe est une nouvelle bataille pour ce droit fondamental que beaucoup tiennent pour acquis.
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