Maurice s’impose de plus en plus comme une destination phare pour les retraités étrangers de plus de 50 ans. La « Silver Economy », introduite en 2006, mais revisitée à plusieurs reprises au cours de divers budgets a permis au pays d’attirer une population en quête de calme et de qualité de vie. Aujourd’hui, on compte environ 2 000 détenteurs actifs de permis de résidence, une statistique qui témoigne du succès de cette stratégie.
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Au cœur de cette stratégie : un permis de résidence d’une durée de 10 ans, exclusivement destiné aux étrangers âgés de 50 ans et plus. Les conditions sont simples : les candidats doivent ouvrir un compte bancaire à Maurice et s’assurer d’un versement de 1 500 USD par mois, soit une somme annuelle minimale de 18 000 USD. Ce dispositif, relativement accessible par rapport à d’autres destinations prisées des retraités, impose cependant quelques restrictions : les bénéficiaires ne sont pas autorisés à travailler sur le sol mauricien. En contrepartie, ils peuvent choisir de résider à plein temps ou partiellement dans le pays.
Au sein de l’Economic Development Board (EDB), on indique que cette mesure a été introduite en 2006, mais a été révisée à plusieurs reprises. « Actuellement, le pays compte 2 000 détenteurs actifs de permis de résidence », précise-t-on. Le Budget 2024-2025, souligne l’EDB, proposait de revoir cette mesure en permettant aux ressortissants étrangers de travailler sur le sol mauricien. Toutefois, cette proposition n’a pas été suivie d’effet.
Le président de la République, Dharam Gokhool, a récemment mis en avant cette initiative lors d’une intervention sur les réseaux sociaux. Dans une vidéo publiée par la « content maker » Aija Mayrock, qui est également auteure et poétesse, il a déclaré : « Je veux que vous veniez tous à Maurice pour vous reposer ». Le président de la République a également souligné l’importance de cette politique visant à offrir un cadre de vie sécurisé et agréable aux retraités du monde entier.
Ces réformes s’inscrivent dans une stratégie économique globale. En attirant des retraités étrangers, le gouvernement mauricien espère stimuler l’économie locale, notamment dans des secteurs comme l’immobilier et les services. Contrairement à d’autres pays aux procédures complexes, Maurice propose un cadre administratif simplifié, idéal pour une installation sereine.
« Nous attirons également des investisseurs dans plusieurs secteurs. Maurice, avec son climat favorable et son cadre paisible, dispose d’atouts majeurs pour répondre à une tendance internationale », a ajouté Dharam Gokhool lors d’une déclaration téléphonique. Quant aux ressortissants provenant de pays figurant sur la liste rouge, leurs dossiers seront soumis à une vérification approfondie par le ministère des Affaires étrangères.
Une vidéo d’une minute et 24 secondes pour promouvoir Maurice
Dans une vidéo d’une minute et 24 secondes, récemment postée sur la page Instagram de la « content maker » Aija Mayrock, les autorités mauriciennes cherchent à inciter les ressortissants étrangers de plus de 50 ans à s’établir à Maurice. Dans la vidéo, on voit le président de la République, Dharam Gokhool, exhorter les étrangers à choisir Maurice comme destination pour leur retraite, soulignant les avantages fiscaux et la qualité de vie qu’offre l’île.
Aija Mayrock : La « content creator » aux 483 000 « followers »
Aija Mayrock, une « content maker » qui compte pas moins de 483 000 abonnés sur Instagram, est la figure centrale de cette initiative. Elle se décrit comme une « Best selling author & Poet » et précise : « I make videos about the most fascinating things in the world ». Sa popularité repose sur des vidéos atypiques qu’elle partage avec ses abonnés. Elle a publié 686 vidéos qui attirent l’attention sur des sujets variés, allant de la culture à des phénomènes sociaux.
Sen Ramsamy : « Créer des infrastructures pour capter la clientèle »
Sen Ramsamy, directeur général de Tourism Business Intelligence, estime que les incitations mises en place n’ont pas bénéficié à un grand nombre d’investisseurs étrangers. « Il faudra affiner ces mesures pour attirer davantage d’investisseurs, en particulier ceux de cette catégorie. Il est essentiel de comprendre où cela a échoué afin que Maurice devienne une destination plus attractive », souligne-t-il. Selon lui, les 50 dernières années ne doivent pas être considérées comme une fatalité. « Il reste du travail à accomplir, tant au niveau de l’EDB que de la MTPA », propose-t-il.
Notre intervenant insiste sur le fait qu’il ne suffit pas d’offrir des incitations fiscales pour attirer ces investisseurs. « Il faut créer des infrastructures pour capter la clientèle. Il est aussi crucial d’examiner les conditions de vie qui seront offertes. » En outre, il plaide pour des développements et des activités diversifiées dans le pays. « Il est nécessaire de repenser les attractions existantes pour les rendre plus compétitives », termine-t-il.
Takesh Luckho, économiste : « Instaurer des mécanismes pour éviter que les habitants locaux ne soient marginalisés »
Cette stratégie, bien qu’ambitieuse, suscite des interrogations quant à ses répercussions sur la population locale. L’économiste Takesh Luckho met en lumière le potentiel économique de cette politique, qualifiée de « Silver Economy ». Selon lui, attirer des retraités étrangers ne se limite pas à leur offrir un lieu de repos, mais vise à les transformer en acteurs économiques indirects. « Lorsque ces retraités s’installent, ils disposent souvent de leur épargne accumulée durant leur carrière. Leur présence peut se traduire par des dépenses dans le développement foncier, l’acquisition de biens immobiliers ou encore des résidences de luxe. C’est une source d’investissement alternatif pour le pays », explique-t-il.
Notre intervenant explique que ce modèle s’inscrit dans une logique de diversification économique. « Les retraités étrangers, solvables et à la recherche de confort, participent à la dynamisation des secteurs de l’immobilier, des services de santé et du tourisme. Cette stratégie pourrait ainsi offrir une alternative à d’autres secteurs économiques plus volatils, tout en consolidant la réputation de Maurice comme destination haut de gamme », souligne Takesh Luckho.
Cependant, cette politique n’est pas sans conséquences. L’économiste met en garde contre les effets secondaires d’une telle stratégie, notamment en termes d’accès au foncier et de cohésion sociale. « Dans certaines régions comme Tamarin et Rivière-Noire, la forte présence d’étrangers risque de faire sentir aux Mauriciens qu’ils sont étrangers chez eux. Nous devons instaurer des mécanismes pour éviter que les habitants locaux ne soient marginalisés », précise-t-il.
Cette pression sur le foncier, accentuée par l’afflux de retraités étrangers, entraîne une hausse des prix de l’immobilier, rendant de plus en plus difficile l’accès à la propriété pour les Mauriciens. Les inégalités peuvent se creuser, notamment dans les zones où la demande étrangère est forte. De plus, la concentration de résidences de luxe peut créer une fracture entre les populations locales et les nouveaux arrivants, générant un sentiment de dépossession. Face à ces enjeux, Takesh Luckho plaide pour un contrôle rigoureux des procédures et une meilleure régulation de ce marché. « Nous devons garantir que cette ouverture économique reste un levier de développement inclusif, sans compromettre le bien-être des Mauriciens.
Cela passe par des régulations visant à préserver l’accès des locaux au foncier et à limiter les effets d’éviction », souligne-t-il.
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